Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Les Warriors et les "super teams" : l'avenir dont la NBA ne veut pas

Maxime Dupuis

Mis à jour 25/10/2016 à 15:28 GMT+2

Cet été, Kevin Durant a pris la décision controversée de rejoindre les Golden State Warriors. En quittant OKC et en s'alliant à Stephen Curry et compagnie, l'ailier a créé une nouvelle "super team", deux ans après le démantèlement du Heat de Miami. Si cela fait le bonheur des fans des Warriors, cela ne plait guère à la NBA. Explications.

Durant, Curry et Green sous le maillot des Warriors

Crédit: AFP

Damian Lillard est devenu un oiseau rare. Un modèle… démodé. Pas par son basket qui est en parfaite adéquation avec son temps. Mais le numéro 0 des Blazers débite un discours qui détonne. Surtout en cette fin d'été 2016. Depuis un an et le départ de LaMarcus Aldridge à San Antonio, le meneur porte littéralement Portland sur ses épaules. Et compte bien poursuivre sur sa lancée. Lui ne se voit pas rejoindre une "super team" d'ici la fin de sa carrière. "Je ne ferai pas ça. Ce n'est pas moi, a-t-il récemment avoué. Je dois avoir trop de fierté ou être trop compétiteur…" Personne n'est cité. Mais Kevin Durant doit avoir les oreilles qui sifflent. Comme le début de l'été, me direz-vous. Car KD est l'homme qui cristallise toutes les conversations depuis qu'il a rejoint les Golden State Warriors pour 54 millions de dollars sur deux ans.
Sa décision de quitter Oklahoma City, sa franchise de toujours qui avait été à un cheveu de sortir la troupe de Steph Curry en playoffs (ndlr : le Thunder menait 3-1 en finale de conférence), a créé de sacrés remous de l'autre côté de l'Atlantique. Une réplique du tremblement de terre de 2010, quand LeBron James et Chris Bosh avaient rejoint Dwyane Wade à Miami pour disputer quatre finales NBA de suite et deux titres glanés au final (2012, 2013). A l'époque, Cleveland, comme le reste de la Ligue, avait mal vécu que LBJ "emmène ses talents à South Beach" pour y créer un monstre, véritable hydre à trois têtes que tout le monde rêvait de voir mordre la poussière.
picture

Golden State Warriors-Houston Rockets, Kevin Durant

Crédit: AFP

Golden State, 73 victoires au compteur la saison dernière (un record) et passé à une victoire d'un back-to-back, est aujourd'hui devenue une équipe que tout le monde a envie de voir tomber. Parce que Curry, Thompson, Green, c'était bien. Mais Durant, passé de joueur adulé à détesté, en plus, c'est trop. Et c'est contre la philosophie de la NBA.
Je ne pense pas que ce soit bon pour la Ligue
"Si tu ne peux pas les battre, rejoins-les" ressemble aujourd'hui un slogan officieux dont la NBA aimerait se débarrasser. Adam Silver, commissionnaire de la Ligue, ne s'en est pas caché. Quelques jours après la signature de Durant avec les Warriors, il avait d'ailleurs donné son avis sur la question lors de la Summer League de Las Vegas : "J'ai lu quelques articles suggérant que c'est ce que la Ligue veut, cette notion de 'super teams', que c'est très attractif pour les télévisions. Pour être tout à fait clair, je ne pense pas que ce soit bon pour la Ligue. Je ne ferai pas de prédiction sur la saison mais quand vous réunissez un groupe de grands joueurs dans une équipe, ils ont une plus grande chance de gagner que les autres." Et ça, c'est intolérable aux yeux du successeur de David Stern.
picture

