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Toronto Raptors, la revanche du Canada

Antoine Pimmel

Mis à jour 28/05/2019 à 16:44 GMT+2

NBA – Finaliste pour la première fois de son Histoire, la franchise de Toronto est la fierté de la métropole canadienne. C’est même l’équipe de toute une nation, ravie de sa réussite et de son ascension vers les sommets du basket nord-américain.

Kawhi Leonard, Kyle Lowry et toute la franchise de Toronto, qui a remporté la finale de la Conférence Est

Crédit: Getty Images

Des scènes de liesse dans les larges avenues de la ville, où les voitures ont laissé la place aux milliers de supporters. Aux pieds des buildings immenses, ils célèbrent la victoire de leur équipe. Une foule euphorique, mais disciplinée, aucun débordement n’a été constaté. Des chants. L’hymne national qui retentit. C’est un peu comme si le Canada venait de gagner la Coupe du monde de football.
Pourtant, ce n’est pas ça. Pas du tout même. Les Raptors, franchise implantée à Toronto, viennent de se qualifier pour leurs premières finales NBA vingt-quatre ans après leur création (en 1995). Le centième match de playoffs de leur histoire est celui qui les a menés aux sommets.

Le Canada, le purgatoire des basketteurs NBA

Une belle revanche pour l’organisation. Il fut une époque pas si lointaine où personne ne voulait y mettre les pieds. Damon Stoudemire, le premier joueur sélectionné par la franchise, a demandé son départ dès qu’il en a eu l’occasion, soit avant même la fin de sa troisième saison. Quelques années plus tard, plus à l’ouest du pays, c’est Steve Francis qui fera le même cinéma. Drafté en deuxième position par Vancouver en 1999, il a carrément refusé d’aller y jouer. Au point de forcer son transfert vers Houston avant même d’avoir disputé son premier match en NBA !
L’ouverture voulue par la ligue vers le voisin Nord-Américain en 1995 ressemble alors à un échec cuisant. Malgré la proximité (relative) de New York (pour Toronto) et de Los Angeles (pour Vancouver), les joueurs n’y trouvent pas leur compte. Pour eux, le Canada reste loin et froid. Ce n’est pas leur championnat. La franchise de Vancouver a même disparu depuis, délocalisée à Memphis. D’où le fait que l’équipe porte le nom des Grizzlies aujourd’hui malgré la faible probabilité de croiser un ours dans le Tennessee.
Philadelphia 76ers' Allen Iverson (R) drives past Toronto Raptors' Vince Carter during first half action of game three of the Eastern Conference semifinal NBA playoffs in Toronto, Canada, 11 May, 2001.
Il a fallu attendre l’arrivée de Vince Carter, en 1998, pour que Toronto soit placée sur la carte du basketball. Uniquement par les cartons du jeune homme très spectaculaire et, à l’époque, très prometteur. Maillots violets, dinosaure rouge en guise de logo… une période iconique dont le summum fut le concours de dunk légendaire gagné par VC à Oakland en 2000 puis la demi-finale de Conférence épique contre les Sixers d’Iverson en 2001. Une série perdue au bout du Match 7 avec un dernier tir décisif raté par Carter.
Mais si les Raptors étaient acceptés dans l’univers NBA, ils ne faisaient toujours pas rêver les meilleurs joueurs du championnat (à défaut d’inspirer des générations de jeunes passionnés). Vince Carter a fini par demander son transfert, lui aussi. Chris Bosh a pris le relais au début des années 2000. Avant de partir, inévitablement, pour aller former un trio d’enfer avec Dwyane Wade et LeBron James à Miami.
Le Canada et les Raptors étaient devenus des punchlines. Un “running-gag”. Comme l’expliquait Lamond Murray, vétéran qui a passé onze saisons dans la ligue entre 1994 et 2006, "être envoyé à Toronto, c’était comme atterrir aux Clippers." L’autre équipe de Los Angeles, les Clips, avaient une réputation de losers ultimes pendant plus de vingt ans. Voilà à quoi la jeune franchise de l’Ontario était comparée. De toutes ces moqueries – parfois venant même des médias US – est née une unité entre les supporters des Raptors. Une fierté. Ils ont été récompensés avec l’évolution progressive de DeMar DeRozan.

