Les débats du Tour : Où Alaphilippe aura-t-il le plus de chances de victoire ?

Jonas Vingegaard et les Jumbo Visma ont été sur tous les fronts jeudi lors de la 6e étape. Mais à l'arrivée, le Danois a été cueilli dans la montée finale par Tadej Pogacar. Alors, les Jumbo et leur leader en ont-ils fait trop ? C'est l'une des trois questions de nos débats du Tour, qui reviennent aussi sur la situation de trois figures tricolores, Gaudu, Bardet et Alaphilippe.

Une attaque foudroyante : Pogacar a déposé Vingegaard

Video credit: Eurosport

Où Alaphilippe aura-t-il le plus de chances de victoire ?

Laurent Vergne
La semaine qui vient s’annonce décisive pour le Tour de France de Julian Alaphilippe. Le double champion du monde s’est beaucoup montré depuis le départ de Bilbao, il a beaucoup attaqué, mais sans jamais s’approcher, même de loin, d’une possible victoire. Il n’a plus ses cannes du début de Tour 2020 ou 2021, ; sans même parler de celles de 2019.
Il y a deux types d’étapes que le puncheur de la Soudal – Quick Step ne peut raisonnablement pas espérer remporter : celles en plaine pour les sprinters et celles en très haute montagne. En revanche, sur le papier, la semaine à venir, jusqu’au Grand Colombier vendredi prochain, présente un intérêt certain pour lui. Elles sont au nombre de trois :
Samedi : 8e étape, Libourne – Limoges Mardi : 10e étape, Vulcania – IssoireJeudi : 12e étape, Roanne – Belleville-en-Beaujolais
Trois journées pour puncheurs. Trois journées pour lui. En tout cas pour le "vrai" Julian Alaphilippe. Sur les trois, celle d’Issoire, pas trop sélective et taillée à merveille pour qu’une échappée aille au bout, est peut-être la plus séduisante. Mais il faudrait tout de même qu’il soit un peu plus saignant, en espérant qu’il ne paie pas les efforts consentis sur des étapes inabordables pour lui. Comme celle de Cauterets jeudi.
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Alaphilippe : "Je garde le moral"

Video credit: Eurosport

Christophe Gaudot
Si l'on évoque une opportunité, je miserais sur la 12e étape celle de Belleville-en-Beaujolais, avec ses cinq côtes et cols répertoriés et surtout un profil en forme de montagnes russes, sorte de Liège-Bastogne-Liège un peu musclé. Ça tombe bien, le double champion du monde ne semble plus avoir la giclette qui était la sienne et je pense qu'il peut désormais mieux s'exprimer sur des efforts un peu plus longs.
Sur cette 12e étape, il faudra avaler le Col de la Croix Montmain (5,5 km à 6,1%) et le Col de la Croix Rosier (5,3km à 7,6%) dans le final et la différence se fera là dans l'échappée. Est-ce trop dur pour Alaphilippe ? Peut-être mais pour moi ce n'est pas un hasard si le Français a pris les échappées dans les Pyrénées : il veut faire des efforts longs et monter en puissance. L'imaginer gagner n'est pas chose aisée mais s'il ne devait y avoir qu'une opportunité, je choisirais celle-ci.
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Tour de France - Map of stage 12 - Roanne - Belleville-en Beaujolais (07/13)

Video credit: Eurosport

Gaudu et Bardet peuvent-ils croire au podium ?