Adam Silver

Crédit: AFP

La NBA n'est pas la Ligue des champions de football, où tout est fait pour qu'une petite élite truste le haut du panier. Non, l'ADN de la Ligue US est autre. La National Basketball Association se veut un championnat d'excellence mais nullement élitiste. Tout est fait pour que chacun ait sa chance ou, au moins ait l'impression de l'avoir, par la draft ou encore le salary cap. L'aléa sportif y a encore sa place et, pour Silver, une équipe comme les Warriors et son exceptionnelle armada met en péril ce postulat.
C'est comme si Bird avait décidé de jouer avec Magic
Dwyane Wade, qui a rejoint Chicago mais fut un membre éminent de la "super team" la plus aboutie de l'histoire, n'est pas sur la même longueur d'ondes que le grand manitou. Pour l'arrière des Bulls, le Heat de 2010-2014 comme les Warriors de 2016 sont une bénédiction pour la NBA. "Je pense que c'est une bonne chose. Et à l'arrivée, que vous aimiez ou non le Heat, vous allumiez la télévision pour regarder nos matches, non ? Même chose avec Golden State. Que vous aimiez ce qui est arrivé avec Kevin Durant ou non, vous regarderez leurs matches. Pour les voir réussir ou échouer." L'argument est imparable. Paul Pierce, qui a fini par évoluer dans un Big Three constitué à coups de trades à Boston, ne voit lui pas cette affaire sous un angle aussi favorable. "Je dois être old school mais quand tu veux être le meilleur, tu dois battre les meilleurs. (…) C'est comme si Bird avait décidé de jouer avec Magic ou quelque chose comme ça".
On ne mettra personne d'accord sur le sujet mais, une chose est certaine, la NBA n'a aujourd'hui pas les armes pour lutter contre ce type de construction superficielle. David Stern l'a bien fait arbitrairement en 2011 quand il avait refusé le trade de Chris Paul de New Orleans vers les Lakers. Par souci d'équité sportive… Contre la free agency, en revanche, difficile de s'opposer. Les joueurs sont libres de s'engager où ils le souhaitent. Et de s'associer aux meilleurs joueurs de la Ligue pour constituer les "super teams" que le board de la NBA abhorre.
A terme, existe-t-il une solution pour lutter contre ce phénomène ? Oui. Elles sont même plusieurs. L'une d'entre elles est même défendue par des voix qui s'élèvent aux Etats-Unis pour que la notion de contrat maximum soit abandonnée dans une future convention collective - pas la prochaine, actuellement en discussion - et que chaque franchise puisse payer les stars comme elles l'entendent, dans la limite du salary cap, garant d'une forme d'équité. Aujourd'hui, un joueur expérimenté ne peut pas toucher plus de 35% de la masse salariale totale. Demain, avec une telle réforme, il n'y aurait pas de limite. Et ça changerait beaucoup de choses.

L'or ou l'argent ?

Pour faire simple : Cleveland aurait droit de donner 50 millions à LeBron James par an si les Cavs l'entendent de cette oreille. La superstar absorberait alors plus de la moitié du plafond salarial actuel (94 millions de dollars). Et cela forcerait les autres stars à aller voir ailleurs pour toucher le jackpot. Prenez Kyrie Irving, meneur de jeu des Cavs. Si une franchise était prête - et autorisée - à mettre 40 millions sur son nom, le joueur ne resterait sans doute pas à Cleveland et cela rééquilibrerait les forces de la Ligue.
En 2010, si LBJ avait eu le choix entre rejoindre Miami au prix d'un petit effort financier pour s'allier à Wade et Bosh (ndlr : 15 millions en moyenne par an) ou resigner avec les Cavaliers pour une somme astronomique, le choix entre l'or d'un titre NBA et l'argent d'un contrat XXL eut été cornélien. Il est plus simple de s'asseoir sur 1 ou 2 millions de dollars que sur 20 ou 30. Si LBJ était payé à sa juste valeur, qui va bien au-delà de ce qu'il gagne aujourd'hui, il ne serait pas aussi bien accompagné. Pareil pour Durant qui aurait probablement passé d'autres nuits blanches avant d'annoncer son départ pour la baie de San Francisco. Et Adam Silver ne s’en porterait pas plus mal.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Partager cet article
Publicité
Publicité