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Tantième, dernier français à avoir réalisé le doublé dans l'Arc.

Allison Nicolleau

Mis à jour 04/10/2014 à 04:43 GMT+2

Plus que samedi à passer, et ce sera le grand jour. Autant l'an dernier à la même époque on aurait parié notre maison sur le doublé de Trêve, autant aujourd'hui cela s'avère plus compliqué. Mais Christiane et son père Alec Head l'annoncent prête à defoncer l'adversité. Alors Trêve, t'es d'attaque pour remplir une nouvelle page de l'Histoire ?

Trêve, après Tantième pour une nouvelle page de l'Histoire ? On en rêverait.

Crédit: Panoramic

Certes, Tantième n'est pas le dernier à avoir remporté deux fois le Prix de l'Arc de Triomphe, mais Ribot et Alleged étant étrangers, le doublé français n'a pas été réalisé depuis les victoires de 1950 et 1951 du fils de Deux-pour-cent. Tantième, beau poulain caractériel, propulsait l'élevage de son propriétaire François Dupré, acquéreur du Haras d'Ouilly en 1930 mais aussi la carrière de son mentor François Mathet à qui il apportait ses premières gloires. De ses deux ans jusqu'à son retrait à quatre ans, Tantième a disputé quinze compétitions officielles, en France et en Angleterre, remportant douze épreuves, n'échouant réellement qu'à une seule reprise, et avec des excuses. Il est le seul cheval de l'Histoire à avoir été officiellement considéré comme le meilleur de sa génération, à deux, trois et quatre ans. Un rêve de longévité. Retiré des courses après son second sacre à Longchamp, il deviendra étalon pour sa célèbre casaque rose et grise, et explosera les compteurs de nouveau. Top étalon en 1962 et 1965, il produira entre autres le célèbre Reliance qui ne put jamais approcher Sea Bird dans un Arc d'anthologie mais qui aura marqué de son empreinte le Prix du Jockey-Club dont il vengeait son père, le Grand Prix de Paris et le Prix Royal Oak, le voyageur Match II victorieux au plus haut niveau en France, en Angleterre et aux Etats-Unis ainsi que La Sega qui elle aussi s'avérait classique puisque lauréate du Prix de Diane après avoir remporté la Poule.
Tantième, né dans les prairies du Haras d'Ouilly, débutait sa carrière sur le court parcours de 900 m du Prix des Villarmains le 09 juillet 1949 sur la piste verte de Saint-Cloud se révélant d'emblée le plus fort. Pour sa seconde sortie, le 31 du même mois, le jeune poulain bai s'annonçait dans le Prix Robert Papin disputé sur les rapides 1200 m de la ligne droite de Maisons-Laffite. Emperor prenait la suite de Coronation au palmarès de l'épreuve, notre jeune ami ne parvenait à saisir que la sixième place, excusée par son état maladif du lendemain. Ce sera sa seule grosse défaite. Profitant de la trêve estivale, le poulain se ressourça à l'écurie et revint plus fort encore pour la rentrée automnale de Longchamp, la piste reine dont il se révélera friand. Le 11 septembre, Tantième remportait confortablement le Prix de Villiers sur 1400 m, et enchainait avec le Grand Critérium du 09 octobre qui le propulsait parmi les meilleurs deux ans, lui apportant un chèque garni de 4,3 millions de francs. Il faisait preuve ce grand jour d'une formidable ténacité, parvenant à conserver une tête sur le poteau face à Ksarinor qui remportait le Prix Morny pendant l'été, L'Amiral saisissant la troisième place. L'année allait à sa fin, il ne restait plus qu'un engagement au protégé de François Mathet : le Prix de la Forêt l'avant-dernier jour d'Octobre 1949. De retour sur plus court, Tantième ne faisait qu'une bouchée du réputé rapide et encore invaincu Cardanil, battant même ses aînés, et achevait son année sur une quatrième victoire en cinq sorties.