Julien Chesnais
Pour l’instant non. Dans la hiérarchie de la première semaine du Tour, les deux Français n’apparaissent ni dans le top 3, ni dans le top 5. Leurs places au général (7e pour Gaudu, 8e pour Bardet) reflètent assez bien leur niveau actuel. Ils sont dans le coup. Mais en second, voire troisième rideau. Derrière les intouchables Vingegaard et Pogacar, qui disputent leur propre course pour la victoire, Hindley se dresse indiscutablement comme le 3e homme fort. Son numéro de la veille lui a sans doute pesé dans les jambes. Mais l’Australien a tout de même fini au troisième rang des cadors à Cauterets-Cambasque, devant Carlos Rodriguez et Simon Yates, et avec 33 secondes de marge sur le groupe de Bardet et Gaudu.
Bien sûr, le Tour est encore long. Le rapport de force évoluera sans doute d’ici la fin du Tour, et peut-être même dès le Puy-de-Dôme, dimanche. Mais leur retard sur le podium est déjà significatif (2’29” pour Gaudu et 3’09” pour Bardet) et demeure non négligeable sur la 4e place occupée par Simon Yates (49” et 1’29”). Même en finissant très fort le Tour, je les vois mal monter sur la boîte, sauf craquante - ou incident - chez l’un des trois cadors. Je pense que Gaudu va s'accrocher coûte que coûte à un bon général. Bardet, lui, a dit et répété qu’une 6e place ne l’intéressait pas. Si le podium ne s’est pour lui pas rapproché dimanche, l’Auvergnat changera son fusil d’épaule, pour viser des étapes ou pourquoi pas un maillot à pois.
Laurent Vergne
A ce stade de la course, difficile d’être réellement optimistes pour l’un comme pour l’autre. Comme le souligne Julien, en termes de classement, ils peuvent sembler assez proches du podium. Sauf que si l’on entre dans les détails, les écarts sont déjà significatifs. L’impression dégagée par les différents protagonistes ne dit pas autre chose. Jai Hindley, Simon Yates ou Carlos Rodriguez ont montré davantage de tranchant jusqu’ici.
Cela dit, rien n’est encore définitif et après le retournement de situation à l’étage supérieur en l’espace de 24 heures entre Pogacar et Vingegaard prouve qu’il est prudent de ne pas aller trop loin dans les conclusions au jour le jour. Le problème des deux Français est qu’ils sont pour l’heure prisonniers de leur situation : déjà un peu loin du Top 3 pour espérer combler leur retard à la pédale, mais pas suffisamment pour bénéficier de la moindre liberté en partant de plus ou moins loin. Si tel est le cas, vous pouvez être sûrs que les BORA, voire les INEOS, se chargeront de rouler derrière eux.
Pour espérer monter sur la boîte dans deux semaines et demie à Paris, il faudrait compter sur deux scénarios favorables : le premier tient en une montée en puissance de Bardet et/ou Gaudu par rapport à ce qu’ils ont montré dans les Pyrénées. L’autre se niche dans un changement de stratégie, en se lançant, sinon à l’abordage, au moins à l’attaque. Mais comme évoqué plus haut, leur position actuelle rend délicate une telle opération. Bref, il y a de l’espoir, mais ils font face à une équation complexe.
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Rassurez-vous, le duel Pogacar-Vingegaard ne fait que commencer : le résumé en vidéo

Video credit: Eurosport

Vingegaard et les Jumbo se sont-ils vus trop beaux ?

Julien Chesnais
Non. "Vigo" et les Jumbo ont couru dans l’idée de tuer le Tour. Et l’occasion était vraiment trop belle pour ne pas être tentée. Vingegaard a créé des écarts monstres, la veille, en un kilomètre de montée dans Marie-Blanque. Alors, imaginez ça à l’échelle du Tourmalet, puis de Cauterets… Leur postulat était le bon, d’ailleurs. Le Danois s’est montré largement au-dessus de la mêlée, comme la veille. Mais à une exception près, cette fois-ci.
Pour moi, Jumbo-Visma a fait le choix de la raison. Elle a pesé tous les éléments pour établir la stratégie qu’il lui semblait la meilleure pour affermir la position de son leader. Le plan a d’ailleurs été parfaitement exécuté. Van Aert, qui a initié l’échappée et en a été le principal moteur, a été récupéré dans la descente du Tourmalet par Vingegaard, mis entre-temps sur orbite par le reste de ses équipiers. Du tableau noir. Mais c’était sans compter sur Pogacar, redevenu lui-même bien plus vite que la logique le suggérait.
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Vingegaard : "On voulait encore tester Pogacar… mais je crois qu'il se sentait mieux qu'hier"

Video credit: Eurosport

Christophe Gaudot
Un peu, oui à mes yeux. Je distingue deux moments dans cette étape et si je ne blâme pas Jumbo-Visma pour la première partie, je serai bien plus critique pour la deuxième. Accélérer dans le Tourmalet n'était pas dénué de sens au vu de la démonstration de Jonas Vingegaard en une poignée de kilomètres mercredi dans Marie-Blanque. Avec Wout van Aert à l'avant Jonas Vingegaard pouvait se permettre de s'isoler avant la petite vallée, puis l'ascension vers Cauterets.
Oui mais précisément, le leader des Jumbo-Visma ne s'est pas isolé et d'ailleurs Tadej Pogacar l'a suivi plutôt facilement. Fallait-il insister ? C'est là que je vois une erreur. En imprimant son tempo à lui une fois que Van Aert s'est écarté, Vingegaard a pensé qu'il pourrait asphyxier Pogacar. Il s'est surtout découvert. A mes yeux, Jumbo-Visma aurait pu se mettre en mode défense après la première attaque de Vingegaard dans le Tourmalet.
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Pour Kuss, Jumbo a bien joué : "On peut être heureux de l'intention"

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