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Ligue 1 - Comment redonner vie au Parc : un vrai chantier pour le PSG

Geoffrey Steines

Mis à jour 14/10/2015 à 18:42 GMT+2

LIGUE 1 - Depuis la mise en œuvre en 2010 d’un plan Leproux pérennisé par les propriétaires qataris du PSG, le Parc des Princes s’est métamorphosé. L’atmosphère y est plus sereine qu’à l’époque du conflit ouvert qui minait les virages, mais l’ambiance reste bien terne les soirs de match. Et si dans un futur proche, les conditions étaient réunies pour que l’un n’aille pas forcément sans l’autre ?

Le Parc des Princes lors de PSG-OM le 4 octobre 2015

Crédit: Panoramic

"Et il est mort le Parc des Princes !" Ce refrain, il est devenu commun de l’entendre, à Paris ou ailleurs, comme à Nantes fin septembre. Il faut dire qu’en l’espace de cinq ans, l’antre du PSG, qui figurait parmi les plus bouillants de France les soirs de match, s’est métamorphosé. Exit les Ultras, leurs chants, leurs tifos colorés et leurs excès parfois impardonnables. Le public qui garnit aujourd’hui les tribunes du Parc est plus familial, moins supporter dans l’âme et davantage consommateur, sur son siège ou à la boutique officielle. Mais y a-t-il une vie après la mort ? Le PSG et son stade pourraient-ils faire cohabiter à moyen terme ces deux publics qui sont partie intégrante de son histoire désormais ? Nous avons enquêté pour le savoir.

Le plan Leproux, des mesures transitoires devenues règles

Tout d’abord, que les choses soient claires : "une page a été tournée et il n’y aura pas de retour en arrière", assure-t-on avec conviction au PSG. Impossible d’envisager que les associations de supporters qui tenaient les virages du Parc avant 2010 ne reviennent aux affaires. Cela sonne comme une évidence, même pour les principaux intéressés. "On n’est plus l’avenir du Parc", reconnait Christophe Uldry, ancien président des Supras Auteuil, l’un des groupes majeurs du virage du même nom.
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Christophe Uldry en 2010

Crédit: AFP

C’est d’ailleurs en bas de "sa" tribune que le point de non-retour a été atteint. Après des mois de montée en tension entre les virages Boulogne et Auteuil, nourrissant un antagonisme où la politique s’était invitée, le contexte sulfureux avait mené à un drame, qui s’est produit le 28 février 2010. Avant PSG-OM, Yann Lorence fut passé à tabac à quelques mètres du Parc et est décédé trois semaines plus tard, des suites de ses blessures. Ce deuxième mort aux abords du stade en l’espace de 30 mois, après Julien Quemener en octobre 2006, avait contraint Robin Leproux à agir. Celui qui dirigeait alors le PSG a mis en place le plan qui porte son nom.
Sous la pression des pouvoirs publics, il a tranché dans le vif. Fin des abonnements en virage, placement aléatoire, impossibilité de monter une association de supporters : telles étaient les mesures majeures prises par Leproux. A l’époque, de l’aveu même de son instigateur, le plan devait être transitoire. Mais seule la première n’est aujourd’hui plus en vigueur. Ainsi en a décidé Qatar Sports Investments, qui a racheté le club de la capitale en 2011, un an seulement après l’instauration du plan Leproux. Ce qui ne devait être qu’"un plan d’urgence en réponse à une situation d’urgence", comme l’explique Nicolas Hourcade, sociologue spécialiste des publics du football, a alors été pérennisé, voire même renforcé, par les propriétaires qataris.
C’est une erreur stratégique des Qataris de se passer d’un public fervent
Le PSG y a depuis trouvé son équilibre. "Il y a des stars sur le terrain et le club veut le public haut de gamme qui va avec, indique Nicolas Hourcade. C’est une stratégie marketing. On est entre le modèle anglais, avec la tolérance zéro et l’augmentation drastique des tarifs (le prix des abonnements a plus que triplé en virage par rapport à la saison 2009-2010, ndlr), et un modèle américain, où le club organise les animations en tribunes." Les dirigeants parisiens ont, par exemple, engagé une société pour jouer du tambour dans les virages. "C'est ridicule", moque James, porte-parole de l’ADAJIS (Association de Défense et d’Assistance Juridique des Intérêts des Supporters) et lui-même fan du PSG.
Pour lui, comme pour d’autres, cela ne suffit pas à créer l’illusion. L’encéphalogramme reste désespérément plat pendant les matches. Et si les joueurs ne s’en émeuvent pas publiquement, la demande de soutien explicitement formulée par David Luiz aux spectateurs lors de PSG-Caen en février dernier vaut tous les discours. "C’est une erreur stratégique des Qataris de se passer d’un public fervent, estime Christophe Uldry. Il y a un PSG-Real Madrid qui arrive. Je suis convaincu que le public a joué un rôle dans celui de 1993 (victoire 4-1 en quart de finale retour de la Coupe UEFA et but de la qualification inscrit à la 90e+7, ndlr). Sans lui, il n’est pas évident que le match se passe comme ça."
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David Luiz lors de PSG-Caen (saison 2014-2015)

