Faut-il s'inquiéter pour Tadej Pogacar à dix semaines du Tour ? Sa chute en questions

ParSimon Farvacque

Mis à jour 23/04/2023 à 21:15 GMT+2

Tadej Pogacar a peut-être perdu plus qu'une course, ce dimanche. Il a chuté lors d'un Liège-Bastogne-Liège remporté par Remco Evenepoel et a été contraint à l'abandon. Victime notamment d'une fracture du scaphoïde gauche, le lauréat des éditions 2020 et 2021 du Tour de France dispose de dix semaines pour se remettre d'aplomb en vue de la Grande Boucle. A quel point est-ce un défi de taille ?

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Comment Pogacar est-il tombé ?

Avant même les images du direct, Liège-Bastogne-Liège a pris une tournure différente de celle attendue, dimanche. Tadej Pogacar est tombé et a abandonné, après peu ou prou deux heures de course, longtemps avant que Remco Evenepoel ne s'envole vers la victoire.

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"Une double crevaison de Mikkel Honoré (coureur d'EF-Education-EasyPost, qui a aussi dû abandonner, ndlr) a causé cette chute", selon Mauro Gianetti, le directeur d'UAE Emirates. Interrogé par RMC Sport, ce dernier a raconté dans la soirée que Pogacar avait eu "extrêmement peur", à "70 km/h".

Quel est le détail de ses blessures ?

"Tadej (Pogacar) souffre de fractures au scaphoïde gauche et de l'os semi-lunaire (de la main gauche). Le scaphoïde nécessitera une opération", a informé la formation émiratie, citant son directeur médical, Adrian Rotunno.

Le communiqué d'UAE Emirates mentionnait une opération "cet après-midi (dimanche) par un chirurgien spécialiste de la main ici à Genk." Gianetti a depuis confirmé, dans l'entretien accordé à nos confrères, que l'opération s'était "bien passée".

Combien de temps risque-t-il d'être "out" ?

Les premières informations d'UAE :

"Il ne va pas monter sur le vélo pendant au moins quatre semaines", a déclaré Gianetti, pour qui "cela va ralentir" la préparation de Pogacar au Tour de France, sans donc remettre en cause sa participation à l'événement.

L'avis du médecin d'AG2R Citroën :

"Si on fait un traitement fonctionnel, il faut trois mois au minimum pour récupérer, alors qu’avec une chirurgie, on est à quatre semaines d’immobilisation et deux de rééducation. Il n’y aura aucun souci pour le Tour de France", considère Serge Niamke, responsable médical d'AG2R Citroën, dans des propos rapportés par RMC Sport.

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Des exemples récents :

On peut évoquer, de manière non-exhaustive, le cas de deux coureurs Français. En mai 2020, Arnaud Démare s'était fracturé le scaphoïde gauche. "Une immobilisation du poignet de 6 semaines sera effectuée mais une reprise sur route avec une orthèse moulée et adaptée à mon guidon est prévue d'ici 10-15 jours", annonçait-il alors. Il avait repris, au cœur d'une saison perturbée par la crise sanitaire, lors du Tour de Burgos, deux mois et demi plus tard.

Pierre Latour, lui aussi victime d'une fracture du scaphoïde gauche, avait quant à lui manqué un peu plus de trois mois de compétition en 2019, mais il souffrait également du radius gauche et du coude droit, et le premier diagnostic était une absence de deux mois.

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L'avis de nos consultants :

"Un scaphoïde, ça peut aller jusqu'à deux mois, estime notre consultante Audrey Cordon-Ragot, sur le plateau des Rois de la Pédale. Mais ce n'est pas deux mois sans faire de sport, c’est deux mois avant de refaire du vélo sur la route… et encore, je pense qu'il est extrêmement bien suivi, avec des spécialistes de la main qui vont s'occuper de lui."

"On est à dix semaines du départ du Tour de France (1er-23 juillet, ndlr). Un poignet, ça peut être six semaines immobilisé… on peut être inquiets, malgré tout, poursuit David Moncoutié. C'est la première grosse chute/blessure de sa carrière. Ce n'est pas aussi grave que pour Egan Bernal ou Chris Froome. Il reviendra, c'est sûr, mais pour le Tour, le délai peut être juste."

"Il est encore un peu tôt (pour parler d'un possible impact sur la préparation de Tadej Pogacar au Tour de France, ndlr), on parle d'une fracture multiple, donc il faut voir l'envergure de la blessure", note quant à lui prudemment Philippe Gilbert, soucieux comme ses deux acolytes de ne pas outrepasser son domaine de compétences.

En revanche, si le risque est hypothétique, il s'étend sur le long terme à ses yeux : "J'ai peur que cela entraîne une certaine raideur et que ça se répercute au niveau de l'épaule etc. (…) Ça peut être grave pour la suite de sa carrière. Ce genre de chute, si ça ne guérit pas bien, on doit changer sa position, adapter le reste du corps. Cela peut dérégler la machine, et à ce niveau-là, 1% ou 2% en moins, ça peut être un gros changement."

La chute… que Pogacar a évitée de peu

Quel était son programme jusqu'au Tour ?

L'avantage, pour Pogacar, réside dans le temps de repos qu'il comptait prendre, indépendamment de cet incident. Le prodige slovène envisageait de ne plus courir jusqu'au 14 juin prochain, à l'occasion de son tour national (14-18/06), qui devait lancer son deuxième gros bloc de la saison.

La course, dont il est double tenant du titre, était censée être son unique préparation au Tour de France, en termes de compétition. S'il parvient à s'aligner sur ce Tour de Slovénie, ce sera donc un moindre mal. Cordon-Ragot avance même, en guise de motif d'espoir : "N'est-ce pas un mal pour un bien ? On dit souvent qu'au retour d'une chute, d'un repos forcé, on est encore meilleur, encore plus frais."