A l'âge de trois ans, le 23 avril de l'année 1950, Tantième effectuait sa rentrée dans le Prix de Sèvres à Longchamp. L'épreuve ne réunissait que quatre partants sur le Mile, le poulain les relégua au rang de simples figurants, ralliant le poteau à grande allure, séduisant d'aisance. Roger Poincelet, qui se partagera la monte avec Jacques Doyasbère, avait l'honneur de le mener à la victoire, bien loin devant son compagnon de couleurs Le Vesuve, Idaho et Assez Sur. Les 1600 m furent parcourus en le joli temps de 1'40'14/100 min. Préparé pour les grandes joutes, le poulain de François Dupré fut au départ ( encore lancé à l'élastique ) de la convoité Poule d'Essai des Poulains. Le 14 mai, toujours sur le Mile, il s'annonçait face à Galcador, Ksarinor, Totty, Le Vésuve et Suzerain qu'il devança dans cet ordre. Le Vésuve, lièvre de son compagnon de casaque, prenait la tête du maigre peloton et apportait un bon rythme à l'épreuve avant de s'effacer au bon moment. Suzerain restait au poteau, refusant le départ. Tantième et son futur rival Galcador patientaient en queue du peloton, en retrait léger de la concurrence. Lorsque se dessina la ligne droite, Ksarinor et Totty accélérèrent et se défièrent l'un contre l'autre. Le premier nommé parvenait à terme à devancer son adversaire, mais bien loin derrière Tantième et Galcador qui n'avaient mis que quelques secondes pour les avaler et qui s'étaient prêtés merveilleusement au jeu du duel, notre champion abandonnant un nez sur quelques mètres avant de mettre une bonne demi-longueur entre lui et son pugnace concurrent. Roger Poincelet montrait ce jour-là au public l'accélération foudroyante que son poulain possédait, la course se bouclant en 1'39'40/100 min. Galcador, envoyé sur les 2400 m d'Epsom, s'adjugeait le derby pour la casaque mythique de Marcel Boussac, d'une légère avance sur Prince Simon, Vieux Manoir, resté dans les mémoires, ne pouvait faire mieux que huitième. Quatorze jours plus tard, Tantième revenait à Longchamp pour le Prix Lupin sur 2100 m. Le rallongement de la distance ne l'inquiétait pas puisqu'il remportait l'épreuve, mais l'écart d'une longueur et demi ne rassurait pas le public qui s'attendait à le voir insolent. Lacaduv et Damasco, bien que victorieux des prix Noailles et Daru, dans le sillage du vainqueur, n'avaient en effet pas l'honneur d'être aussi considérés. Heureusement, Galcador pointait du doigt la Poule d'Essai des Poulains en passant sa jolie tête sur le disque final de l'incomparable épreuve d'Epsom, et Tantième était propulsé favori du Prix du Jockey-Club. On lui confrontait au guichet des paris le gagnant du Prix Greffulhe Scratch et quelques uns de ses précédents concurrents, Wild Mec, lauréat du Grand Prix de Bruxelles, se déclarant de la fête. La grande course de Chantilly se vit menée par Isoclès à la corde et Lacaduv contre ses flancs. Tantième, logé au sein du paquet par Roger Poincelet, patientait comme à son habitude. La ligne droite touchant sur sa fin, Lacaduv semblait parti pour la gloire. Mais Scratch, lancé à la corde, et Tantième pleine piste ne s'étaient pas découragés. Pulvérisant le pauvre Lacaduv, les deux poulains se retrouvèrent nez contre nez sur une poignée de mètres, le poteau cantilien arrivant dans la foulée. Officiellement, et parce que la photo finale n'existait pas encore, le commissaire annonça avoir vu de ses yeux le poulain Scratch mettre son nez devant opportunément. Le public présent, et surtout Roger Poincelet n'étaient pas de cet avis. Le cavalier éclata sa colère contre William Johnstone, jockey vainqueur, à sa rentrée aux balances, écopant d'une amende de 25 000 francs. Impossible de rétablir la vérité, cette page du Jockey-Club se voit à jamais entachée par le doute. La revanche de l'homme ne se fera pas attendre. Le 8 juillet à Ascot, Tantième disputa les Queen Elizabeth Stakes sur 2400 m, distance identique à l'épreuve de Chantilly. Annonçant un excédent de caractère lors du défilé, le poulain s'en servit sur la piste anglaise pour prendre la mesure sur son aînée et mémorable championne Coronation, pilotée par William Johnstone. Atteignant le poteau en 2'36'3/5 min, le représentant de la casaque rose et grise pointa toute la ligne droite la fuyarde Coronation qui avait audacieusement menée toute la course. L'effort dura quatre-cent mètres mais il fut des plus intenses. La jument, lauréate du Prix de l'Arc de Triomphe en 1949, ne lui permit qu'un nez au final, lui demandant de ne rien lâcher. C'est tout en souplesse que Tantième poursuivit sa moisson de victoire dans le Prix de l'Arc de Triomphe dont il se voyait pour la première fois participant. Le poulain bai, compliqué avant course, supporta le défilé imposé qui le contraignit à frôler les mains tendues du peuple amoureux. Monté pour la première fois par Jacques Doyasbère qui remplaçait un Roger Poincelet retenu par son contrat de monte avec L'Amiral, Tantième se décala de la corde dès l'entrée de la ligne droite, et n'eut plus qu'à rejoindre Alizier qui avait tenté de s'échapper. L'écart n'est pas conséquent, mais la souplesse de l'action en dit long sur ses capacités.
A quatre ans, Tantième est de retour. Il remporte facilement et de loin le Prix Ganay pour sa rentrée, Ascot lui ouvre de nouveau ses bras pour un succès plus compliqué dans la Coronation Cup, le cheval, forcé de prendre la tête d'un maigre peloton, ne devançant à terme que d'une petite longueur un concurrent bien en dessous de lui. 1951 fut l'année de l'inauguration des "King George" qui remplaçait les Queen Elizabeth qu'il avait fait siennes l'année passée. La victoire ne fut pas au rendez-vous, Supreme Court l'inattendu et Zucchero se consacrant l'un à l'autre à un mano à mano sans merci, mais Tantième loin derrière parvenait à ajuster tardivement le reste de la mêlée. Une nouvelle fois, le cheval a ses raisons : le voyage par avion qui lui fut imposé le matin même, le poulain ne supportant pas de découcher de l'écurie, ne mit pas le cheval dans son assiette. Il se fit pardonner à Longchamp au début du mois d'octobre 1951. Devant une foule record, Tantième prenait la tête à mi-ligne droite et s'envolait avec la souplesse qu'on lui connait. De quelques longueurs, relâché, le poulain et son cavalier Jacques Doyasbère devançaient Nuccio, Le Tyrol et seize autres concurrents, leur plus proche poursuivant leur succédant au palmarès de l'épreuve l'année suivante. Agité lors de sa rentrée aux balances, marchant tel un seigneur, Tantième fut adulé par la foule et entouré par sa famille de couleur. Attentif, sur le sang, le poulain se retirait sur un rarissime doublé dans la plus grande épreuve du monde, et se consacrait aussitôt à sa carrière de reproducteur que l'on sait devenue précieuse...
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