Loin du Real, Angel Di Maria ne se porte pas plus mal (bien au contraire)

A Manchester United, il faut avoir beaucoup de talent, un caractère bien trempé et les épaules assez larges pour porter le numéro 7. Depuis un demi-siècle, il est en effet réservé à des joueurs mythiques, qui ont profondément marqué l’histoire des Red Devils. Après Georges Best, Bryan Robson, Eric Cantona, David Beckham et Cristiano Ronaldo, c’est maintenant au tour d’Angel di Maria de relever le défi et de perpétuer cette tradition. Il est encore trop tôt pour savoir si le longiligne argentin va marquer le club mancunien de son empreinte. Mais pour l’instant, ses débuts sont plutôt convaincants.

En dix matches, il a inscrit trois buts et délivré six passes décisives. Ça, c’est pour les chiffres. Mais ils ne traduisent pas forcément le travail colossal que réalise Angel. Toujours aussi actif, toujours aussi technique, il est un joueur indispensable à van Gaal. En dix matches, il est devenu l’un des chouchous du bouillant public d’Old Trafford. D’ailleurs, les supporters l’ont unanimement élu joueur mancunien du mois de septembre. Un honneur pour un homme qui venait tout juste de poser ses valises en Angleterre après un été tourmenté.

Et pourtant, l’été s’annonçait radieux pour le natif de Rosario. En pleine forme après une saison très réussie au Real, il n’avait qu’une envie : gagner la Coupe du monde chez les frères ennemis brésiliens. L’emblématique Cesar Luis Menotti, subjugué par tant de talent dira même de lui avant cet événement mondial : "C’est le meilleur joueur argentin de l’actualité mais aussi le meilleur joueur du championnat espagnol. Pour moi, il est devant Messi cette saison." Après s’être montré décisif au Real et en particulier lors de la finale de la Ligue des Champions, Di Maria arrive lancé donc au Brésil.

Il est sur un nuage. Il est l’étincelle, l’homme capable de transformer un match en un coup de baguette magique. En huitièmes de finales, c’est lui qui, à quatre minutes de la fin, crucifie les Suisses. IL est le parfait complément de Lionel Messi, l’homme par qui le danger arrive. Et puis, tout s’effondre. En quarts de finale, contre la Belgique, sa cuisse droite le trahit. Et c’est du banc de touche, impuissant, qu’il suivra la demie puis la finale. Sa déception est immense. "Le Real a envoyé une lettre à la AFA (association argentine de football) avant la finale pour demander aux dirigeants de m’empêcher de jouer la finale. Lorsque j’ai vu ça, je l’ai prise et je l’ai déchirée." Angel a la rancune tenace. Pour lui, cette lettre, c’est une offense, une déclaration de guerre. L’ange argentin est donc bien décidé à ne pas baisser la tête et à entrer en guerre contre la Maison Blanche.

Le Real a peut-être fait pression pour qu’il ne prenne pas de risques. Pour mieux pouvoir le vendre ? Car, Florentino Pérez ne veut plus de lui. Il en a marre de la pression permanente de son agent, Jorge Mendes, pour qu’il lui augmente son salaire. Depuis le départ de Mourinho, Di Maria se sent moins protégé au sein du club merengue. Et pourtant, les chiffres parlent pour lui. En 2013/2014, il a, par exemple, délivré 22 passes décisives, loin devant Bale (16) et Koke (15). Et depuis 2010, en quatre saisons, il a inscrit 36 buts et donné 72 passes décisives en 190 matches. Diego Simeone, l’entraîneur de l’Atletico, dira même du joueur argentin : "C’est le joueur le plus efficace du milieu vers l’avant. Il va très vite et il est doté d’une technique en mouvement exceptionnelle. Lorsqu’il est sur le terrain, il est très difficile à manœuvrer." Mais Florentino Perez ne veut rien entendre et finit donc par le vendre. Et ça tombe bien, car de nombreux clubs capables de verser des millions, aimeraient bien le faire venir chez eux.

Les Red Devils n’ont pas hésité à casser leur tirelire pour l’Argentin. Pour un peu plus de 70 millions d’euros, Di Maria est même devenu le joueur le plus cher de l’histoire du football anglais. "Mais c’est un joueur extraordinaire, défend Gary Neville. Il est très endurant, il est partout sur le terrain et il est explosif dans les derniers 25 mètres. Pour moi, il vaut ce que le club a payé. Et il va le démontrer." Di Maria a très rapidement démontré que son nouveau club ne s’est pas trompé en l’achetant.

Le milieu argentin n’a pas vraiment eu besoin de temps d’adaptation à la rugueuse et très dynamique Premier League. Il aime ce football et il est d’ailleurs fait pour ça. Courir d’un bout à l’autre du terrain, provoquer, attaquer, défendre, c’est dans sa nature. Il est la parfaite illustration du joueur box-to-box dont raffolent les anglais. Et en plus, il est irréprochable sur la pelouse comme en dehors. Il y a quelques semaines, des photographes l’ont surpris en train de faire ses courses au supermarché comme n’importe quel anglais moyen. Les clichés ont été publié et ont bien fait parler. Un bon coup de com’ pour le joueur le plus cher de l’histoire du championnat anglais.

En ce début de saison, Angel di Maria remet les points sur les i et prouve qu’il a un mental en acier trempé. Il a envie de tout casser. Avec la sélection argentine, il est devenu incontournable au même titre que Lionel Messi. Lors de la tournée de la sélection albiceleste en Chine, après le Mondial, il a pu se rendre compte de sa nouvelle popularité, puisqu’il a été autant acclamé que le petit lutin du Barça par le toujours très hystérique public chinois. Et puis, sur le terrain, il a pris une douce revanche contre l’Allemagne au mois de septembre. Sur la pelouse de Düsseldorf, l’Argentine a fait boire le bouillon aux champions du monde (4-2). Le néo-Mancunien a inscrit un but et délivré trois passes décisives. Le genre de prestation qui donne encore plus de regrets aux supporters argentins. Car tous, sans exception, se disent qu’avec lui, peut-être que l’Argentine aurait été championne du monde. "Il n’aurait pas changé la donne, parce que ce jour-là, nous étions vraiment très forts", a déclaré Joachim Löw comme pour calmer les ardeurs argentines.

En tout cas, Angel di Maria est, avec Javier Mascherano et Lionel Messi, l’un des trois Argentins qui figurent dans la liste des 23 nominés pour le ballon d’or. Un rêve encore inaccessible pour Di Maria. Mais qui sait si, dans un jour pas si lointain, il ne se rapprochera pas des meilleurs comme Messi et CR7 ? Pour Lucas Biglia, son acolyte en sélection, il n’y a pas de doute : "Pour moi, Angel est déjà tout en haut en compagnie de Cristiano Ronaldo et Lionel Messi. Lorsque vous l’avez avec vous, à vos côtés, ce n’est plus le même match. Car il est capable, tout comme ces deux monstres du football mondial, de changer le cours d’un match sur une action." A 26 ans, Angel di Maria a encore de très beaux jours devant lui. Et il pourrait, s’il continue sur sa lancée, venir tutoyer les sommets et devenir, à l’instar des George Best, Bryan Robson, Eric Cantona, David Beckham ou Cristiano Ronaldo, un autre numéro 7 mancunien qui a marqué l’histoire.