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Albanie - France : De Biasi, l’homme qui a sorti l’Albanie du néant footballistique

Loïc TREGOURES

Mis à jour 12/06/2015 à 11:12 GMT+2

Sélectionneur de l’Albanie depuis 2011, Giann De Biasi a permis à l’équipe nationale de sortir de l’ornière en quelques années. Le retard pris, conséquence logique de l’ancien régime et de son isolement, est petit à petit comblé. Si bien que plus personne ne se balade face à l’Albanie. La France l’a vu en novembre. Elle devrait en avoir une nouvelle preuve samedi.

De Biasi, sélectionneur de l'Albanie

Crédit: AFP

C’est en soulignant à quel point on est surpris par le niveau d’une équipe que l’on peut deviner, en creux, à quel point on la méconnait et on la mésestime. C’était pourtant le discours des Français après le match nul tout à fait logique obtenu par l’Albanie à Rennes en novembre dernier.
Derrière le cliché "il n’y a plus de petites équipes", il y a une réalité, celle des progrès constants de l’Albanie depuis que l’Italien Gianni De Biasi a pris en main le destin de la sélection fin 2011, si bien qu’il devient surprenant d’exprimer encore sa surprise de ne plus plier en deux les Kuq i Zinjtë (rouge et noir) comme au temps de Jean-Pierre Papin.  

L’isolement total

Vu le nombre de joueurs albanais qui jouent au plus haut niveau et pour d’autres sélections, en particulier la Suisse, il y a de quoi s’étonner que l’Albanie ne soit pas au niveau de ses voisins ex-yougoslaves. En réalité, cela peut s’expliquer par un petit détour historique. Là où les pays du bloc communiste ont beaucoup investi sur le sport à des fins politiques, y compris la Yougoslavie, l’Albanie a pris le chemin inverse de l’isolement total, renonçant même à plusieurs reprises de disputer les Jeux Olympiques. Ainsi, aucun investissement, aucun savoir-faire et aucune tradition sur laquelle s’appuyer une fois le communisme disparu, là où Serbes et Croates  ont pu continuer de compter sur leurs acquis pour fabriquer des grands champions même aux pires heures des années 1990.
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De Biasi lors d'Italie-Albanie

Crédit: AFP

Ce n’est pas un hasard si de nombreux joueurs de la sélection albanaise actuelle viennent du Kosovo, le réservoir en Albanie même est beaucoup trop faible en raison de l’absence de ces structures et de ce savoir-faire.  L’Albanie s’est donc assignée deux tâches. Sur le long terme, miser sur la jeunesse de la population albanaise pour rattraper ce retard et élever le niveau interne afin de créer un réservoir propre sans devoir compter sur la diaspora dont les meilleurs joueurs choisissent bien souvent leur pays d’adoption, comme Januzaj, dont De Biasi dit qu’il n’a même pas réussi à lui parler au téléphone. Le passage du championnat à 10 équipes va dans ce sens d’une meilleure qualité, tout comme les travaux pour la rénovation de plusieurs stades à Elbasan, Tirana et Shkoder.
A court terme, le rôle de De Biasi a été d’enclencher une dynamique positive après les échecs des années 2000 malgré des joueurs comme Igle Tare, Erjon Bogdani ou Alban Bushi. Le constat de De Biasi est simple : l’équipe souffre d’une absence de discipline tactique et d’une mentalité trop relâchée pour pouvoir espérer quelque chose quand le talent individuel est trop rare.
C’est donc sur ces deux chantiers que l’Italien a travaillé, en bouleversant en profondeur le groupe depuis 3 ans, chose qu’il n’avait eu que trop peu l’opportunité de faire dans des clubs italiens aux effectifs déjà formés dans lesquels il a exercé, à l’exception de Modène.  Ainsi, De Biasi a conservé autour de lui quelques joueurs d’expérience comme  Cana, Lila ou Agolli, les rares à atteindre la trentaine, tout en lançant des jeunes comme Hysaj, Kaçe, Sadiku, Balaj, ou le meilleur joueur du championnat suisse Gashi, qui sera toutefois absent contre les Bleus.

La rigueur pour mot d'ordre

La tactique est simple et tient en sept lettres : RIGUEUR. Autour de Cana, l’équipe est organisée pour presser, ne rien lâcher, et chercher à relancer proprement, tout en exploitant au maximum tous les coups de pied arrêtés. Si les buts marqués sur phase arrêtée sont le signe d’une implication et d’une volonté, et ceux encaissés le signe d’un relâchement ou d’un dilettantisme,  alors les Albanais avaient indiscutablement plus envie de jouer que la France en novembre dernier.
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Lorik Cana lors de l'entraînement d'avant-match à Rennes à la veille de France-Albanie

Crédit: AFP

Bien que jouer contre les Bleus soit toujours un match de gala pour les Albanais, plusieurs joueurs importants ont été laissés au repos afin de tester de nouvelles options. De Biasi ne perd pas de vue son objectif principal : accrocher la place de barragiste dans le groupe à cinq équipes. Cela passera par un déplacement périlleux au Danemark avant les réceptions du Portugal et de la Serbie. La dernière fois, les Albanais s’étaient effondrés en fin de parcours de qualification, mais comme pour la Bosnie, l’expérience fait grandir, et si ce n’est pas pour cette fois-ci, ce sera pour l’Euro 2020 (il y a trop peu de places qualificatives pour l’Europe pour le Mondial), en n’étant pas dans le 5e chapeau au tirage au sort.
Marié à une Albanaise, et naturalisé albanais après sa victoire historique au Portugal, suivie d’une confirmation contre l’Arménie, De Biasi est parti pour être celui qui aura fait entrer le football albanais dans une nouvel ère au terme de son long mandat, afin que plus personne, d’ici quelques années, ne puisse plus se dire surpris de ne pas avoir plié l’Albanie. 
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