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LaVar Ball, le papa qui met le boxon en NBA

Antoine Pimmel

Mis à jour 12/01/2018 à 11:37 GMT+1

NBA - En forçant le trait de son personnage loufoque et provocateur tout en étant le parfait client pour les médias, LaVar Ball a créé un cycle infernal duquel les vrais problèmes ont été oubliés.

LaVar Ball lors d'une opération de promotion de Big Baller brandà Shanghai le 10 novembre 2017.

Crédit: Getty Images

Tous les coaches amateurs du monde entier ont pu se sentir proche de Luke Walton, entraîneur en chef des Los Angeles Lakers, cette semaine. Pas seulement les éducateurs de basket. Mais bien de tous les sports confondus. Un parent qui met la pression sur le coach pour que son fils ou sa fille passe plus de temps sur le terrain, on en trouve dans tous les championnats jeunes. Et même... en NBA ? La ligue la plus relevé du monde ? Un univers d'adultes multimillionnaires ? C'est probablement une grande et tristement honteuse première. En balançant constamment sur le tacticien des Los Angeles Lakers, l'équipe de son fils aînés Lonzo Ball, LaVar Ball a brièvement mis Walton sur un pied d'égalité avec les entraîneurs qui supportent chaque weekend les plaintes des pères et des mères persuadés d'avoir à cœur les intérêts de l'équipe de leur enfant. Mais il est probablement allé trop loin en déclarant publiquement que le coach avait "perdu le contrôle du vestiaire des Lakers" et que les joueurs "ne l'écoutaient plus."
LaVar Ballle 22 juin 2017 à New-York
Une provocation de plus pour un homme d'affaire qui a axé toute sa stratégie marketing sur ses sorties déplacées. Avec un slogan inavoué : toute publicité est bonne à prendre, même quand elle est mauvaise. Il a multiplié les commentaires plus absurdes les uns que les autres. De son fils, alors universitaire, meilleur que le double MVP Stephen Curry au fait qu'il aurait "détruit" - ce sont ses propres mots - Michael Jordan en un-contre-un. Il en a fait des affirmations. Autant de grands titres à la Une. Car le procédé et l'objectif sont les mêmes à chaque fois : attirer l'attention vers lui, et si possible vendre des casquettes et autres produits de la marque familial Big Baller Brand. C'est ainsi qu'il s'est élevé au rang de personnage médiatique incontournable. Des news en pagaille à chaque fois qu'il ouvre sa (grande) bouche, des centaines de journalistes présents pour l'accueillir en Lituanie, où ses deux autres garçons ont débuté leur carrière "professionnelle", une section spéciale sur le géant ESPN, des invitations à des talk shows, des reportages… et même un passage en direct sur CNN après son clash via Twitter avec le président des Etats-Unis, Donald Trump. Incroyable.
Cette recherche constante de la couverture médiatique lui vaut désormais le surnom de "Kardashian du basket", une comparaison mise en lumière par Steve Kerr, le coach des Golden State Warriors et ancien mentor de Luke Walton. Le rapprochement se tient, d'autant plus que la famille Ball a déjà son émission de téléréalité diffusé sur Facebook. Maintenant que le phénomène explose et attend des proportions embarrassantes, des responsables sont recherchés. Comme s'il fallait un coupable. Serait-ce la faute de ceux qui relaient, comme l'ont souligné Rick Carlisle (Dallas Mavericks), Stan Van Gundy (Detroit Pistons) et d'autres acteurs NBA ? L'association des coaches a vivement critiqué la position d'ESPN, accusé d'offrir une vitrine permanente à LaVar. Serait-ce la faute de ceux qui le soutiennent ? Ils sont de plus en plus nombreux à rejoindre les rangs de BBB, par envie de dénoncer le système ou même par esprit communautaire. Serait-ce la faute à ceux qui cliquent ? Ceux qui prennent la parole pour critiquer le bonhomme tout en nourrissant finalement le cercle qu'ils dénoncent ?

