Ouf, c'est le bronze !

Les biathlètes français ont l'art de jouer avec nos nerfs. Après Florence Baverel-Robert, inattendue médaillée d'or pour deux secondes sur le sprint et Vincent Defrasne auteur d'une dernière ligne droite d'anthologie face au mythique Bjoerndalen, c'est le relais qui a donné des sueurs froides aux supporters tricolores. Parti avec 13 secondes de retard sur Carl Johan Bergman après le dernier tir, Raphaël Poirée, est revenu au courage et avec rage pour entrer dans le stade, ski à ski avec le Suédois. Sur la dernière ligne droite, les deux hommes s'observent comme deux cyclistes à l'approche d'un sprint avant que le Suédois n'attaque en premier.

Surpris, Poirée perd quelques longueurs et semble battu. Transparent depuis le début de ces Jeux, le Drômois est bien parti pour faillir à sa mission. Mais Bergman perd l'équilibre sur les derniers mètres et les deux biathlètes jettent leurs skis en avant. Alors que les juges demandent la photo finish, Ferréol Cannard, Vincent Defrasne et Julien Robert se jettent sur Poirée, sûrs que cette médaille est pour eux. Les juges n'hésitent pas longtemps et pour moins de dix centimètres, la France monte sur le podium, comme à Salt Lake City en 2002.

Loin devant, l'Allemagne s'offre son quatrième titre en biathlon à Turin devant la Russie. Hormis un troisième relais moyen de Sven Fischer, les "Teutons flingueurs" ont pratiquement fait toute la course en tête. Michael Greis donnait bien quelques frayeurs aux siens en manquant plusieurs fois la dernière cible, mais l'avance du champion olympique du 20 km était telle qu'un tour de pénalité ne l'empêchait pas de s'offrir un deuxième titre en une semaine. Les Russes, réguliers et jamais lâchés, s'offraient eux la médaille d'argent.

La régularité, c'est peut être ce qui a manqué aux Français pour faire mieux... ou pour se faire moins peur en tout cas. Seul biathlète tricolore à ne pas avoir pioché, Julien Robert aurait pu lancer idéalement l'équipe. Mais moins à l'aise sur les skis, il passe le relais à Vincent Defrasne avec 53 secondes de retard sur l'Allemagne. Le champion olympique de poursuite ne parvient pas à refaire son retard et lorsque Ferréol Cannard s'élance, la France est toujours 6e. Censé être "le maillon faible de l'équipe", Cannard va alors faire une superbe course. Malgré une pioche, il profite de la défaillance de Fischer pour lancer Raphael Poirée dans des conditions idéales, à 40 secondes de l'or...

Dans la bagarre, comme il aime, Raphaël réalise un sans faute à son tir couché et repart avec seulement 17 secondes de retard sur Greis. Malheureusement, le Français rate complètement son tir debout et pioche trois fois pour repartir en quatrième position derrière le Suédois. "J'ai tout donné sur mon dernier tour parce que faire 4e c'était horrible pour moi, explique Poirée. Jusqu'à maintenant ce n'était pas ça pour moi. Partir sans médaille, ça aurait été vraiment dur" . Mais au bout du suspense, et au prix d'un effort intense, Raph' la tient sa médaille. "J'avais vraiment envie de descendre à Turin avec toute l'équipe pour la remise". Car en équipe, la récompense est toujours plus belle...