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Il était une fois le Tour

Eurosport
ParEurosport

Publié 09/07/2009 à 13:45 GMT+2

Chaque jour, découvrez ou redécouvrez une grande page de l'histoire du Tour. Jeudi, retour sur l'un des plus grands grimpeurs de l'histoire du cyclisme, Federico Bahamontes. L'arrivée de la Grande Boucle à Barcelone est l'occasion de saluer le 50e anniversaire de la victoire de l'Aigle de Tolède.

Les surnoms ne font pas tout. Mais quand ils épousent l'image ou la personnalité d'un champion, ils peuvent vous coller à la peau pour l'éternité. Prenez Federico Bahamontes. L'Aigle de Tolède. Une dénomination propre à vous figer un coureur dans la légende, à frapper l'imaginaire. A l'évocation du nom de Bahamontès, et plus encore de son surnom, on imagine un grimpeur majestueux, inaccessible. Dans ses grands jours, le Castillan, l'était effectivement, comme en ce Tour de France 1959, qui allait marquer l'apogée de sa carrière, en même temps que la première victoire d'un Espagnol à Paris. 50 ans plus tard, la Grande Boucle entre en Espagne ce jeudi. L'occasion était trop belle de se replonger un demi-siècle en arrière pour rendre hommage à ce pionnier.
Bahamontès était avant tout un prince de la montagne. Sans doute le plus grand grimpeur de l'histoire, même si Charly Gaul, dans un style différent mais tout aussi efficace, pourrait lui contester ce titre. Quand débute le Tour 1959, l'enfant de Tolède a déjà solidement établi sa réputation. Visage émacié, style aérien, il est une des figures marquantes du peloton. Dès que la pente s'élève, on le respecte, on le redoute. Mais l'homme est trop inconstant pour prétendre au statut de favori. Manque d'ambition. De sérieux aussi, parfois. Des accélérations terribles, mais une certaine tendance à ne pas tenir la distance. Trop fantasque, le Federico. La petite histoire se souvient de cette étape dans les Alpes au cours de laquelle, au sommet d'un col, il s'était arrêté pour déguster une glace alors qu'il était échappé. "En fait , raconte-t-il, j'avais eu un problème mécanique. J'étais obligé de m'arrêter. Mais la voiture d'assistance tardait à arrivait, alors j'ai acheté une glace pour passer le temps. Depuis, je suis resté comme "le coureur qui aimait les glaces" et ça me va très bien. "
Anglade, le cocu de l'affaire
Reste que le petit milieu du cyclisme a fini par se dire que Bahamontès ne gagnerait jamais le Tour. Les circonstances vont lui permettre de contredire l'opinion. Les circonstances, en l'occurrence, se sont les dissensions qui règnent dans le camp français, plus divisé que jamais. Jacques Anquetil et Roger Rivière, obligés de cohabiter, se détestent cordialement. Au milieu, Louison Bobet, triple vainqueur du Tour mais en passe de perdre son influence à 34 ans passés et Raphaël Geminiani. Au milieu, Marcel Bidot, le patron de l'équipe de France. Avant le départ, une réunion est organisée à Poigny-la-Forêt, près de Rambouillet, afin d'apaiser les tensions. Ce sera le cas. En apparence, seulement. D'ailleurs, Anquetil ne se cache pas devant les journalistes. "Toute l'année, avec Rivière, nous sommes adversaires. Aujourd'hui, on nous demande d'être copains. On veut m'imposer la volonté des sélectionneurs, mais je courrai quand même contre lui ." Le décor est planté.
Bahamontès, lui, n'a pas de rival interne au sein de l'équipe d'Espagne. Il va faire son bout de chemin, tranquille. L'attitude suicidaire des Français fera le reste. Ces derniers sont trop occupés à se charger du cas Henry Anglade, leader de l'équipe Centre-Midi. Deuxième du général derrière Jos Hoevenaers, peu dangereux à long terme, après sa victoire à Aurillac, Anglade est en position de gagner le Tour. Marcel Bidot décrète alors que tout doit être fait pour qu'un "régional" ne gagne pas le Tour. Ce serait l'humiliation suprême pour l'équipe de France. Une aubaine pour Bahamontès, dans tous les bons coups, dans les Pyrénées comme dans le Massif Central. Sans faire de bruit, le grimpeur ibérique s'est replacé, lui aussi. Dans les Alpes, sur la route de Grenoble, "El Picador" va construire sa victoire avec un brio certain. Tandis que les frères ennemis tricolores s'observent et se neutralisent, lui s'envole dans le col de Romeyère avec l'autre géant des cimes, Charly Gaul. A Grenoble, Gaul gagne l'étape et Bahamontes endosse le maillot jaune. Anglade est le cocu de l'affaire. Son avance est suffisante pour qu'il ramène la tunique d'or à Paris, devançant Anglade, Anquetil et Rivière au classement final.
L'attaque à tout prix
C'est l'heure de gloire pour le grand Federico, devant lequel les portes de l'histoire s'ouvrent en grand. Au-delà des circonstances, c'est surtout la consécration méritée d'un incroyable talent, qui remporta sa première course dès l'âge de 17 ans. "Quand il grimpait, il était étourdissant, accomplissant son ascension au rythme de métronome de ses épaules, dit un jour de lui Pierre Chany, le grand journaliste de L'Equipe. Le plus admirable, c'était le mouvement de son corps au niveau des reins. Il avait la souplesse d'un danseur de Flamenco." Surtout, Bahamontès ne savait courir que d'une seule façon: en attaquant. Encore et toujours. Le Britannique Barry Hoban, qui fut aussi l'équipier de Tom Simpson, se souvient: "sa tactique était simple: dès le pied du premier col, il attaquait. Là, je savais que je ne le reverrai plus jusqu'au début de l'étape suivante ."
Par sa victoire, il a tracé à jamais la voie pour les Ocana, Delgado, Indurain et autres Contador. Lui-même n'a jamais réédité son exploit de 1959, mais ses six maillots de meilleur grimpeur ont longtemps constitué un record, avant que Richard Virenque n'y ajoute une unité. Aujourd'hui âgé de 81 ans, Bahamontès a toujours bon pied bon oeil. Honoré mardi soir à Madrid lors d'une soirée organisée par le quotidien sportif Marca, en présence de Miguel Indurain, Bahamontes sera également fêté à Barcelone. Comme un symbole, il avait signé la dernière victoire de sa carrière en haut de la colline de Montjuic, là même où sera jugée l'arrivée jeudi. Si un de ses compatriotes avait la bonne idée de passer à l'attaque pour s'y imposer, l'Aigle de Tolède serait le premier à se lever pour le saluer...
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