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De Rio 2016 à Tokyo 2021, l'incroyable odyssée de Trayvon Bromell, successeur annoncé du roi Usain Bolt sur 100 mètres

Maxime Dupuis

Mis à jour 31/07/2021 à 20:01 GMT+2

TOKYO 2020 - Qualifié de justesse pour les demies du 100 mètres, Trayvon Bromell a eu chaud, samedi. Mais l'Américain en a vu d'autres dans sa carrière. Septième meilleur performeur de l'histoire sur la ligne droite, il était déjà sur le podium aux Mondiaux 2015, mais une grave blessure contractée à Rio l'a forcé à vivre trois saisons blanches. Bromell, c'est l'histoire d'une folle rédemption.

Trayvon Bromell à Rio en 2016

Crédit: Getty Images

Le loup a quitté la bergerie depuis quatre ans déjà. Et ils sont plusieurs à avoir espéré s'improviser chef de meute. Justin Gatlin y est parvenu en 2017, complétant la route de sa rédemption. Mais malgré son désir d'étirer son éternité jusqu'à l'infini, le champion olympique 2004 du 100 mètres a fini par être rattrapé par le temps. Christian Coleman, lui, a n'a pas été rattrapé par les aiguilles de la toquante. Mais par la patrouille, qui lui a adressé un carton rouge après ses manquements répétés aux règles de localisation de la lutte antidopage. Si bien que la flèche et la lumière sont désormais toutes orientées vers un homme, un seul : Trayvon Bromell, même si ce dernier a connu un premier tour plus compliqué que prévu, samedi.
Bromell, c'est l'histoire d'un sprinteur qui a toujours couru. Et vite. Dès 2014, à 18 ans, il devient à Eugene le premier ado à parcourir la ligne droite en moins de dix secondes. 9"97, un record du monde dont il est toujours le détenteur. Depuis 2008, la mainmise sur le sprint est jamaïcaine. Il incarne l'espoir du renouveau US, alors que la bannière étoilée n'a remporté que deux titres olympiques sur la ligne droite depuis la victoire de Lewis à Séoul (1988). En 2015, aux Mondiaux de Pékin, le déroulé de l'épreuve ne dit pas le contraire : troisième ex-aequo derrière les inséparables Bolt et Gatlin, Bromell prend date. Sa carrière va basculer un an plus tard à Rio.

Il quitte Rio en fauteuil roulant

Auréolé du titre de champion du monde du 60 mètres en salle, Trayvon Bromell arrive aux Jeux avec une idée derrière la tête mais, surtout, un gros bobo au tendon d'Achille qui lui empoisonne la vie depuis le printemps. Le natif de Saint-Petersburg (Floride) se hisse tout de même en finale du 100. Mais ne peut faire mieux que huitième, en serrant les dents très fort (10''06). L'Américain ne lâche rien et participe au 4x100. Pour rien. Les quatre bombes US sont disqualifiées pour un passage de témoin hors zone, le premier entre Rodgers et Gatlin. Bromell a galopé pour du beurre et aggravé sa blessure. Rupture du tendon d'Achille. Il s'écroule, pensant encore avoir décroché le bronze, et quitte la scène dans un fauteuil roulant. Le cauchemar commence.
Trayvon Bromell, à terre après la finale du 4x100 à Rio
Une opération. Une saison 2017 quasiment blanche. Une autre opération en 2018. Saison blanche. 2019 ? Blessure à la hanche. C'est reparti pour un tour. Bromell, obsédé par le temps comme tout sprinteur qui se respecte, en a perdu énormément. Ses apparitions se comptent sur les doigts d'une main. Ils sont peu à lui réserver un avenir doré alors qu'il doit souffler ses 25 bougies juste avant les Jeux de Tokyo, initialement prévus en 2020.
Trayvon Bromell n'est pas né avec une cuillère d'argent dans le bec et s'est cassé les deux genoux, un avant-bras et une hanche, gamin. Il sait ce que c'est de vivre dans l'adversité. Porté par son désir de revenir et sa foi, il s'accroche à son rêve d'or olympique et d'immensité. "Je n'avais pas beaucoup d'appels téléphoniques à ce moment-là, je ne faisais plus d'interview. Plus personne n'en avait rien à faire de Trayvon, se remémore-t-il. Les seules personnes qui me soutenaient ? Dieu et ma famille."
Hors le divin et ses proches, et lui, ils sont peu à imaginer le Floridien courir vite, de nouveau. Et puis arrive 2021. 9''77 à Miramar, chez lui en Floride début juin. Bromell devient le 7e meilleur performeur de l'histoire et le grand favori pour les Jeux. 9''80 aux US Trials il y a un peu plus d'un mois. Trayvon Bromell n'est pas parvenu à tout ça en claquant des doigts. Mais en bossant comme un damné, sous les ordres de Rana Raider.
Il s'agit juste d'envoyer un message d'espoir aux enfants
Il est désormais lancé pleine balle vers Tokyo où il sera l'homme à battre, ce week-end. Perturbant ou motivant ? "Je n'y pense pas, je fais ce que je peux et le jour de la course, le résultat sera ce qu'il sera, confiait-il à Monaco en marge du meeting estampillé Ligue de Diamant. Je m'entraîne toujours comme si j'étais un outsider. Pour moi, il s'agit juste d'envoyer un message d'espoir pour montrer aux enfants que tout le monde peut assouvir ses rêves. Bolt a montré la voie, et maintenant c'est aux autres d'écrire leur histoire. Ce qui me motive le plus c'est que les enfants me regardent et me voient comme un exemple, déclare l'Américain. Quand j'étais petit, personne ne me voyait, j'étais comme une ombre".
Trayvon Bromell après sa médaille de bronze aux Mondiaux de Pékin
Quand vous demandez à Usain Bolt de désigner son successeur pour ces Jeux, il n'hésite pas bien longtemps. Le Floridien est celui-ci. "Il était l'une des jeunes stars à suivre. J'ai vraiment un œil sur lui et suis curieux de voir ce qu'il va réaliser."
Rendez-vous est pris ce 1er août à Tokyo, pour LA finale de ces Jeux 2021 disputés devant des tribunes vides. Un crève-cœur pour celui qui rêve de réussir le coup d'une vie ? Pas vraiment. "Les gens n'étaient pas là quand ma mère et moi ne pouvions pas payer nos factures et qu'on ne savait pas si l'on aurait toujours un toit au-dessus de nos têtes, rappelait-il récemment dans les colonnes du Guardian. Par conséquent, quand je cours, ça ne compte pas. C'est le même 100 mètres." La meute a peut-être trouvé son chef.
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