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Coupe du monde biathlon, Pokljuka - Fourcade, Johannes Boe : Et maintenant, c'est qui le patron ?

Julien Chesnais

Mis à jour 23/01/2020 à 12:29 GMT+1

COUPE DU MONDE - Inarrêtable depuis janvier, Martin Fourcade retrouve Johannes Boe ce jeudi lors de l'individuel (20km) de Pokljuka. Le Français est redevenu le patron en l’absence de son grand rival. Peut-il le rester malgré le retour du Norvégien ? C’est la grande question qui donne une saveur toute particulière à l'étape slovène, dernier rendez-vous avant les Mondiaux.

Johannes Boe devant Martin Fourcade, à Ostersund - 7 décembre 2019

Crédit: Getty Images

On l'attendait plutôt à Antholz, mi-février, pour les Mondiaux. Ce sera finalement à Pokljuka, dès jeudi. Resté au côté de sa compagne pour l’accouchement de leur premier enfant, Gustav, né le 14 janvier avec quelques jours d’avance, Johannes Boe effectue son retour en Slovénie, à l’occasion du 20km. Il n’aura donc manqué que quatre courses individuelles au lieu de six. Une mise en retrait plus courte que prévue. Dix jours à peine. Ce qui n’a pas empêché le circuit de changer de visage, radicalement, pendant son congé paternité.
L’absence du tyran, vainqueur de cinq des sept premières courses de l’hiver, a coïncidé avec la réémergence d’un autre despote, Martin Fourcade. Les quatre courses disputées sans Johannes Boe sont toutes revenues au Français. Un 100% qui a permis au septuple vainqueur du gros globe de retrouver son si cher dossard jaune, chose assez improbable fin décembre vu ses difficultés affichées au Grand-Bornand. Dès lors, avec le retour du grand Norvégien, se pose cette brulânte question : et maintenant, de Fourcade ou Boe, qui sera le patron ?

Mazet : "Il a envie de reprendre là où il s’était arrêté"

Première inconnue : l’état de forme du Scandinave. Celui-ci aura passé un mois et un jour sans courir, la mass-start du Grand-Bornand s’étant déroulée le dimanche 22 décembre. C’est beaucoup. Les automatismes de la compétition ne se retrouvent pas si facilement après une telle pause. Et on imagine qu’avec la naissance de son premier enfant, sa tête n’était pas vraiment à aligner les cibles et les tours de ski. Mais Siegfried Mazet, son entraîneur français, l’assure à nos confrères du Parisien : "Il est en forme, il n’a pas rien fait pendant un mois. Il reste concentré sur ses objectifs. Il a envie de reprendre là où il s’était arrêté dans ses prestations et de revenir sur les autres qui ont profité de son absence."
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Martin Fourcade et Johannes Boe - 2017

Crédit: Getty Images

A son crédit, la fraîcheur sera de son côté tandis que Fourcade et les autres pourraient commencer à accuser le coup après avoir enchaîné Oberhof et Ruhpolding. "Johannes aura eu la chance de se reposer en ce début de mois de janvier, pointait le Français sur la Chaîne L’Equipe. Et j’imagine le surplus d’énergie de devenir papa." Le Catalan, père de deux filles, parle en connaissance de cause.

"Une épée de Damoclès"

La deuxième inconnue de l’équation réside chez Fourcade, forcément. Il a fallu attendre l’absence de son rival pour le voir donner sa pleine mesure. Un paradoxe qu’il est facile d’imputer au mental. La semaine dernière, après la troisième de ses quatre victoires de janvier, sur le sprint de Ruhpolding, le Français a livré une partie de l’explication en décrivant la pression que parvenait à lui mettre Boe, notamment dans sa faculté à partir très vite dans le premier tour. De fait, courir sans lui s’apparentait à ne plus "avoir d’épée de Damoclès au-dessus de la tête".
Et sans celle-ci, comme par hasard, les balles sont sorties comme au plus beau jour. En 2020, son ratio derrière la carabine atteint 97,5%. Un sidérant bilan de 78 cibles blanchies sur 80, sachant que les deux récalcitrantes appartiennent à la mass-start d’Oberhof, disputée dans des conditions climatiques chaotiques. "Le fait que Johannes n’ait pas été là m’a permis en partie de retrouver cette confiance, m’a fait agir plus libéré et m’a fait passer ce cap, celui de me dire que je peux faire la différence, que je sais la faire, que je suis en maîtrise. A moi d’être assez bon pour conserver cette dynamique et continuer à être centré sur moi-même quand il reviendra."
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Martin Fourcade et Johannes Thingnes Boe en janvier 2018.