LaFraude Ball

Dans toutes ces histoires, on en oublie peut-être l'essentiel. Les messages les plus importants sont écartés des discussions. A l'heure où toute la planète basket se remue pour soutenir Walton, pourquoi la direction des Lakers ne s'est-elle pas exprimée une seule fois sur le sujet ? Pas même une déclaration publique de Magic Johnson (président) ou Rob Pelinka (GM) pour défendre le coach. Pas une seule sortie ferme pour contrer LaVar. Eux aussi ont leur part de responsabilités. Ils savaient à quoi s'attendre en draftant Lonzo. Pour l'organisation, la position ne bouge pas d'un poil : hors de question de négocier avec les terroristes de la pensée. Enfin, avec les parents quoi. Et quid du jeune Ball lui-même ? Il est pris dans une situation insolite et sacrément délicate. Le postérieur entre deux strapontins. D'un côté, son père, celui qui l'a élevé. De l'autre, son coach, celui qui essaye de développer ce potentiel intrigant en superstar NBA. Sa carrière vient de débuter et il est déjà au cœur de tous les projecteurs. Malheureusement, ce sont bien souvent pour les mauvaises raisons – les agissements de son père – et non pour évoquer les performances brillantes du jeune homme. Sa force mentale, nécessaire pour traverser toutes ses épreuves rocambolesques, est rarement mise en avant. Même sur le terrain, les frasques de son paternel font oublier à quel point il est bon, si tôt. Ce qui est pardonné aux autres rookies ne l'est pas auprès de Lonzo, dont la réputation est entachée par l'agacement que provoque LaVar.
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Lonzo Ball, LaMelo Ball et LiAngelo Ball

Crédit: Getty Images

Et encore, le meneur des Lakers a au moins eu la possibilité de faire son chemin jusque chez les pros sans que son père soit connu à l'échelle nationale. Pour ses deux petits frères, c'est encore pire. Ils ont été pris dans le tourbillon bien avant d'avoir ne serait-ce qu'une chance d'arriver en NBA. Pendant que les propos de LaVar tournaient en boucle, LiAngelo, 19 ans, et LaMelo, 16 balais, ont dû s'expatrier loin des leurs, en Lituanie, pour débuter un semblant de carrière professionnelle. Là encore, une pure mascarade. L'équipe réserve du BC Prienai a carrément déclaré forfait de la modeste Baltic League pour participer à un tournoi sponsorisé par Big Baller Brand – des tenues vestimentaires des arbitres à l'énorme logo scotché au milieu du parquet.
Les matches sont diffusés sur Facebook, encore une fois. Les adversaires ont des noms prestigieux : Zalgiris étant le premier d'entre eux. Mais les clubs ne sont pas dupes. L'équipe phare de Lituanie n'a pas envoyé son effectif Euroleague mais des jeunes espoirs de 16 et 17 ans. On est loin d'une rencontre pro. Et au final, les deux frangins (surtout LiAngelo, le cadet) ont très peu de chance de vraiment jouer au très haut niveau un jour. Encore moins en NBA. Plus grave encore, pour arranger ce partenariat bidon, LaVar a déscolarisé Gelo de l'un des programmes les plus prestigieux du pays, UCLA. Melo a quitté le lycée. C'est de leur avenir, pas seulement dans le basket mais bien dans la vie qui est plus ou moins mis en péril. Et ça aussi, c'est souvent écarté des discussions. Les gamins sont devenus des enfants de la téléréalité.
C'est bien dommage. Surtout que certains des combats de LaVar Ball peuvent paraître légitimes, de l'exploitation des étudiants-athlètes non payés par une NCAA qui brasse des millions à celle des équipementiers. Mais tous ces points clés sont finalement mis sous silence, étouffés par un clown qui donne à la société ce qu'elle attend : du divertissement permanent.
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