Carter et DeRozan ont ouvert la voie

Le jeune homme est arrivé dans le grand Nord en 2009, après avoir été drafté en neuvième position. Il y a grandi. Au point de devenir le meilleur joueur de Toronto. Puis un All-Star. Il y a battu les records de Carter. Il s’est imposé comme le visage de l’organisation. Le visage d’une nation, et ce malgré les échecs répétés en playoffs.
Surtout, il a vraiment tenu à représenter la région. Lui qui est pourtant originaire de Los Angeles et de son climat bien plus doux. Il n’a même pas daigné rencontrer les dirigeants des Lakers lorsque son contrat a expiré en 2017. Ses intentions étaient claires : finir sa carrière là où tout a commencé et devenir le "Kobe Bryant de Toronto".
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Kawhi Leonard, accroupi. Joel Embid, debout, tête penchée vers le cercle. Peut-être les deux secondes les plus longues de leur carrière.

Crédit: Getty Images

Masai Ujiri, le Président du club, en a décidé autrement. Il n’a pas fait d’état d’âme et il l’a échangé contre Kawhi Leonard (entre autre) l’été dernier. Et ce malgré la fin de contrat qui approche pour l’ancienne superstar des Spurs. En huit mois, Leonard a complètement fait oublier DeRozan. Il a mené l’équipe à ses premières finales avec des performances exceptionnelles. Il a écrit la plus grande page de l’histoire de la franchise. Il est même déjà le meilleur joueur de l’Histoire de la franchise. Waouh. C’est dire le passé peu glorieux mais surtout très récent des Raptors.

Toronto, l’équipe de tout un pays

Aujourd’hui, le basket canadien est à un tournant. C’est une valeur montante à l’échelle mondiale. Vince Carter et DeMar DeRozan ont fait des petits. Ils ont suscité l’intérêt des jeunes générations qui ont grandi en les regardant jouer avec un rêve : faire pareil. Ils se sont dit que c’était possible, même dans un pays où le hockey sur glace reste le sport numéro un.
D’ailleurs, ce n’est certainement pas un hasard si la plupart des talents prometteurs canadiens sont issus de la région de Toronto. Ils ont suivi l’exemple. Il y a, entre autres, Jamal Murray, le meneur des Nuggets, Andrew Wiggins, le premier choix de la draft 2014 et star des Timberwolves, Shai Gilgeous-Alexander, le rookie surprenant des Clippers, ou encore R.J. Barrett, prospect sensationnel attendu dans le top trois de la prochaine draft.
Les jeunes canadiens n’ont plus peur de jouer yeux dans les yeux avec leurs homologues américains, et ce dès le lycée. Le pays est le plus représenté dans la ligue après les Etats-Unis. Ses joueurs sont fiers de mettre en avant leur attachement à la bannière rouge et blanche, les couleurs du drapeau également reprises par les Raptors depuis.
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Kawhi Leonard et les Toronto Raptors, champions de la conférence Est et qualifiés pour les finales NBA

Crédit: Getty Images

Parce que la franchise symbolise maintenant plus qu’une ville. Mais tout un état. Même Justin Trudeau, le Premier Ministre, s’est dit "excité" par la qualification pour les finales. Le phénomène a pris de l’ampleur. C’est une nouvelle ère pour la franchise. Il y a là un groupe compétitif, une ville multiculturelle où il fait bon vivre, un public fidèle et bouillant…
Kawhi Leonard pourrait faire passer une nouvelle étape à l’organisation en prolongeant son bail dans l’Ontario en juillet prochain. Il pourrait contribuer à faire (enfin) de Toronto une destination attractive auprès des joueurs NBA, même les meilleurs d’entre eux. Contrairement à de nombreuses franchises, les Raptors sont la fierté de tout un peuple. Et même plus que ça… c’est l’ironie de l’Histoire.
Si les Cavaliers divisaient, de par la présence de LeBron James, le nouvel adversaire des Warriors fait l’unanimité. La large majorité des passionnés de basket aux Etats-Unis, en dehors de la Californie, veulent voir Golden State tomber. Ils sont tous derrière Toronto. Ce n’est plus seulement l’équipe du Canada. C’est celle de toute l’Amérique du Nord, le temps des finales.
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