Roy fait son show

La belle semaine du cyclisme français se poursuit. Dans la lignée d'un début de saison prometteur, les premières grosses courses de l'année confirment le retour au premier plan des coureurs tricolores. Après les victoires de Sylvain Chavanel mardi et de Julien El Farès sur Tirreno mercredi, Jérémy Roy a prolongé l'euphorie en remportant la 5e étape de Paris-Nice jeudi à Vallon-Pont-d'Arc. A 25 ans, le jeune coureur de l'équipe Française des Jeux s'offre la première victoire de sa carrière. Pas une victoire au rabais, assurément.

Jérémy Roy ne l'a pas volée. C'est lui qui a été à l'origine de la bonne échappée du jour. Dès les premières rampes du Juvenet, la première des sept difficultés de ce 5e acte à travers l'Ardèche, il est sorti en compagnie de Thomas Voeckler (Bbox Bouygues Telecom) et Tony Martin (Columbia). Un trio intéressant, qui allait prendre jusqu'à sept minutes de marge sur le peloton. Mais en haut de l'ultime ascension du jour, le col de la Benas, répertorié en première catégorie, l'affaire se présentant plutôt mal. Certes, leur avance demeurait conséquente (6'30" au sommet), mais les sprinters étaient encore tous là.

D'où l'inquiétude de Marc Madiot. Sur l'antenne d'Europsport, le manager de la formation au Trèfle à 4 feuilles affichait son scepticisme quant aux chances du groupe d'aller au bout: " D'abord, il y a un garçon comme Voeckler qui n'est pas si loin au général et à qui on ne veut pas laisser prendre trop de marge. Surtout, les équipes de sprinters veulent faire en sorte qu'il y ait une arrivée groupée. C'est sans doute leur dernière occasion d'ici l'arrivée à Nice dimanche. La course a été figée rapidement, et les ascensions se sont faites sur un tempo peu élevé, qui a convenu aux non-grimpeurs."

Dans un premier temps, son analyse a semblé juste, quant, à 50 kilomètres de l'arrivée, l'écart a fondu autour des cinq minutes. Heureusement pour lui, Marc Madiot allait se tromper. Brutalement, les équipes de sprinters, Cervelo et Lampre notamment, ont décidé de se relever, laissant la charge de la poursuite aux seuls Quick Step. L'équipe belge s'est dès lors contentée d'assurer un rythme suffisant pour protéger le maillot jaune de Sylvain Chavanel, qui possédait 3'59" de marge sur Thomas Voeckler, le mieux placé au général parmi les trois échappés. Sans souci, Chavanel a donc gardé son maillot une journée de plus, avant la grande explciation de vendredi.

La victoire allait donc se jouer entre les trois fuyards. A tour de rôle, Tony Martin et Thomas Voeckler ont attaqué, mais ces deux-là se marquaient de beaucoup trop près. A l'évidence, l'Allemand craignait l'Alsacien, et réciproquement. Jérémy Roy l'a bien compris. Son contre, à sept bornes de l'arrivée, a fait mouche. Ses deux anciens complices se sont regardé deux kilomètres en chiens de faïence. Ils l'ont payé, en ne parvenant jamais à combler les derniers mètres qui les séparaient de Roy. Deuxième de l'étape de Montluçon l'année dernière sur le Tour de France, il avait été réglé au sprint par Sylvain Chavanel. Il a bien retenu cette douloureuse leçon.

Incroyable journée pour le Tourangeau, qui était à l'agonie depuis deux jours. "C'est dingue, raconte-t-il. La veille, j'étais largué, j'ai fini dernier à Saint-Etienne mais je me suis accroché en pensant à la suite. Finalement, ce matin, je me sentais bien, j'ai attaqué dans le premier col." Il n'était peut-être pas le plus fort du trio, mais il a été le plus malin, le plus opportuniste. En cyclisme, c'est parfois aussi important.