NBA - Les Sacramento Kings ne sont plus les rois de la lose

"LIGHT THE BEAM !" ("Allumez le laser", en VF) Hurlent les supporters présents lundi soir au Golden Center de Sacramento pour le choc de la Conférence Ouest entre leurs Kings bien aimés, troisièmes, et les Grizzlies, dauphins des Nuggets. Oui, ils ne rêvent pas - ou peut-être que si, ils peuvent justement enfin se mettre à rêver - leur équipe favorite est bien sur le podium et elle est en position pour se qualifier pour les playoffs à la mi-saison. Une situation que certains des fans de la franchise n’ont jamais connue. Ils ont toujours été parmi les plus bruyants et les plus bouillants de la ligue. Même quand leur franchise trustait les bas-fonds des classements et enchaînaient les mauvais choix année après année.

Alors maintenant que les Kings ont relevé la tête, ils profitent de chaque instant. Chaque victoire est célébrée avec un faisceau laser envoyé dans le ciel depuis la salle. "Light the beam", répètent-ils en boucle, alors que leurs chouchous infligent une correction aux Grizzlies (133-100). Ils ont des raisons d’être optimistes et tout simplement heureux. L’équipe revient de tellement loin. Risée de la NBA pendant plus de quinze ans, cirque perpétuel, elle est désormais la meilleure en Californie, un état qui comprend pourtant les Los Angeles Lakers et Clippers ainsi que les Golden State Warriors, champions en titre. En tout cas, c’est aujourd’hui la mieux classée avec 27 victoires et 19 défaites. C’est déjà un succès de plus que la saison dernière alors qu’il reste plus de 30 matches à jouer !

C’est une belle revanche. Il y a encore quelques mois, les Kings se prenaient encore une rafale de critiques après s’être séparés de Tyrese Haliburton, jeune meneur promis à un bel avenir. Les dirigeants avaient alors récupéré Domantas Sabonis. Un pivot talentueux, certes, mais avec un contrat court. Surtout, ça ressemblait encore une fois à une décision prise sans aucune réflexion sur le long-terme, le genre de choix qui a justement entraîné l’organisation dans cette spirale infernale depuis les départs de Peja Stojakovic, Mike Bibby, Chris Webber et compagnie, icônes d’une formation magnifique au début des années 2000. La dernière escouade vraiment vibrante de Sacramento et aussi l’une des seules dans l’Histoire peu glorieuse de la franchise depuis son déménagement au nord de la Californie en 1985.

Ils ne se sont qualifiés en playoffs que dix fois depuis. La dernière campagne remontant à 2006. Personne ne fait pire en NBA. Du coup, derrière chaque transfert, il y a un contexte. Bientôt un an après le départ surprenant d’Haliburton vers Indiana, l’échange paraît gagnant-gagnant… du moins pour le moment. Il le sera peut-être moins dans le futur, parce que le meneur semble destiné à une carrière de multiple All-Star. Mais c’est bien sous l’impulsion de Sabonis que Sacramento est en train de passer un cap. Le Lituanien est bien sur le fils de son père, à savoir un basketteur créatif, excellent passeur pour sa taille et capable d’impacter le jeu de bien des façons différentes. Il a compilé son sixième triple-double de la saison contre Memphis (14 points, 10 rebonds, 11 passes) et il est la plaque tournante de l’attaque flamboyante des Kings.

Les dirigeants ont essayé de mettre sur pied une équipe compétitive tout de suite. Sabonis, 26 ans, arrive à maturité. Il entre dans la meilleure période de sa carrière. Il pointe à 19 points, plus de 12 rebonds et plus de 7 passes par match. Ce n’est pas un candidat au MVP à proprement parler mais son nom mérite de venir dans la discussion (pour le cinquième place par exemple) concernant la plus haute récompense individuelle en NBA. Il forme un excellent duo avec De’Aaron Fox, 25 ans, un meneur plus à l’aise pour attaquer le cercle que pour vraiment gérer la balle. Les deux se complètent bien. Surtout, ils sont prêts. Prêts à peser.

C’est ce qui compte pour les Kings. Autour, Harrison Barnes est un vétéran (très) fiable. Kevin Huerter, 24 ans, une super recrue sur la ligne arrière. Lui aussi commence à vraiment se développer après avoir engrangé plusieurs années d’expérience dans la ligue. Keegan Murray est un rookie mais c’est un débutant plus âgé que la moyenne. Il a "déjà" 22 ans. L’ensemble est cohérent et correspond à une même ligne directrice : pouvoir retrouver le plus vite possible une place dans le top-8 de la Conférence Ouest après 16 ans de disette.

Sacramento n’est pas l’équipe du futur. Il est difficile d’imaginer les Kings vraiment passer de gros caps dans les années à venir pour rivaliser avec Memphis ou New Orleans ou les autres grosses équipes de l’Ouest en 2025 ou 2026. Il y aura sans doute de la progression interne parce que ce groupe est jeune. Mais il n’y a pas une superstar de demain comme Zion Williamson ou Ja Morant. Surtout que cette évolution et ce retour probable en playoffs aura un prix : il faudra prolonger Sabonis et Barnes assez grassement. Les principaux free agents ne feront sans doute pas non plus de Sacramento une destination privilégiée. Du coup, les Kings ne viseront peut-être pas plus qu’un premier ou un second tour de playoffs. Mais à ce stade, vraiment, peu importe. Les supporters ont tellement souffert par le passé qu’ils préfèrent se concentrer sur le présent, le savourer, sans trop penser au futur. Laissons-les mettre le feu et allumer le laser.