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Milan - Sanremo, la course de la Saint-Joseph

Béatrice Houchard

Mis à jour 17/03/2022 à 17:38 GMT+1

MILAN – SANREMO - Samedi, hasard du calendrier, le premier Monument du printemps cycliste va se dérouler le 19 mars. Soit le jour de la Saint-Joseph, ce qui fut très longtemps une tradition pour la Primavera, avant qu'elle ne soit abandonnée pour fixer la course le troisième samedi de mars. Le prix de la modernité et de la télévision.

Le peloton de Milan-Sanremo

Crédit: Getty Images

Chaque course cycliste possède sa tradition, parfois son surnom et toujours l’imaginaire que chacun place en elle, bien au chaud dans ses souvenirs, avec parfois (souvent !) la mémoire qui joue quelques tours à la réalité.
Paris-Nice est "la course au soleil", souvent frappée par le froid, voire perturbée par la neige. Paris-Tours, c'est "la course aux feuilles mortes", sous-titre que lui dispute le Tour de Lombardie. Paris-Roubaix, devenu "l'Enfer du Nord" en 1919 pour des raisons non cyclistes, évoque aussi le dimanche des Rameaux ou celui de Pâques, comme ce sera le cas pour l'édition 2022, entre deux dimanches d’élection. Liège-Bastogne-Liège, née en 1892, est tout naturellement "la Doyenne". Quant à Milan-San Remo, elle fut longtemps la course de la Saint-Joseph, également appelée "Primavera" ou "classicissima". Aujourd’hui, la course de 298 kilomètres est l'un des cinq "Monuments". Avec un tel nom, tout est dit.
Dans ma mémoire, l'arrivée sur la Via Roma correspondait toujours avec la Saint-Joseph. Pas n'importe quel saint, ce Joseph, époux de Marie, la mère de Jésus pour les chrétiens. La chrétienne Italie pouvait donc le chérir en même temps que Gino Bartali (4 victoires), Fausto Coppi (3) et surtout Costante Girardengo (6 victoires). Pourtant, la Saint- Joseph n’y a jamais été fériée alors qu’elle l’est au Lichtenstein, en Colombie, dans certains cantons ou communes catholiques d’Autriche et de Suisse, comme Grisons, Lucerne, Soleure ou Zoug. Ce qui avait dû faire plaisir à Erich Machler (1987) et Fabian Cancellara (2008).
Jusqu'en 1962, la Saint-Joseph était même classée fête de "première classe" pour les catholiques. Le saint patron des charpentiers (le métier du père de Jean Robic, 7e de la course en 1953) a hérité cette date du 19 mars depuis, semble-t-il, le Xe siècle, et il a échappé au grand remue-ménage intervenu dans le calendrier des saints en 1969 (Merckx vainqueur devant Roger de Vlaeminck à San Remo), Gabriel passant du 18 mars au 29 septembre, Christophe du 25 juillet au 21 août et Béatrice du 18 janvier au 13 février, des jours sans course cycliste.
Mais on peut aussi fêter Joseph le 1er mai en tant que patron des "travailleuses, travailleurs" et les conférences épiscopales peuvent aussi, si elles le souhaitent, à une date qui ne tombe pas pendant le Carême. Qu'elles s’en gardent bien !
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Milan-Sanremo

Crédit: AFP

Les exigences du calendrier cycliste et des retransmissions télévisées

C'est donc cette tradition de la Saint- Joseph, intangible entre 1935 et 1953 et très forte ensuite, qui fit se promener Milan-San Remo d'un jour à l’autre de la semaine. On pouvait, en début de saison, chercher "quel jour tombe Milan San Remo", comme les amateurs de ponts se demandent en début d'année quand tombent le 1er mai et le 15 août. Puis les exigences du calendrier cycliste international et des retransmissions télévisées ont opté pour un jour fixe. Désormais, c'est donc le troisième samedi de mars, aussi sûr que l'Ascension tombe un jeudi et Noël le 25 décembre. Milan-San Remo et la Saint-Joseph ne s'accouplent plus qu'au hasard des années. Ce sera le cas en 2022.
Certains vainqueurs ont eu droit à la Saint-Joseph, comme Michele Dancelli et les larmes qu'il ne parvenait pas à contenir, en 1970, après dix-sept ans de disette italienne ; d'autres pas, comme Raymond Poulidor le 18 mars 1961, Laurent Jalabert le 18 mars 1995 et Marc Gomez le 20 mars 1982. Erik Zabel a réussi à gagner quatre fois mais jamais à la Saint-Joseph. Laurent Fignon y a eu droit une fois sur deux et Eddy Merckx quatre fois sur sept.

Démare, dernier vainqueur à la Saint-Joseph

Heureusement, il se trouve toujours un autre bon saint pour veiller à la victoire : Saint-Victorien le 23 mars pour Julian Alaphilippe en 2019, Saint-Patrice pour Vincenzo Nibali en 2018, Saint-Cyrille (qui n’était pas Guimard) pour Michal Kwiatkowski en 2017 ou Sainte-Léa pour John Degenkolb en 2015. Quand Milan San Remo tombe le 20 mars, comme en 2021 pour Jaspers Stuyven, on hésite entre Sainte-Alexandra, Saint-Herbert et, tout simplement, le printemps.
Le dernier vainqueur un jour de Saint-Joseph s’appelle Arnaud Démare. C’était en 2016. Avant lui, un autre Français avait même eu une chance : Joseph Groussard, célébrant sa propre fête en 1963 comme avant lui Joseph Demuysère, un Belge venant s’intercaler dans un palmarès de trente-deux victoires italiennes entre 1914 à 1950 ; et après lui Giuseppe Saronni, vainqueur en 1983 après trois deuxièmes places en 1978, 79 et 80.
Mais la date la plus originale pour Milan-Remo, conquise pour sa première édition le 14 avril 1907 (Saint-Maxime) par Lucien Petit-Breton, fut sans conteste celle qui offrit la victoire à Wout Van Aert, le 8 août 2020, jour de la Saint-Dominique. Saint-Covid était passé par là.

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