Paris 2024 - De l’Olympe au déclassement : A Paris, Quiquampoix veut raviver la flamme

"J’avais un plan et il ne s’est pas déroulé comme prévu." Les mots sortent de la bouche de Jean Quiquampoix, champion olympique du tir au pistolet 25 m à Tokyo. Trois ans après l’ivresse tokyoïte, le Français peine à retrouver les sommets. À la sortie d’une année 2023 émaillée de désillusions, le Français a validé très tardivement son ticket pour les Jeux. Une anomalie pour le gendarme, bercé aux sirènes laudatives des JO, qui l’ont vu reprendre le flambeau à Rio de Maurice Larrouy, dernier médaillé olympique tricolore (or) dans la discipline, plus de 110 ans après (1900).

Pas impressionné par l’enjeu pour sa première sur l’Olympe, Quiquampoix, 20 ans, y a récolté un argent content. À l’époque, la surprise n’efface pas le bonheur, malgré l’âge et les traits juvéniles. "Pour moi, ce n’est pas une énorme surprise, j’avais fait beaucoup d’efforts à l’entraînement," justifiait-il après la finale brésilienne. Il convient de rappeler que l’Antibois s’était déjà illustré au haut niveau, champion du monde juniors (2014).

Le Graal arrive cinq années plus tard, sur le stand de tir tokyoïte. La concurrence y est féroce, avec les deux derniers champions olympiques. En finale, le tireur français dégaine sans laisser filtrer la moindre émotion, casquette antibruit vissée sur la tête et lunettes sur le nez. Programmé pour la victoire, Quiquampoix n’a même pas exulté lors de l’annonce de son titre olympique. À 25 ans, le Français a conquis son Everest mais n’a pas encore rangé les bâtons d’alpiniste.

C’est que d’autres Jeux arrivent, cette fois à Paris. Il y a à peine le temps de profiter de la vague médiatique née de son titre. Une bourrasque rafraichissante, mais courte. Lucide sur l’intimisme dans lequel est ferré son sport, Quiquampoix avouait que le sacre à Tokyo n’a pas bouleversé son quotidien. "On ne va pas se mentir, gagner les Jeux, c’est un coup de pouce financièrement, ça aide sur beaucoup de projets, c’est cool, confiait-il en 2022 dans des propos rapportés par L’Équipe. Mais ça n’a pas changé fondamentalement ma vie dans le sens où on reste un sport peu médiatisé avec peu de visibilité."

De retour dans son quotidien feutré – exceptées les quelques 450 cartouches tirées quotidiennement – dans son club d’Allauch, près de Marseille, le tireur au gabarit longiligne s’est remotivé immédiatement, alléché par les championnats du monde 2022 (et 2023). Mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Sorti dès les qualifications en Égypte (10e), Quiquampoix n’a pas fait mieux l’année suivante, seulement 24e. Pire encore, à chaque fois, le Français est devancé par son compatriote Clément Bessaguet.

De huit ans son aîné, Bessaguet a échoué d’un rien à se qualifier en finale à Tokyo (7e). Champion d’Europe un an plus tard, le Français a poursuivi sa progression avec deux médailles d’argent lors des Mondiaux 2022 et 2023. Une concurrence nouvelle pour le champion olympique en titre, qui devra également composer avec le Chinois Li Yuehong, champion du monde en titre. Bessaguet scotché dans les hauteurs du classement mondial et qualifié pour Paris 2024 bien avant son cadet, ce dernier a de son côté enchaîné les désillusions, entrecoupées de quelques rares satisfactions, comme sur les Jeux Européens (5e) ou sur la Coupe du monde de Rio (1er), toujours en 2023.

La délivrance est finalement arrivée en avril dernier, sur le tournoi qualificatif de Rio. Troisième derrière son compatriote, Quiquampoix (11e mondial) obtient le quota olympique tant désiré. "Avant d’être aux Jeux, il faut se qualifier, donc c’était une étape importante, primordiale, a rappelé l’Antibois à Eurosport quelques jours après, le précieux sésame en poche. C’est pour ça que ça fait du bien d’avoir eu ce quota et de pouvoir s’entraîner et attaquer les Jeux sereinement maintenant. C’était une pression qui était de plus en plus prenante avec le temps."

Tombé de son strapontin de favori, éclipsé par Bessaguet dans le clan tricolore, Quiquampoix part de loin mais compte sur la magie des Jeux pour refaire surface. "Les Jeux, c’est un évènement incroyable, particulièrement pour nous, les sports peu médiatisés, pétille le double médaillé olympique. Les Jeux ont permis d’éclairer la discipline, d’avoir une visibilité et une couverture médiatique qu’on n’a pas ailleurs (championnats du monde, championnats d’Europe). C’est clair que les Jeux pour un tireur, c’est le Graal. Il y a beaucoup d’attente et beaucoup de pression. Il faut se préparer avec tout ça, et au fait qu’il y aura beaucoup de soutien et de ferveur."

Une ferveur d’autant plus prégnante dans ces Jeux à domicile, où le moindre Français est porté aux nues et transporté par une foule électrisée. "Je pense que c’est clairement un avantage (Les Jeux à domicile) dans le sens où pour ma part je connais l’installation. Ça fait des années que je m’entraîne dessus. Se sentir à la maison, ça peut être un atout par rapport à mes adversaires." Lorsque Quiquampoix capte l’odeur de la scène olympique (dès dimanche 9h pour la qualification, à Châteauroux), le métal précieux n’est jamais très loin à l’arrivée. Être prêt le jour J, il sait faire.