Crédit: Getty Images

Également épatant sur les skis (surtout à Ruhpolding), Fourcade estime que son niveau de performance de janvier relève de l’exceptionnel - "il est aussi anormal que cela pouvait l’être dans l’autre sens en décembre" - et qu’à cet égard, la dynamique peut retomber aussi vite qu’elle est arrivée. Boe ou pas dans les parages. "Honnêtement, qu’il soit là ou pas, ça ne change pas mon approche. Je prends du plaisir, je me bats sur les courses et j’ai envie de continuer dans cette démarche, disait-il dimanche, sur la Chaîne L’Equipe. Tout le monde s’attend à ce que la vérité du jour soit challengée par celle du lendemain. Et ce sera le cas, car ça reste du biathlon. Enchaîner un 60 sur 60 comme je l’ai fait à Ruhpolding, c’est joli sur le papier mais c’est très difficile à reproduire. Il faudra que l’équipe de France et moi, on arrive à conserver le même niveau de performance. Si on arrive à le faire, on lui donnera beaucoup de fil à retordre."

Leur duel n’a pas vraiment commencé

Bonne nouvelle pour Fourcade : le retour de Boe se fait à l’occasion d’une individuelle. Sur le papier, c’est pour le Français plus facile à appréhender. D’une part, l’épreuve sied mieux à ses qualités qu’à celles du Norvégien. La dernière course du genre, et la seule de la saison d’ailleurs, avait vu la victoire du premier tandis que le second connaissait son pire résultat de l’hiver (10e à Ostersund). De plus, Fourcade est en ce moment quasi-infaillible derrière la carabine, là où tout se joue sur un 20km.
Enfin, une individuelle, par essence, c’est l’épreuve où il faut rester concentré sur moi-même, sans se préoccuper ou presque de ses adversaires. Tout l’inverse d’un sprint, où l’importance d’un premier tour de ski (le gros points fort de Boe) est décuplée. Ainsi, à moins que Boe parte bien plus tôt que lui sur la start-list et réalise une démonstration dont le Français aurait forcément écho, les chances que Fourcade soit déstabilisé par le Norvégien sont moindres sur une épreuve pareille.
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Martin Fourcade et Johannes Boe lors du relais Ostersund le 7 décembre 2019

Crédit: Getty Images

Un autre paramètre rentre en compte. En faisant le plein en janvier, avec 240 points acquis sur 240 possibles, Martin Fourcade s’est offert un confortable matelas d’avance sur Johannes Boe, retombé au 4e rang mais toujours considéré comme le plus dangereux adversaire par le Français. La donne a changé en l’absence du Norvégien. Désormais, Fourcade a les cartes en main dans la course au globe. Il peut se permettre un loupé ou deux. A l’inverse de Boe, qui a déjà grillé ses deux jokers. Cela lui laisse de la marge de manoeuvre. Et donc une relative tranquillité d’esprit. Mais tout est encore jouable pour Boe. Seulement 11 épreuves ont eu lieu, il en reste encore 13. La mi-saison ne sera franchie qu’au soir de la mass-start de dimanche.
L’écart actuel entre les deux hommes est de 133 points. Ou plutôt 73, puisqu’il faudra retrancher les deux moins bons résultats à l’issue de la saison. Une broutille vu la domination de Boe en début de saison. Au soir de la mass-start du Grand-Bornand, avant sa pause, Boe comptait une avance de 107 points sur Fourcade. En sept épreuves à peine. Et vu qu’il en reste près du double d’ici la fin de saison… C’est simple, si le rapport de force entre les deux hommes revient aux standards précédant Noël, Boe finira l’hiver en jaune.
Dans le cas où il remporterait les 13 dernières épreuves de l’hiver, avec Fourcade deuxième à chaque fois, le général reviendrait au Norvégien, pour cinq petits points. Un scénario pas totalement insensé vu l’incroyable rythme de Boe depuis le début de l’hiver 2018 (66% de victoires, 21 épreuves sur 32). Pour finir, notons que de duel entre Boe et Fourcade, il n’y en a pas vraiment eu depuis le début de l’hiver. S’ils se sont partagés les victoires (cinq chacun), à l’exception du sprint du Grand-Bornand (Benedikt Doll), ils ne sont jamais montés ensemble sur la boîte. L’heure du vrai duel a peut-être enfin sonné.
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