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Pantalonnade en WRC

Eurosport
ParEurosport

Publié 30/08/2008 à 18:15 GMT+2

Pour prendre Ford à son propre jeu, Citroën a eu recours samedi à un artifice soigneusement évité jusqu'à présent, en ralentissant Sébastien Loeb pour préserver ses chances de victoire. On connaît déjà le perdant dans cette histoire : le sport.

Allons directement au cœur du problème : la Fédération internationale de l'automobile (FIA) remanie plus ou moins discrètement pendant l'hiver des règlements dont les initiés comprennent immédiatement les sournoises finalités, portées à la connaissance du public une fois que les travers se manifestent.
En 2003, il y avait eu le barème "anti-Schumacher", resserré pour ne plus livrer un champion du monde de Formule 1 six épreuves avant le terme du championnat, comme en 2002. Pratiqué avec succès en 2004, un cru survolé par le "Baron rouge", le système de distribution de points (10-8-6-5-4-3-2-1 contre 10-6-4-3-2-1) avait été aussi rendu obligatoire en WRC, au cas où… Et rapidement, le dispositif ouvertement défendu par Max Mosley, président de la FIA, avait servi à rendre la domination de Sébastien Loeb moins écrasante en 2004, saison pliée avec 40 points d'avance sur le deuxième...
Ce garde-fou efficace et plutôt bien admis, l'inquiétude avait néanmoins gagné les coulisses du pouvoir et les promoteurs du WRC fin 2007, à l'heure de la retraite de Marcus Grönholm, seul contradicteur du Français de Citroën. A l'aube de 2008, nombre d'anciens champions et observateurs s'accordaient sur une domination à sens unique du plus grand rallymen de tous les temps, en route vers un cinquième titre face à une jeune concurrence venue de Ford. L'as alsacien allait invariablement tout dominer, du vendredi matin au dimanche soir, dans l'ennui le plus complet…
Dans ce contexte dominé par une peur pour l'intégrité du suspens, qui n'aurait pourtant été mis à mal qu'à travers une supériorité technique et sportive méritée, un détail du règlement avait alors changé : le rallyman classé 15e le vendredi soir n'ouvrirait plus les routes le samedi (devant le 14e, et ainsi de suite), cette charge revenant encore au leader de l'épreuve.
Immédiatement, le revirement avait été interprété comme une disposition "anti-Loeb" veillant à confiner le supposé ultra-dominateur Français à une sempiternelle corvée de balayage sur les épreuves "terre", pour laisser derrière lui un terrain nettoyé donc plus rapide... Immanquablement, il suffisait d'attendre pour assister aux dérives promises, la tentation étant de laisser à un concurrent (ou encore mieux un partenaire d'équipe) la première place le vendredi soir pour une poignée de secondes, facilement récupérables le samedi, journée d'attaque à outrance ; sachant qu'un confortable leadership le samedi soir résiste généralement à l'inconvénient d'une position de premier sur la route le dimanche, jour peu chargé en kilométrage.
L'équipe officielle Ford craqua donc une première fois avec succès en Jordanie, lorsque Malcolm Wilson demanda à ses pilotes, Mikko Hirvonen et Jari-Matti Latvala, de ralentir ostensiblement pour piéger Dani Sordo (Citroën), puis une seconde fois au détriment de Sébastien Loeb en Turquie. L'image embarquée de Latvala délibérément garé pendant quelques secondes apparut contraire à l'esprit du sport pour tous, sauf pour les vainqueurs. Mais le grand public -essentiel à la pérennité de la discipline- fût bien déçu par tant de réalisme.
Malheureusement, Citroën a dû aussi recourir à ce stratagème à l'image dévastatrice, samedi en Nouvelle-Zélande. Car le Double chevron avait fait ses comptes : Sébastien Loeb devait boucler la journée en tête avec 18 secondes de marge sur le meilleur pilote Ford pour espérer conserver un reliquat à l'arrivée. Le quadruple champion du monde s'aperçut que le compte n'y serait pas. "J'ai tout essayé jusqu'au milieu de la dernière spéciale pour creuser l'avance que je pensais nécessaire pour me permettre de balayer demain (dimanche), et je n'ai pas réussi. On a donc décidé de ralentir pour passer derrière (ndlr : Mikko Hirvonen) et avoir une meilleure route et espérer remonter", a expliqué Loeb, rentré 3e à 13.3 sec. "Toutes les années où l'ordre de départ a été inversé le deuxième jour (ndlr : le 15e classé le vendredi soir roule en premier), on n'a plus jamais parlé de tactique et tout le monde attaquait, et le but était d'aller le plus vite possible du début à la fin. Ça sera bien qu'on revienne à ça" , a-t-il conclu.
"Vous connaissez ma théorie sur cette règle : c'est un rallye qui balaye énormément, il faut quand même être pragmatique pour gagner, on va considérer qu'à regret on l'a utilisée" , a complété Olivier Quesnel, directeur de Citroën Sport, qui a taxé le règlement de "stupide".
Malheureusement, les effets de bord ne sont peut-être pas terminés. Ford WRT a en effet réagi en direct au ralentissement de Sébastien Loeb en demandant à Jari-Matti Latvala, alors 3e, de foncer. Le Finlandais accepta ainsi la première place, de façon à balayer à la place de son compatriote Mikko Hirvonen, dimanche. Hirvonen, qui se bat pour le titre contre Loeb, souffrira moins avec sa position de deuxième sur la route, mais il aura un léger handicap par rapport au pilote Citroën, qui n'a que 4.0 sec de retard sur lui. Loeb calquera sa course d'abord sur Hirvonen, a averti Quesnel, pour qui le championnat Pilotes "est une priorité". Le pilote et le dirigeant de Satory ont clairement prévenu que l'objectif était de devancer Hirvonen et qu'ils étaient prêts à laisser la victoire à Latvala, qui ferait donc un vainqueur de circonstances...
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