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Les Strade Bianche, le sixième Monument

Jean-Baptiste Duluc

Mis à jour 09/03/2019 à 11:03 GMT+1

STRADE BIANCHE – Alors qu’elle ne fêtera en 2019 que sa 13e édition, l’épreuve toscane est déjà rentrée dans la légende du cyclisme de par son parcours, unique en World Tour, mais surtout par la passion qu’elle suscite chez coureurs et spectateurs. Au point de la considérer – déjà - comme le sixième monument de la saison.

Le peloton sur les "routes blanches" lors des Strade Bianche 2018

Crédit: Getty Images

"Ça peut vraiment devenir un monument du cyclisme". La première impression livrée par Warren Barguil au Monde après son unique participation (8e) en 2014 sera peut-être prémonitoire. Ou pas. Mais elle témoigne surtout de l’effet des Strade Bianche sur les coureurs qui ont le courage de s’y frotter. Personne n’en ressort indemne et rares sont ceux qui ne l’évoquent pas avec passion et enthousiasme. Pourtant, à sa création en 2007, peu imaginaient un tel succès de l’épreuve. D’abord classée en 1.1 sous le nom de Monte Paschi Eroica puis Monte Paschi Strade Bianche, la classique toscane, depuis 2012 sous sa dénomination actuelle, n’a cessé de gravir les échelons, passant en 1.HC en 2015 avant d’acquérir dès 2017 son statut de World Tour. Une évolution indispensable pour coller à son réel statut, passé d’inconnue à incontournable en seulement dix ans.
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Zdenek Stybar (Quick Step-Floors), Greg Van Avermaet (BMC) et Tim Wellens (Lotto-Soudal) lors des Strade Bianche 2017

Crédit: Getty Images

Il faut dire que les Strade Bianche ont aujourd’hui tout pour sortir de l’ordinaire du cyclisme moderne. Ses 184 kilomètres (sur l’édition 2019) apparaissent comme une fenêtre vers le passé, un retour au cyclisme à l’ancienne, baigné par l’incertitude. Avec pas moins de 63 kilomètres de "routes blanches", c’est un tiers du parcours qui n’est pas goudronné. Un parcours qui paraitrait presque irréel. Invité à la reconnaissance lors de la première édition, Daniele Bennati, qui vivait pourtant à Arezzo à 70km de Sienne, n’en avait pas cru ses yeux : "On a vraiment l’impression d’un bond dans le passé, avouait-il. Je ne pensais pas qu’il existait encore des routes comme ça, où tu ne vois que des tracteurs de temps à autre." Et maintenant de plus en plus de cyclistes.

Merci au Giro 2010 !

La faute à cette classique venue d’une autre époque pour permettre au cyclisme de retrouver le temps d’une course ses valeurs d’antan. "Le cyclisme a besoin de quelque chose de nouveau et les coureurs de motivation, expliquait lors de la présentation officielle de la 1re édition Angelo Zomegnan, alors directeur des évènements pour RCS Sport. Et cette course est unique et spéciale". C’est en effet une des rares courses de la saison où les cadors du peloton n’hésitent pas à se lancer de très (très) loin, à l’image de l’édition 2018 où Bardet, Benoot et Valverde avaient lancé les hostilités à plus de 50km de l’arrivée.
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2010 Giro d'Italia Cadel Evans Alexandre Vinokourov

Crédit: AFP

Mais les Strade Bianche n’auraient sans doute jamais eu cet élan de popularité sans la 7e étape du Giro 2010. Ce 15 mai, dans des conditions climatiques apocalyptiques, le Tour d’Italie nous a offert une de ses plus belles étapes sur les routes blanches de Toscane. Une journée considérée comme l’une des plus exigeantes de l’histoire, où le porteur du maillot rose Vincenzo Nibali était tombé, laissant la tunique de leader à Alexandre Vinokourov alors que Cadel Evans, maillot arc-en-ciel de champion du monde sur le dos, remportait l’étape. Des images dingues de coureurs maculés de boue, transis de froid, et une course complètement débridée entre les favoris du général qui auront marqué les esprits et offert aux Strade un merveilleux coup de projecteur.

Une histoire à écrire

Pourtant, déjà en 2010, alors même que l’épreuve n’était pas encore au programme du calendrier principal, les têtes d’affiche étaient nombreuses. Son palmarès en est d’ailleurs la preuve. Que ce soit Alexandr Kolobnev (5e de la Flèche 2003), Fabian Cancellara (vainqueur de Paris-Roubaix 2006) en 2008 et même Thomas Lövkvist (3e de Tirreno 2008) en 2009, ce ne sont que des cadors qui s’imposaient à Sienne. Et la tendance n’a fait que s’accentuer au fils des années avec des vainqueurs nommés Philippe Gilbert (2011), Michal Kwiatkowski (2014, 2017), Zdenek Stybar (2015), ou encore Tiesj Benoot (2018) mais aussi des Alejandro Valverde, Peter Sagan, Greg Van Avermaet ou Vincenzo Nibali en animateurs. A force d’attirer les meilleurs classicmen, les Strade Bianche ont fini par inciter d’autres grands noms à venir se joindre à la grande fête toscane. C’est ainsi que l’an passé des coureurs de Grands Tours comme Romain Bardet (2e), Tom Dumoulin (20e) ou Primoz Roglic (48e) et même des sprinteurs comme Fernando Gaviria (49e) étaient présents.
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Romain Bardet (AG2R La Mondiale) et Wout Van Aert (Verandas Willems-Crelan) encadrent Tiesj Benoot (Lotto-Soudal) sur le podium des Strade Bianche 2018

Crédit: Getty Images

Les Strade Bianche font partie des courses que tout cycliste rêve d’avoir à son palmarès, au même titre qu’un Grand Tour ou un Monument. "Ce n’est pas une course normale, avec juste une route et une arrivée, s’enthousiasmait Barguil dans les colonnes du Monde. Les Strade Bianche, c'est mythique." Quand bien même il soit encore loin – et proche à la fois - de pouvoir prétendre à un tel statut. Après tout, l’épreuve toscane a clairement le parcours (quoi qu’un peu court), la renommée, les moyens et - surtout – l’importance auprès des coureurs pour espérer le devenir. Mais elle n’a pas l’histoire pour côtoyer les cinq Monuments actuels, avec seulement douze années d’existence contre plus d’un siècle pour Milan-SanRemo, le Tour des Flandres, Paris-Roubaix, Liège-Bastogne-Liège ou le Tour de Lombardie. Seul le temps pourra lui permettre de se forger une telle histoire et, pourquoi pas, de les rejoindre au panthéon des classiques. Mais les Strade Bianche sont aujourd’hui bien seules à leur niveau. Une sorte de 6e monument, unique jusque dans son statut.
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