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Oubliez les Spurs tels que vous les avez connus, ils n’existent plus

Antoine Pimmel

Mis à jour 14/03/2018 à 16:38 GMT+1

NBA – Après vingt qualifications de suite en playoffs, l’équipe mythique de San Antonio va devoir cravacher jusqu’au bout pour valider son ticket à l’Ouest. Mais quelle que soit l’issue de la saison, c’est la fin d’une époque et donc le début d’une nouvelle ère, peut-être plus chaotique, pour les Spurs.

Tony Parker et les Spurs de San Antonio

Crédit: Getty Images

Votre perception du basket et de la NBA change selon la date à laquelle vous avez commencé à suivre la ligue nord-américaine. En revanche, que ce soit en 1997, en 2007 ou même en 2017, le regard sur les San Antonio Spurs sera le même pour tous : une organisation qui a développé une culture de l’excellence. Trois générations marquées, deux décennies écoulées et un seul constat. La franchise texane est mythique. Presque éternelle. Au moins dans les consciences (ou inconsciences) collectives des passionnés qui voient les éperons comme une machine à gagner capable de se renouveler aussi longtemps que Gregg Popovich sera aux commandes.
Difficile de donner tort à la masse. Les Spurs ont été enterrés plusieurs fois déjà. Ils se sont toujours relevés. Ils ont fait taire les critiques. Ils ont redéfini les limites. Et ils ont battu un paquet de records. Vingt qualifications de suite en playoffs, série en cours, depuis 1997, année lors de laquelle le légendaire Tim Duncan a débarqué dans la grande ligue. Le destin de San Antonio a basculé à ce moment-là. Il a porté la franchise vers son premier sacre en 1999. Les Texans en ont gagné un autre en 2003, un troisième en 2005, un quatrième en 2007 puis un cinquième - et dernier à ce jour - en 2014, date de l’avènement de Kawhi Leonard, successeur du grand Tim. Voilà comment une organisation s’est maintenue au plus haut niveau au point de devenir une référence non pas seulement auprès de ses concurrents mais même au-delà de son propre sport.
De ce fait, les Spurs sont perpétuellement présentés comme des candidats au titre. C’était même encore le cas en début de saison. Et là encore, comment donner tort aux observateurs ? Popovich a enchaîné dix-huit campagnes consécutives en saison régulière avec au moins 50 victoires (il était descendu en-dessous en 1999 – 37 succès et 13 défaites – uniquement parce que la saison ne comptait que 50 matches à cause du lock-out !). Il a mené ses troupes à 61 victoires l’an dernier et San Antonio menait Golden State de 20 points lors du premier match des finales de Conférence, avant que Kawhi Leonard ne se blesse. Autant de raisons de croire en ce groupe.
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Tim Duncan, Manu Ginobili et Tony Parker

Crédit: AFP

Sans Leonard ? Une équipe moyenne, pas plus

Et pourtant non. C’est un décalage avec la réalité, celle du terrain. Une nouvelle vérité qui éclate soudainement aux yeux de tous, maintenant que les lacunes (et les blessures) viennent remettre les Spurs à une place qu’ils n’ont plus connue. Une place où nous, passionnés depuis 1997, 2007 ou 2017, ne les avons jamais connus. Actuellement huitièmes à l’Ouest à égalité avec le Jazz (et avec un seul succès d’avance sur les Nuggets, dixièmes), ils vont devoir cravacher pour se qualifier en playoffs.
Le nouveau constat est brutal. Le 25 février dernier, les Texans étaient encore installés à la troisième place de leur Conférence. Mais ils étaient en sur-régime. Leur bilan était faussé par les nombreuses victoires décrochées essentiellement contre les (là aussi nombreuses) équipes faibles. Parce qu’avoir un excellent coach, quelques joueurs talentueux et des hommes de devoir plein de bonnes intentions suffit généralement à battre toutes les formations sans repères pendant la saison régulière NBA. Les Spurs étaient nettement plus à la peine dès que le niveau d’adversité s’élevait. Résultat : ils sont descendus à la dixième place après avoir perdu dix de leurs douze derniers matches avant la victoire arrachée mardi soir.
Si San Antonio mord la poussière contre les équipes de qualité, c’est d’abord parce que Gregg Popovich est privé de sa superstar. Vous pouvez fantasmer autant que vous voulez sur le beau jeu de passes construit par le légendaire coach des Spurs, mais il a d’abord bâti son succès autour de ses meilleurs joueurs. Une formation défensive au tempo offensif lent quand Tim Duncan et David Robinson contrôlaient la raquette. Un style plus débridé, plus moderne quand la vitesse de Tony Parker et le génie de Manu Ginobili faisaient la différence. Puis un surplus d’isolations quand Kawhi Leonard, descendant spirituel de Kobe Bryant (oui, il y a des similitudes), a commencé à prendre la pleine mesure de ses pouvoirs. Mais le candidat au MVP n’a joué que neuf matches cette saison. Sans lui, c’était tout le fameux système qui était à reconstruire.
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Kawhi Leonard (Spurs)

