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Campagne des classiques 2024 : Un ennui prodigieux

Simon Farvacque

Mis à jour 23/04/2024 à 09:48 GMT+2

Dans leurs royaumes respectifs – aux frontières poreuses tant leur talent est protéiforme –, Mathieu Van der Poel et Tadej Pogacar ont soumis la campagne de classiques 2024 au joug de la monotonie. Avec eux, gouverner, c'est (souvent) choisir quand tuer le semblant de suspense. Comme "Pogi" l'a fait dimanche à 34km de l'arrivée de Liège-Bastogne-Liège. Mais ce constat est en partie circonstanciel.

Grand froid au départ, carambolage et l'éclair Pogacar : le résumé de la course

Vous ne pourrez pas accuser Philippe Gilbert d'entretenir un suspense factice, pour leurrer les abonnés d'Eurosport. "C'est fini. Quand il part comme ça, il n'y a rien à faire", a prévenu notre consultant, dimanche, lorsque Tadej Pogacar est passé seul au sommet de la côte de la Redoute, avec une dizaine de secondes d'avance sur ses premiers poursuivants et encore 34 bornes à parcourir. Cela n'a pas loupé : le Slovène a gagné Liège-Bastogne-Liège avec 1'39" de marge sur Romain Bardet (2e).
Le solo de "Pogi" a semblé presque modeste, eu égard à ce qu'il a réalisé début mars lors des Strade Bianche, avec 81 kilomètres en tête, sans compagnon d'escapade. Entretemps – hormis Milan-Sanremo, qui est restée fidèle à sa réputation avec un finish explosif – les principales courses d'un jour ont souffert de démonstrations de force implacables. Mathieu Van der Poel a ainsi écrabouillé la concurrence lors du Tour des Flandres et de Paris-Roubaix, sans que cela ne suscite de surprise.
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Une attaque tranchante dans la Redoute et Pogacar file vers la victoire

Terrains de jeu plus ou moins communs

D'où le sentiment d'avoir vécu une campagne de classiques printanières 2024 aussi majestueuse, par le pedigree et la classe des lauréats, que soporifique, par la façon dont ils ont tout dicté, dans les moments clés. Se pencher sur la chasse aux accessits pendant la dernière heure de course doit rester un événement rarissime, pour que l'ennui ne nous gagne pas. Et celui-ci a donc marqué des points lors des trois derniers Monuments, donnant un certain charme aux épreuves de moindre envergure.
Le relatif problème est identifié : les monstres du peloton doivent rentrer en collision pour que leur splendeur n'égratigne pas le suspense, facteur majeur des grands moments de sport. Dimanche, on a fébrilement pu s'accrocher à la perspective d'un Van der Poel de gala, capable de rivaliser avec "Pogi" malgré le coup de pédale de grimpeur imposé par la Doyenne. Il n'en a rien été, même si le champion du monde n'a pas démérité (3e). Quant au Ronde, où Pogacar lui a déjà damé le pion : niet, le Slovène avait fait l'impasse.
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"Quelle relance !" : Van der Poel avale un terrible faux plat

Quand aucune planète ne s'aligne…

Comme si rien n'était fait, cette année, pour nous offrir des joutes homériques ailleurs que sur les deux versants du Poggio. Les absences sur blessure de Wout van Aert, pour Roubaix et le Tour des Flandres, et de Remco Evenepoel – voire Primoz Roglic –, pour Liège, nous laissent sur notre faim. "WVA" a certes été impuissant face à "MVDP", lors du Grand Prix E3, mais il convient de rappeler qu'il y a un an, seul un incident mécanique lui avait fait perdre le contact dans le Carrefour de l'Arbre, à 15km du vélodrome roubaisien.
Evenepoel, quant à lui, n'a jamais pu se mesurer à Pogacar sur "LBL", course qu'il a remportée deux fois de suite (2022 et 2023), procédant peu ou prou de la même manière que le leader d'UAE Emirates, en suscitant cependant moins de résignation chez la concurrence. On peut imaginer les deux hommes se livrer bataille l'année prochaine, en s'isolant dans la Redoute, sans faire preuve d'une candeur risible.
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2022 vs 2023 : les attaques d'Evenepoel dans la Redoute

Reste l'impression que Mathieu Van der Poel et Tadej Pogacar – dont on fantasme sur l'éventuel "pari Roubaix" – ont franchi un cap décisif. Leurs rivaux peuvent craindre qu'ils arrivent seulement à maturité et que le niveau auquel ils évoluent soit leur nouveau plancher, pour quelques années. Mais ils peuvent aussi espérer que ces deux prodiges soient dans la forme de leur vie, avec la fugacité que cela implique. Pour l'intérêt des premiers dimanches du printemps, cela aurait un côté réconfortant.
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Si précoce mais "à maturité tardive" : Pogacar, néo-marathonien

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