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Nic Dlamini, ou le parcours unique d'un enfant des ghettos du Cap

Benoît Vittek

Mis à jour 27/09/2018 à 16:05 GMT+2

MONDIAUX D'INNSBRUCK - À 23 ans, Nicholas Dlamini a répondu à "l'invitation" de la fédération sud-africaine quand nombre de ses aînés font l'impasse sur ces Championnats du monde. Une nouvelle étape dans le parcours hors normes, qui l'a mené des townships au Tyrol. Portrait.

Nicholas Dlamini (Team Dimension Data) lors du Tour Down Under 2018

Crédit: Getty Images

Il y a toujours une raison de remarquer Nic Dlamini dans un peloton. Dès sa première course World Tour, le Down Under en début d'année, le gamin qui arpentait routes défoncées de townships et monts spectaculaires autour du Cap s'est consacré meilleur grimpeur de l'épreuve. Il avait déjà fait de même sur le Girobio (le Tour d'Italie pour les moins de 23 ans) en 2017 et a récemment récidivé sur le Tour de Grande Bretagne. Le talent de 23 ans issu du vivier africain de Dimension Data fait feu de toute offensive en attendant, espère-t-il, d'imposer ses talents de puncheur sur les plus grandes scènes cyclistes, de la Flèche wallonne au Tour de Lombardie en passant par les routes du Tour de France.
Dimanche, lors de la course en ligne à Innsbruck, il sera également facile de repérer Dlamini au sein du peloton. Il est le seul avec Jacques Janse Van Rensburg à avoir répondu à "l'invitation" payante de la fédération de cyclisme sud-africaine, vivement critiquée pour demander à ses coureurs de financer eux-mêmes leur participation aux Mondiaux.
Avec l'appui de Doug Ryder, fondateur de l'équipe Dimension Data et grand promoteur du cyclisme africain, Dlamini y a vu une "chance" de plus à saisir dans un parcours qui lui fait dire que "le cyclisme peut changer un destin". Le voilà donc passé en quelques années d'un quartier pauvre (et réputé pour sa violence, les trafics en tous genres et la prévalence du sida) en périphérie du Cap aux paisibles et prospères montagnes autrichiennes.
C'est dingue, tu es à côté de tous ces gars que tu regardais à la télé, comme Nibali
Ses débuts cyclistes l'ont mené vers l'Italie et il vit désormais en Toscane. Mais "Capricorn Park, c'est toujours chez moi", expliquait-il lorsque je l'ai rencontré sur le Tour d'Oman. À l'époque, ce jeune Sud-Africain m'était relativement inconnu hormis la recommandation d'un collègue de Dimension Data, avec qui je collabore sur le projet "letourdata" : "Ce garçon a une histoire incroyable, il faut absolument que tu lui parles !"
S'en était suivi un échange engageant de trois quarts d'heure au cours desquels Dlamini évoquait ses débuts ("lors de mes premières courses, je me disais : 'C'est dingue, tu es à côté de tous ces gars que tu regardais à la télé, comme Nibali'.") ; ses ambitions, notamment hors du vélo ("je veux offrir à ma mère une maison dans un meilleur environnement" et "j'aimerais aider les jeunes de Capricorn Park avec un centre pour développer leurs talents, que ce soit dans le sport ou les arts") ; ou encore sa situation d'Africain, noir, qui a grandi sans père dans un township, autant d'éléments qui ne le destinaient pas vraiment aux pelotons professionnels.
"Sans le vélo, je pense que je serais comme les mecs avec qui j'ai grandi", explique-t-il encore. "Ils prennent des drogues, et toutes ces choses."

Les conseils de Stephen Roche et la complicité de Ben Swift

"J'avais un pote qui faisait du vélo et ça me fascinait", explique Dlamini, qui a d'abord pratiqué la course à pied, comme sa soeur jumelle. "On manquait d'équipement mais j'aimais l'idée d'aller d'un point à l'autre en profitant des paysages." Le duo explore notamment Table Mountain, un plateau rocheux offrant une faune et une flore uniques, ainsi qu'une vue spectaculaire sur la baie du Cap. Les yeux de Dlamini brillent encore à l'évocation de ces souvenirs, décisifs dans son parcours en tant qu'homme et aussi cycliste.
William Clarke (Education First-Drapac rider) et Nicholas Dlamini (Team Dimension Data) lors du Tour Down Under 2018
Après avoir arpenté les routes de Table Mountain avec son ami, le jeune Sud-africain a également l'opportunité de les partager avec le Britannique Ben Swift (13 victoires pro, monté deux fois sur le podium de Milan - Sanremo). "On a souvent roulé ensemble", raconte Dlamini, "et il essayait de me lâcher dans les montées. Je serrais les dents et je tenais bon. Il m'a toujours assuré que je pourrais être un bon coureur."
Sur ses routes, Dlamini attire également l'attention de Stephen Roche - "Il était venu sur une course amateur (la Cape Rouleur, en 2013) et m'avait dit de persévérer" - et les louanges de Bernhard Eisel, séduit par le tempérament et impressionné par l'explosivité du jeune Sud-Africain. Déjà à l'époque, il y avait de bonnes raisons de remarquer Nic Dlamini sur son vélo.
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