Crédit: Getty Images

Un sacré coup de vieux

D’où cette chute foudroyante au classement. Sans Leonard, les Spurs accusent le coup. Mais les blessures ne peuvent à elles-seules expliquer les déboires de l’organisation. Les dirigeants de San Antonio ont fait tellement de bons choix pendant vingt ans qu’ils nous ont, nous passionnés, encore une fois fait oublier qu’ils étaient eux aussi capables de se tromper. Car ils restent humains. LaMarcus Aldridge refusant de jouer pivot, le staff s’est entêté à aligner deux intérieurs de formation à une époque où le ‘small ball’ fait la loi. Aller à contre-courant est parfois payant. Mais pas quand il s’agit d’affronter le cinq de la mort des Warriors avec leurs joueurs mobiles et polyvalents, prêts à exploiter la moindre faille de l’adversaire.
Les éperons se retrouvent donc avec un paquet d’intérieurs doués mais inutiles en cas d’affrontement avec une vraie armada. Ils ont aussi misé sur des joueurs trop âgés. Comme Pau Gasol, 37 balais, encore 10 points et 8 rebonds par match mais à 16 millions de dollars la saison (et jusqu’en 2020) ! Autant de billets verts en moins pour recruter des joueurs plus jeunes, plus en adéquation avec leur époque. Cette fois-ci, les Spurs paraissent vraiment vieux.
Mais à force de compiler les exercices à plus de 60 victoires, ils ont très peu de chances de piocher des cracks à la draft. C’est rarement en fin de premier tour que se dénichent les superstars, même si Tony Parker (28e choix) et Manu Ginobili (57e) sont d’incroyables exceptions. Se rater complètement a parfois du bon. C’est comme ça que la franchise a mis la main sur David Robinson (premier choix en 1987) puis Tim Duncan (premier choix en 1997). Sauf que même s’il venaient à manquer les playoffs cette saison, la probabilité qu’ils héritent de l’un des trois premiers picks est quasiment nulle.

Comment se renouveler ?

Peu importe, Popovich a déjà sa superstar en la personne de Leonard. Taiseux et présenté comme le joueur des Spurs par excellence, ce dernier a finalement un caractère différent de celui de Duncan. Ses négociations avec Jordan Brand (qui ne lui proposerait pas assez d’argent selon le joueur) ou la gestion de sa blessure, qu'il traîne depuis de très longs mois, ont animé les discussions extra-sportives. Ça aussi, c’est nouveau.
Mais même avec Leonard, les Texans ont finalement peu de perspectives pour vraiment l’entourer au mieux. Chris Paul et Kevin Durant n’ont pas souhaité s’installer à San Antonio. LeBron James ne serait pas intéressé non plus. Le futur s’annonce donc plus incertain qu’il ne l’a jamais été au cours des vingt dernières années. Une métamorphose semble inévitable. Comme le disait Danny Green, sacrément visionnaire sur ce coup, après une défaite récente : "Les Spurs comme nous les avons connus n’existent plus."
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