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La formation, ce domaine où Lille rivalise encore avec le PSG

Ilyes Ramdani

Mis à jour 23/04/2016 à 01:09 GMT+2

COUPE DE LA LIGUE - Le PSG et Lille, qui s'affrontent samedi en finale (21h), n'évoluent plus vraiment dans la même cour. Dans les catégories de jeunes, pourtant, les deux clubs sont des références qui se livrent une rivalité coriace. A bien des égards, la formation lilloise a même des atouts que ne présente pas celle du PSG. A commencer par les opportunités offertes aux jeunes joueurs...

Benjamin Pavard (LOSC) et Jean-Kevin Augustin (PSG) deux joueurs formés par leur club

Crédit: Panoramic

Dimanche 10 avril au domaine de Luchin. Les U19 du LOSC reçoivent ceux du Paris Saint-Germain pour le compte de la 23e journée du championnat national. Score final : 2-0 pour les Dogues. Leurs aînés signeraient des deux mains pour un tel résultat, samedi sur la pelouse du stade de France. Mais ils savent pertinemment qu'un monde sépare les deux clubs, qui ne jouent plus dans la même cour. Sauf dans un domaine : la formation.
Ces deux dernières saisons, les U19 lillois ont fini à la première place du groupe Nord, devant le PSG. Cette année encore, les deux équipes bataillent pour le titre, figurant toutes deux dans le top 5 avec un match en moins au compteur. Dans les compétitions de jeunes, Lille et Paris sont deux institutions qui se respectent et se livrent une concurrence acharnée. Loin des écarts monstrueux créé par l'ogre parisien en Ligue 1, le club nordiste n'a pas à rougir de ses atouts face à son rival.
"La formation est le cœur même du projet lillois, nous explique Luc Dayan, administrateur puis président du club entre 1999 et 2004. C'est l'ADN du LOSC." De fait, les résultats confirment ses dires. Lille s'est construit, en quinze ans, une réputation de club formateur sérieux et ambitieux. A tel point qu'il s'est vu décerner la palme du deuxième centre de formation la plus rentable d'Europe (derrière Southampton), selon une étude du Centre d'études des Sports (CIES) publiée en mars 2015.

Le titre de 2011 a validé le projet

De fait, les joueurs passés professionnels à Lille depuis 2000 sont nombreux, et internationaux pour beaucoup : Eden Hazard, Yohan Cabaye, Mathieu Debuchy, Kevin Mirallas, Divock Origi, Lucas Digne… Sans compter ceux qui en sont partis prématurément, comme Franck Ribéry (qui y a fait toute sa préformation) ou Nabil Bentaleb, aujourd'hui à Tottenham. En tout, le LOSC a fait signer un premier contrat professionnel à plus de 90 joueurs de son centre de formation depuis 1990.
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FOOTBALL 2012 Lille - Hazard

Crédit: AFP

Numéro 2 du club de 2009 à 2015, Frédéric Paquet a dirigé, dès 2004, l'association qui gérait le centre de formation. "Aujourd'hui, les clubs n'ont pas le choix. Ils doivent former et Lille l'a compris depuis longtemps, nous expose-t-il. Résultat, Lille est une équipe compétitive de Ligue 1, quasiment jamais menacée par la relégation, et qui a même fini champion de France en 2011 avec 50% de joueurs formés au club." Dans l'effectif de l'époque, plusieurs joueurs étaient en effet issus de la formation nordiste : Mathieu Debuchy, Eden Hazard, Idrissa Gueye, Lucas Digne…
Mais aujourd'hui, avec les sommes colossales investies par le PSG pour son centre de formation, le LOSC peut-il toujours rivaliser ? "Pour moi, Lille forme mieux que Paris, tranche Himed Hamma, entraîneur des U19 de Sannois-Saint-Gratien, qui a affronté les deux équipes en championnat. Le club vit de la formation, donc ils ont cultivé ce savoir-faire, et ça fonctionne. A Paris, la formation n'a jamais été dans l'ADN du club. Ils le font avant tout parce que le fair-play financier de l'UEFA les y oblige."

