Vuelta 2023 | Sepp Kuss ne veut pas de cadeaux : "Je veux savoir que j'ai vraiment gagné la course"

La Vuelta se jouera-t-elle à coup de secondes ? Jonas Vingegaard n'y croyait pas sur le dernier Tour de France quand Tadej Pogacar lui faisait la guerre des sprints bonus, mais que pense-t-il sur le dernier grand tour de la saison ? Sepp Kuss a son avis sur la question et son sprint en haut de l'Angliru pour quatre secondes prouve qu'il préfère se prémunir d'un sacre final qui lui échapperait pour trois fois rien. L'Américain est, jusqu'à preuve du contraire, le leader de la Vuelta mais il n'a pas toutes les cartes en main.

Quand son équipe Jumbo-Visma lui avait donné le champ libre vers Javalambre en première semaine, on souriait à voir cet équipier de toujours lever les bras et surtout être leader d'un grand tour. Leader, Kuss, malgré un talent certain en haute montagne, n'a jamais voulu l'être, rejetant toujours les projections à la suite de grands tours où il fut invariablement le meilleur des "autres" en altitude. Son avance sur le reste de la meute, et notamment sur ses patrons, Primoz Roglic et Jonas Vingegaard, ne lui permettaient pas de rêver, pensait-on. Grave erreur.

Deux semaines auront bientôt passé et Kuss est toujours en rouge. Oui, il a perdu du temps au Tourmalet, oui encore vers Bejes et une nouvelle fois à l'Angliru, ce mercredi où il n'a pu résister au tempo d'enfer de Roglic sur des pentes effrayantes. "Aujourd'hui, je pensais avoir les jambes pour gagner et pourtant il y avait trois gars plus forts que moi : Roglic, Vingegaard et Landa, avouait-il à l'arrivée. C'est une montée très dure, très raide, et il n'y a pas de place pour beaucoup de tactiques. Primoz a attaqué, il a mis un rythme très soutenu, j'ai voulu tenir jusqu'au bout, mais je n'ai pas pu."

Son orgueil, et peut-être les encouragements de Roglic qui l'a enjoint à ne rien lâcher, lui ont permis de garder son beau maillot pour huit secondes. Avance dérisoire semble-t-il devant la force de Jonas Vingegaard dans cette troisième semaine. "Le plus fort doit l'emporter, souffle-t-il. Ce n'est pas une compétition entre nous. Il y a une bonne ambiance, pour moi ce sont des amis." Son compère danois a d'ailleurs glissé qu'il adorerait le voir remporter la Vuelta. "Pour moi, c'est peut-être la seule opportunité de gagner une grande course et c'est quelque chose de très spécial, poursuit Kuss. Mais je veux bien faire et savoir que j’ai vraiment gagné la course".

Voilà le nœud du problème. Évidemment, Sepp Kuss veut remporter l'ultime grand tour de la saison mais en aucun cas il ne souhaite qu'on lui offre pour services rendus à la patrie Jumbo-Visma. Tout ce beau monde se sait dans une situation schizophrène où les intérêts s'entrechoquent. "La situation est bonne pour moi mais nous devons en parler entre nous", a d'ailleurs mystérieusement confié le leader du Tour d'Espagne alors que le plan semble clair : le meilleur l'emportera.

Peut-il être cet homme ? A l'évidence non. Si Vingegaard veut gagner la Vuelta, ce ne sont pas ces huit secondes d'écart qui l'en empêcheront. "Demain (jeudi) sera une étape que nous devons respecter. Plein de choses peuvent arriver", dit-il enfin. C'est vrai mais vers La Cruz de Linares, ce sont surtout les jambes qui vont parler. S'il ne veut pas de cadeaux, Sepp Kuss a intérêt à ce qu'elles soient au rendez-vous.