Crédit: AFP

Le PSG attend de trouver "la recette miracle"

Le club ne se leurre d’ailleurs pas. "Personne au PSG ne nie que l’atmosphère au Parc est moins chaude, qu’elle donne moins la chair de poule", nous souffle une source interne. Mais tous les dirigeants ne sont pas ouverts à la discussion. C’est ce que nous certifie James, qui avant d'être le porte-parole de l'ADAJIS était celui de Liberté pour les Abonnés (LPA), association créée après la mise en œuvre du plan Leproux pour essayer de maintenir un semblant de dialogue avec la direction. LPA s'est heurtée à un mur et s'est auto-dissoute. "Le directeur de la sécurité (Jean-Philippe d'Hallivillée, ndlr) ne souhaite pas s'asseoir autour d'une table avec nous, regrette James. Mais cette position ne fait pas l'unanimité. Certains dirigeants réfléchissent à la façon de réintégrer les supporters dans la vie du club."
Parce que oui, même si l’état-major du triple champion de France en titre avance à pas feutrés sur la question, assurant qu’il est impossible de faire "table rase du lourd passé", il ouvre néanmoins une porte : "il y a une réflexion pour faire monter la ferveur". Une hypothèse qui n’aurait même pas été envisagée voilà deux ans, assure-t-on en interne. "Le plus dur semble derrière nous, mais nous ne voulons pas faire n’importe quoi". Sans être une priorité, le sujet est régulièrement abordé chez les dirigeants. "Nous sommes à l’écoute de solutions, sans faire d’imprudence pour autant, lance-t-on au club. La priorité absolue est et restera la sécurité des spectateurs."
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Une des entrées du Parc des Princes, en 2013

Crédit: Panoramic

D’autant que les dirigeants n’ont pas de raison de se plaindre du public qui occupe son stade actuellement. Aucun incident ne s’est produit au Parc ou à ses abords depuis 2010 et ses revenus "jour de match" (billetterie et ventes annexes) ont augmenté drastiquement ces dernières années. Ils sont passés de 19 millions d'euros en 2009/2010 à 63 millions d'euros en 2013/2014, encore loin du FC Barcelone qui affiche 116 millions d'euros dans cette colonne de revenus. Ils continuent de grimper année après année, ce qui l’a en partie aidé à remplir les conditions fixées par le fair-play financier pour présenter un budget à l’équilibre l’été dernier. Alors avant de se jeter à l’eau et de tenter de relancer un mouvement supporter, le PSG attend de trouver "la recette miracle".

Al-Khelaïfi a fait un rêve…

Le modèle allemand, si souvent vanté dans d’autres domaines, pourrait bien y ressembler. Les stades de Bundesliga font se côtoyer tous les week-ends un public familial et des fans bruyants pendant 90 minutes. Tout ça dans une ambiance proche de la kermesse ou de la fête de village. En ça, l’Allemagne a parfaitement négocié le virage de la Coupe du monde 2006, qui a permis de fédérer autour de son football et de profiter de l’occasion pour rénover ses enceintes, afin d’en faire de véritables lieux de vie. Et si l’Euro 2016 avait le même effet pour le PSG ? 75 millions d’euros ont déjà été investis pour moderniser le Parc des Princes et une plus grande refonte pourrait être entreprise après la compétition, avec un éventuel agrandissement de sa capacité.
Toujours propriétaire du stade, même si l’éventualité d’un rachat par QSI fait son chemin, la Mairie de Paris s’implique elle aussi sur le dossier des supporters. A l’initiative de Nicolas Bonnet-Oulaldj, responsable de la commission sport du Parti Communiste et adjoint au Maire du 12e arrondissement de Paris, elle a adopté en mars dernier un vœu préconisant la mise en place d'un plan de prévention et de dialogue avec les supporters. "C’est un signe fort, même s'il faut encore définir les contours des discussions et les entamer pour de bon", indique James de l’ADAJIS. "Il y a un modus operandi à définir, confirme Jean-François Martins, adjoint à la Maire de Paris chargé des Sports. Il faut inventer de nouvelles formes de dialogues entre le PSG et ses supporters. Je dirais même entre le PSG et ses spectateurs, parce que personne ne doit avoir la prétention de représenter tous ceux qui aiment le club".
Alors si la renaissance d’un mouvement supporter à Paris n’est certainement pas pour demain, ni pour après-demain, elle n’est plus si utopique qu’elle n’y paraissait encore récemment. Une anecdote en atteste plus que d’autres. Des bruits insistants prêtent à Nasser Al-Khelaïfi un rêve dans la foulée de l’élimination du PSG à Barcelone en quart de finale de la Ligue des champions 2013. Impressionné par le soutien inconditionnel des supporters ayant fait le déplacement, même plusieurs minutes après le match, le président du PSG s’était juré de créer les conditions pour retrouver une telle ambiance au Parc. Un mois après, les événements du Trocadéro en marge des festivités du titre de champion de France avaient remis cette idée dans les cartons. Elle semble aujourd’hui prête à refaire surface. Reste à savoir quand et comment.
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Anne Hidalgo et Nasser Al-Khelaïfi en discussion lors de PSG-Bordeaux

Crédit: Panoramic

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