Le Démare 2017, un très grand cru à bonifier sur le Tour

Cette année, il n'y a pour l'instant pas débat. Le meilleur sprinteur français, c'est bien Arnaud Démare et la course en ligne du championnat de France à Saint-Omer n'a fait que confirmer cette certitude. Depuis le début de la saison, le bolide de la FDJ a presque autant levé les bras que ses deux rivaux Bryan Coquard (Direct Energie, 5) et Nacer Bouhanni (Cofidis, 4) cumulés. Le Picard est d'ailleurs le deuxième sprinteur le plus performant de la saison derrière Marcel Kittel (Quick Step-Floors, 9). C'est dire le niveau de la saison réalisée par le Français.

Glaner huit succès en une seule année n'est déjà pas donné à tout le monde. En 2016, seulement quatorze coureurs avait autant levé les bras sur toute l'année. Alors imaginer telle performance fin juin ! Avec son début de saison, Arnaud Démare a déjà réalisé la deuxième meilleure année de sa carrière, à égalité avec 2013, remportant plus de succès en cinq mois que lors des saisons 2016 (4), 2015 (2) ou 2012 (6).

Même le voir avec déjà huit bouquets en poche au terme du mois de juin, c'est bien sûr inédit. Le Picard s'en était rapproché en 2014, sa saison référence jusqu'ici (14 victoires en tout dont le titre de champion de France), avec sept succès (+ 2 classements généraux) au terme du mois de juin. Sans jamais atteindre la barre des huit.

Mais toutes les victoires n'ont pas la même saveur. Bien sûr, son chef d’œuvre reste jusqu'ici son triomphe sur la Via Roma lors de Milan-Sanremo, en 2016. Sauf que son année 2017 est franchement impressionnante elle aussi. Que ce soit au niveau de la concurrence ou des épreuves. Car, contrairement à sa saison 2014, la plus riche en succès pour le moment, il a gagné au plus haut niveau. Bien sûr, il s'impose toujours sur des épreuves continentales. Rares sont les coureurs à n'évoluer qu'en World Tour toute la saison. Démare n'en fait pas partie mais cela ne l'a pas empêché de s'offrir une étape sur Paris-Nice et au Dauphiné.

Et, à chaque fois, le sprinteur de la FDJ a dominé du beau monde. En mars, s'il s’est imposé au sprint face à Alaphilippe (Quick Step-Floors) sur la 1re étape du Paris-Nice, c'est parce qu'il a auparavant été le seul des sprinteurs non piégés par les bordures à tenir le choc jusqu'au bout, alors que Kristoff, Kittel, Greipel ou Coquard ont lâché tour à tour. Déjà vaincu à deux reprises en février sur l'Etoile de Bessèges, Kristoff a souvent passé son temps dans la roue du Français dans les dernières lignes droites cette saison, comme ça sera encore le cas sur le 2e étape du Dauphiné, où Démare devance également Colbrelli, Bauhaus ou encore Boasson Hagen.

Rarement un Français aura été aussi régulier dans la victoire. On évoque souvent avec suspicion - et à tort - la régularité d'un Valverde qui gagne, soi-disant, de février à octobre. Mais que dire de celle d'Arnaud Démare en 2017 ? Bien sûr, le Français est un sprinteur et toute comparaison dans l'effort est inutile. Mais le Picard a gagné tout simplement lors de chaque mois depuis le début de la saison. Après l'Etoiles de Bessèges (2 étapes) en février et une étape de Paris-Nice en mars, le coureur de la FDJ s'est offert le GP de Denain en avril, une étape des Quatre Jours de Dunkerque en mai avant un gros mois de juin (Halle Ingooigem, championnat de France et étape au Dauphiné).

Même lorsque l'on s'intéresse au reste de sa saison, on s'aperçoit que Démare a franchi un cap dans la régularité. A chaque fois qu'il était attendu, il a répondu présent. Il suffit de regarder le retard cumulé sur les vainqueurs lors des classiques Kuurne-Bruxelles-Kuurne, Milan-Sanremo et Paris-Roubaix : 23'' simplement, en terminant 6e à chaque fois. Il ne pointe qu'à 6'' de Sagan sur la première, 5'' de Kwiatkowski sur la Via Roma où le Français était tenant du titre mais aussi à 12'' de Van Avermaet sur l'Enfer du Nord.

Malgré tout, difficile d'établir à l'heure où l'on parle que la saison d'Arnaud Démare est déjà réussie. Oui, le Français présente un bilan fantastique à cette période de l'année. Oui, il n'a jamais semblé aussi fort et régulier. Mais, à une semaine du départ du Tour de France, difficile d'imaginer une saison totalement accomplie pour le Picard s'il venait à passer au travers de la Grande Boucle, comme cela avait été le cas en 2014 (deux top 3) et surtout en 2015 (un seul top 5). D'autant que, cette fois, l'équipe sera construite autour de lui, comme lors de chaque course disputée depuis le début de l'année.

Privé d'équipiers en 2014 et 2015 pour cause de classement général visé par Thibaut Pinot, privé carrément de Tour de France l'an passé pour la même raison, Arnaud Démare aura cette fois les coudées franches après le Giro couru par le grimpeur de la FDJ. Avec la présence à ses côtés de ses poissons pilotes Guarnieri et Cimolai ou encore de Delage, le sprinteur français n'aura cette fois pas d'excuse. Mais, cette saison, il n'en a pas besoin. Il brille, il fonce, il gagne. Voilà onze ans désormais que la France ne s'est plus imposée au sprint sur le Tour de France. Jimmy Casper, vainqueur en 2006 à Strasbourg, attend toujours son successeur. Et Arnaud Démare pourrait bien l'être dès cette année.