La plus belle d'Ivanov

Il en va de la bière comme du vin. Il y a des grands millésimes et des piquettes. Cette édition 2009 de l'Amstel Gold Race restera comme un tout petit cru, sauf pour son grand vainqueur, Serguei Ivanov (Katusha).Une course ennuyeuse, où les favoris ne se sont pratiquement jamais montrés, et un final peu emballant, à l'image de tout ce qui avait précédé. Surtout, il y a eu cette terrible chute de Frank Schleck et Matthew Lloyd à 70 kilomètres de l'arrivée, qui a fait redouter le pire pour les deux hommes (voir par ailleurs). Si les nouvelles sont finalement plus rassurantes que ce que les images avaient initialement fait craindre, la classique néerlandaise a bien failli tourner au drame.

Ce n'était décidément pas le jour de l'équipe Saxo Bank, dont les coureurs ont pourtant tout fait pour aller chercher la victoire pour l'ainé des Schleck. C'est même Andy Schleck, le petit frère, qui s'est projeté à l'avant dans le Kruisberg, l'une des 31 côtes du parcours, tournant sans cesse sur les routes étroites et ensoleillées du Limbourg néerlandais. Mais le Luxembourgeois n'a pas pu creuser l'écart dans une course à peine animée par l'échappée de six coureurs (Terpstra, Arashiro, Klimov, Timmer, Bertogliati, Bozic) lancée dès la première demi-heure.

C'est ensuite Karsten Kroon, toujours à l'aise sur ce terrain vallonné, qui a bien failli rafler la mise. Les rares attaques (de Roman Kreuziger notamment) se sont avérées infructueuses jusqu'au démarrage du grimpeur néerlandais Robert Gesink, aux 10 kilomètres, après l'escalade au train du Keutenberg, l'avant-dernière et principale difficulté, par un coéquipier de l'Italien Damiano Cunego, le vainqueur sortant. Serguei Ivanov, imité par le Néerlandais Karsten Kroon, a vu aussitôt l'ouverture derrière Gesink. Le trio s'est présenté dans Valkenburg avec quelques secondes d'avance à peine sur le premier peloton emmené par les hommes du Belge Philippe Gilbert.

Les favoris n'étaient alors qu'à une dizaine de secondes au pied du Cauberg, mais ils n'allaient plus revoir les trois hommes de tête. Gesink débordé au pied de la montée, la victoire s'est jouée entre Ivanov et Kroon avec avantage au champion de Russie qui avait fait de ce rendez-vous son principal objectif. En 2002, il avait été battu de justesse (photo-finish) par son coéquipier italien Michele Bartoli, lors de la dernière arrivée sur le plat à Maastricht. C'est la 5e fois qu'il termine dans le Top 10 de l'Amstel. "Je suis tellement fier. C'est ma course préférée et depuis dix ans j'ai toujours réussi de bonnes performances ici", a confié le Russe, qui décroche enfin à 34 ans la victoire majeure qu'il cherchait depuis si longtemps.

La victoire d'Ivanov, c'est donc celle d'un spécialiste, mais qui n'était pas davantage qu'un outsider au départ dimanche matin. L'apathie des favoris a servi ses desseins. Lui, au moins, a pris l'initiative et il en a été récompensé. Pour les Cunego et autres Valverde (un peu juste dès le Keutenberg), la Flèche Wallonne et Liège-Bastogne-Liège feront office de session de rattrapage cette semaine. Pour eux, cette Amstel gardera un goût amer.