Tour de France 2023 | Le bilan de la 8e étape : Mark Cavendish, du rêve au cauchemar

L'histoire retiendra peut-être les 34 succès de Mark Cavendish sur le Tour de France. Co-recordman des victoires d'étapes sur la Grande Boucle en compagnie d'Eddy Merckx, le "Man of Man" en fut le sprinteur le plus iconique de nombreuses années durant. Personnage central évidemment, le Cav' savait allier succès à la pelle, jusqu'à six en 2009, et attitude de rock-star pour se porter dans une galaxie bien à lui.

Mais quand on occupe autant le devant de la scène, penser qu'il n'y a que des bons moments est illusoire et la relation entre Cavendish et la Grande Boucle est aussi marquée par les coups durs. Souvenez-vous de 2014. Le Tour avait pris ses quartiers dans le Yorkshire pour son grand départ et Cavendish avait, à domicile, des rêves de maillot jaune. Ce Tour, il l'avait quitté dès le premier jour avant, deux ans plus tard sur les plages du débarquement, de triompher de la première étape et d'endosser le mythique maillot.

L'émotion qu'il avait ressentie aurait-elle été la même sans le crève-cœur de 2014 ? On se permet d'en douter et dans les quatre succès de 2021, qui l'avaient mis à la hauteur de Merckx, on avait bien du mal à ne pas y voir aussi la rage née de cette fin de saison 2020 quand plus personne ne voulait de lui, ce que chacun comprenait, et qu'il avait annoncé sa retraite probable.

Reviendra-t-il cette fois ? Son rêve de 35e victoire, encore palpable il y a 24 heures à Bordeaux, s'est écrasé sur une route du Limousin alors que le Tour n'a pas encore achevé sa première semaine. Sa retraite, Cavendish l'a annoncée pour la fin 2023. Il faudrait une sacrée dose de passion, il n'en manque pas, et de confiance en soi, il en est pourvu aussi, pour la repousser et imaginer qu'il puisse encore en 2024, à 39 ans, lutter dans les sprints massifs. Cavendish reviendra peut-être. Ou pas. Dans les deux cas, il est une légende et les légendes ne meurent jamais.

Une étape en 2019, deux en 2020, trois en 2021 et encore trois en 2022. Les bouquets, Wout van Aert (Jumbo-Visma) les collectionnent sur le Tour de France. Tant et si bien que le voir terminer la première semaine sans succès paraissait difficile à croire avant le départ de Bilbao tant les occasions étaient nombreuses pour lui. Et pourtant, sauf monumentale surprise au Puy de Dôme, le Belge passera la première journée de repos fanny après son nouvel échec à Limoges. Pas sûr qu'il avait envisagé les choses de cette façon et pas sûr non plus qu'il ait le sourire lundi en conférence de presse.

Mark Cavendish à terre, il n'y a pas besoin d'en dire plus.

Le punch d'Anthony Turgis. S'il n'a rien pu faire face au peloton dans le final, le coureur de l'équipe TotalEnergies a tout donné. Il était le plus fort des trois membres de l'échappée. Il a fini tout seul au prix d'un joli numéro dans les deux dernières côtes de 4e catégorie, mais le combat était inégal. Justement récompensé par le prix du combatif du jour, même s'il aurait sans doute aimé faire un autre cadeau à son manager Jean-René Bernaudeau, dont c'était l'anniversaire ce samedi.

Ce combat entre les grosses cuisses dans le dernier kilomètre. Il y avait de tout, des sprinteurs classiques (Philipsen, Groenewegen), d'autres que l'on voit sur ce type d'arrivée (Pedersen) et Wout van Aert. Il y avait des watts au mètre carré à Limoges !

Le retour des chutes. Nous avions souligné pas plus tard que vendredi qu'elles étaient rares depuis le départ de Bilbao. C'était une des meilleures nouvelles de la semaine. Samedi, patatras. La première a donc été fatale à Mark Cavendish, se tordant de douleur sur le bitume brûlant avec une clavicule en vrac. Moche, vraiment.

En parlant de chute collective, la seconde, dans le final, a laissé sur le carreau Steff Cras (TotalEnergie). Vous ne l'aviez peut-être pas beaucoup vu depuis le début de ce Tour 2023, mais le Belge avait été remarquable, pointant à la 13e place après des Pyrénées très solides. Dommage de le voir quitter une course si prometteuse jusqu'ici. Le jour de l'anniversaire de Bernaudeau, en prime. A revoir, très vite.

La (belle) série continue pour Mads Pedersen. A sa manière, le Danois de la Lidl-Trek est un homme de Grand Tour. C'est la quatrième course de trois semaines de suite où il claque au moins une victoire : une sur le Tour de France 2022, trois sur la Vuelta dans la foulée puis, cette année, un succès sur le Giro et donc, désormais, un autre sur la Grande Boucle. Un bon rythme pour le champion du monde 2019.

"C’était plutôt sympa cette étape, jusqu’à ce qu’on accélère dans les 50 derniers kilomètres. Là, c’est devenu chaud et dur. En tout cas le moral est bon, et je pense que j’ai de bonnes chances. La route est longue jusqu’à Paris et il faut que je garde les mêmes jambes qu’hier."

Mark Cavendish, c'est vraiment fini ?

Philipsen, c'est la crise ? Que se passe-t-il ? (On plaisante, au cas où)

Quel scénario demain entre Vingegaard et Pogacar au Puy de Dôme ? Coup de semonce ou égalité parfaite ?

Gaudu et Bardet vont-ils monter en puissance sur les pentes du volcan auvergnat ? S'ils veulent vraiment viser le podium, ce serait une bonne idée.

La réponse à la question de vendredi était : Lance Armstrong. L'Américain, alors dans la phase initiale de sa carrière, s'était imposé à Limoges et avait pointé deux doigts vers le ciel en hommage à son coéquipier de l'équipe Motorola, Fabio Casartelli, disparu tragiquement trois jours plus tôt après une chute dans la descente du col de Porter d'Aspet.

La question de ce samedi : Avant que le Puy de Dôme ne disparaisse pour une hibernation de 35 longues années, qui s'y était imposé lors de la dernière arrivée là-bas -jusqu'à dimanche- en 1988 ?