Lille, une école du collectif et de la mise en avant des jeunes

Ce jour-là à Luchin, comme lors de tous les affrontements - souvent disputés - entre jeunes parisiens et jeunes lillois, des similitudes apparaissent pourtant. "Ce sont deux équipes qui tentent de jouer au ballon, qui ont une philosophie de jeu", juge l'entraîneur francilien. Même proximité au classement : en U17, le PSG est premier et le LOSC deuxième, tandis que cinq petits points les séparent en U19.
Entre deux équipes qui s'accrochent, les différences d'approche de formation sont pourtant nombreuses. "Lille mise plus sur le collectif, Paris plutôt sur le talent et la puissance de ses individualités, note Himed Hamma, qui soulève un autre point de divergence. Le PSG est plus porté sur les résultats, tandis que Lille insiste vraiment sur la formation. Ils n'hésitent pas à lancer des très jeunes, quitte à laisser filer des points et des titres. Contre mon équipe, le PSG a fait jouer plus de U19 "deuxième année" que moi. A l'inverse, Lille avait même des joueurs U17 titulaires lorsqu'ils sont venus chez nous."
Une prise de risques qui doit servir à renforcer l'équipe première, saison après saison. "Si vous ne faites pas jouer vos jeunes, votre formation est caduque, assure Frédéric Paquet, l'ancien directeur général du LOSC. C'est ce que vit en partie le PSG. Après le titre de 2011, nous avons aussi construit une équipe faite de joueurs expérimentés, et nous avons laissé moins de place aux jeunes. Mais ça n'a pas duré longtemps et Michel Seydoux est vite revenu à ses fondamentaux."

Les jeunes ne vont pas toujours chez le plus gros

Aujourd'hui, les produits du domaine de Luchin ne sont pas seulement internationaux, titulaires à Chelsea ou au Bayern Munich. Ils évoluent aussi à Lille, sous les ordres de Frédéric Antonetti. Benjamin Pavard, à peine 20 ans, a joué 13 matches de Ligue 1 cette saison et s'est imposé en équipe de France Espoirs. Arrivé dans le Nord à 15 ans, Adama Soumaoro est un titulaire du onze lillois. Et les prochains tapent à la porte, comme le prometteur Alexis Araujo (19 ans), actuellement prêté à Boulogne-sur-Mer.
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Araujo et Soumaoro (Lille)

Crédit: AFP

Le résultat d'une méthode bien rôdée, fondée sur un recrutement efficace et une formation technique de haut-niveau. "L'objectif, c'est de se tromper le moins possible sur le recrutement des jeunes joueurs, détaille Paquet. Pour cela, nous avions entrepris de prendre les garçons plus tard que d'autres, souvent après 15 ans." A l'inverse, le PSG "prend les joueurs de plus en plus jeunes, met des milliers d'euros sur des enfants, quitte à se planter ensuite", dixit Hamma. A Lille, priorité est mise sur le bassin nordiste et la Belgique… même si les recruteurs des Dogues ne s'interdisent pas quelques excursions en région capitale.
Reste à savoir si le LOSC peut conserver une quelconque attractivité face à l'ogre parisien. "Oui, et mille fois oui, répond Himed Hamma. Demain, si un jeune hésite entre le PSG et Lille, je lui conseillerais de signer à Lille sans hésiter. Comme n'importe quel éducateur de la région parisienne." La faute à un plafond de verre encore prégnant entre la formation parisienne et son équipe première, l'exemple Rabiot étant encore perçu comme une exception. "Le PSG est un club spectacle, confirme Dayan. Il y est beaucoup plus difficile d'intégrer des jeunes issus de son centre."
De son côté, Lille compte consolider les relations entre sa formation et son équipe première. "Aujourd'hui, le budget du club est moins dépendant de la Ligue des champions, tel que l'a voulu Michel Seydoux. Il y a donc plus de place faite aux jeunes joueurs", affirme Paquet. Avec un modèle économique qui repose sur la vente, chaque année, d'un ou deux jeunes joueurs à fort potentiel "pour 20 à 30 millions d'euros" (dixit Dayan). Un cercle vertueux qui devrait permettre au LOSC de rivaliser, encore quelques temps, avec le Paris Saint-Germain chez les jeunes… et au-delà ?
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