Ligue 1 (30e journée) - Lens-Marseille (21h00) : Pourquoi Bielsa fascine les acteurs du championnat

La scène se déroule après la défaite de Metz face à l'OM le 7 décembre dernier. Battus 3-1, les joueurs d'Albert Cartier regagnent un à un leur bus, garé dans les entrailles du stade Vélodrome. Têtes basses, ils ne s'arrêtent pas devant les micros et les caméras qui se tendent pour recueillir leurs déclarations d'après-match. Un joueur prend pourtant le contre-pied de ses coéquipiers. José Luis Palomino ne se rend pas directement au véhicule qui attend son équipe. Il fait un crochet... par la salle de conférence de presse. Surprenant l'assistance, il s'accoude au mur pour tendre l'oreille. Le défenseur argentin du FC Metz n'est pas là pour entendre l'analyse de son entraîneur mais celle de son adversaire.

Reconnaissant l'accent de Marcelo Bielsa, le jeune joueur va religieusement écouter le discours de son compatriote. Hochant la tête à plusieurs reprises comme pour valider les propos du coach de l'OM, Palomino va écouter pratiquement l'ensemble des réponses d'El Loco. Pendant près d'un quart d'heure, il ne quittera pas des yeux Bielsa. Et il faudra l'intervention d'un membre du staff lorrain pour que le joueur regagne finalement ses pénates. Cette attraction pour l'entraîneur de l'OM s'est propagée cette saison à beaucoup d'acteurs de la Ligue 1. Comme si l'ancien sélectionneur de l'Argentine exerçait une sorte de fascination pour nombre de joueurs mais aussi d'entraîneurs en L1.

Adversaire de l'OM dimanche (21h00), Lens a aussi les yeux de Chimène pour Bielsa. "Je l'adore, s'empresse de dire Ahmed Kantari lorsqu'on lui demande son avis sur les Marseillais. Je trouve que c'est un entraîneur qui est direct dans sa communication, qui ne fait pas de langue de bois. Le fait d'annoncer sa composition d'équipe trois jours avant le match, c'est quand même quelque chose d'assez énorme. Et puis il y a la personnalité de ce coach. Il m'a l'air un peu fou mais il représente vraiment Marseille..." Cette identification entre la brûlante ville olympienne et son coach très charismatique a fait le tour de la Ligue 1. Comme si El Loco déteignait sur l'OM. Ou l'inverse...

Reflet d'une cité passionnée par le football, Marcelo Bielsa sait aussi renvoyer l'image du grand sage. A 59 ans, son expérience lui permet de garder la tête froide quand l'atmosphère se fait parfois suffocante. A l'issue du match nul face à Lyon (0-0), il fut le seul à défendre l'idée d'un arbitrage impartial alors que tous ses joueurs criaient haut et fort à l'injustice devant le but refusé à Lucas Ocampos par M. Bastien. Cette attitude de respect du corps arbitral a été saluée par ses collègues entraîneurs. Mais si Bielsa impressionne autant ses interlocuteurs, c'est aussi parce qu'il baisse le regard mais pas le verbe quand il s'agit de monter au front pour critiquer les travers du football moderne.

Vendredi, l'entraîneur marseillais a placé Jean-Michel Aulas dans son viseur. JMA a subi les foudres de l'Argentin même si Bielsa a pris soin de ne pas l'associer directement à sa diatribe. "Je n'ai pas une opinion sur le président de Lyon car je n'ai jamais lu ses déclarations, explique le coach de l'OM à propos d'éventuelles approches concernant Gignac, que l'OL viserait pour la saison prochaine. Mais quand un journaliste me parle de déstabilisation, j'ai envie de dire que celui qui agit comme cela est un poison pour le football. Et il ne doit pas être décrit comme malicieux mais comme quelqu'un de dangereux pour le foot." Cette sortie prouve que Vincent Labrune n'est pas le seul président de Ligue 1 que Marcelo Bielsa peut critiquer...

Admiré pour sa tactique, sa façon toujours offensive d'aborder le football et son analyse du jeu de l'adversaire, Marcelo Bielsa impressionne aussi par sa faculté d'agir comme un homme libre. Son discours porte car il touche tous les acteurs de la Ligue 1. Joueurs, arbitres, entraîneurs et dirigeants : tout le monde prête l'oreille à ce que dit l'entraîneur marseillais. Et même s'il ne poursuit pas l'aventure avec l'OM à l'issue de la saison, El Loco aura déjà laissé une trace indélébile au sein du championnat de France.