Tour de Lombardie 2021 - Alaphilippe piégé, Masnada impuissant, Evenepoel défaillant : Deceuninck, décryptage d'un raté
Mis à jour 09/10/2021 à 20:30 GMT+2
TOUR DE LOMBARDIE - Avec trois solides cartes au départ de l’épreuve nommées Julian Alaphilippe, Joao Almeida et Remco Evenepoel, la Deceuninck-Quick Step faisait office d’équipe à battre sur la "Classique des feuilles mortes". Mais si le champion du monde semblait en grande forme, la formation belge a multiplié les fautes dans le final. Certaines tactiques, d’autres non.
Nul doute que Fausto Masnada se rappellera longtemps ce samedi 9 octobre 2021, de ce Tour de Lombardie finissant chez lui, à Bergame, qu’il est passé si près de remporter. Si près et pourtant si loin car l’Italien, finalement deuxième, n’a jamais semblé en mesure de priver Tadej Pogacar de la victoire sur la "Classique des feuilles fortes". Si ce podium reste une immense performance pour Masnada, elle sonne un peu comme une défaite pour la Deceuninck-Quick Step.
La formation belge, qui alignait son trio de cadors Joao Almeida-Remco Evenepoel-Julian Alaphilippe, a laissé échapper la victoire après une première partie de course pourtant bien maitrisée. "Ça s’est plutôt bien passé, on était toujours bien représenté à l’avant jusque dans le final, expliquait le champion du monde français. On s’est retrouvé devant avec Joao et Fausto, toute l’équipe a fait un super boulot. On a senti que la course était de plus en plus dure, donc on a durci mais c’était un peu sauve qui peut !" Et l’équipe de Patrick Lefevere a multiplié les fautes tactiques, avec quatre erreurs majeures décryptées.
36,6km de l’arrivée : Pogacar s'en va, la Deceuninck figée
Nous sommes dans l’avant-dernière difficulté du jour, le Passo di Ganda. Alors que le tempo imposé depuis quelques kilomètres par la formation INEOS Grenadiers vient de causer la perte de Remco Evenepoel, distancé mais montant au train pour revenir aider ses leaders, Tadej Pogacar (UAE Team Emirates) décide de suivre une attaque de Vincenzo Nibali (Trek-Segafredo). En tête de peloton à cet instant, Joao Almeida sent le danger et alerte immédiatement Julian Alaphilippe et Fausto Masnada qu’il ne pourra pas faire la jonction et qu’il faut qu’ils aillent.
Mais aucun ne bouge, alors même que le champion du monde était dans la roue de Pogacar à ce moment-là. Une grosse erreur de la part du Français, d’autant qu’il semblait physiquement en mesure de le suivre. "Peut-être qu’il me manquait un peu de confiance pour faire le jump au moment de l’attaque de Pogacar, avouait-il à l’arrivée. Dans les jambes, ça allait bien, j’étais à la limite, comme tout le monde. Mais, comme ces derniers jours, ça a été un peu compliqué, je ne savais pas si j’étais capable de suivre". Mais à cet instant, rien n’est perdu encore.
35km : Une attaque pour rien de Masnada
Très rapidement, Fausto Masnada prend les commandes du groupe des favoris alors que Joao Almeida se bat en queue de groupe pour s’accrocher jusqu’au sommet. A cet instant, Pogacar ne possède que 15’’ d’avance et, 300m plus loin, l’Italien place même un démarrage pour tenter de revenir seul sur le Slovène. En vain, il restera un bon kilomètre seul devant le groupe des favoris avant d’être repris. Un temps décroché, Joao Almeida, qui continue de se battre, parvient même finalement à revenir sur le groupe des favoris à 2km du sommet.
Mais l’attaque d'Adam Yates quelques hectomètres plus loin - une offensive destinée à faire la jonction avec Masnada - le fait céder à nouveau. Mais le Portugais continue de se battre pour basculer pas trop loin, en compagnie de Quintana notamment. La présence d’Almeida ET de Masnada dans la plaine avant Bergame serait un atout majeur pour Alaphilippe.
31,7km : Alaphilippe, un pétard pour rien
Alors que Fausto Masnada roule en tête du groupe des favoris depuis un bon kilomètre et que Joao Almeida continue de se battre à une vingtaine de secondes, la situation s’est stabilisée, avec 36’’ d’avance pour Pogacar. La victoire est encore complètement jouable pour Julian Alaphilippe et le groupe des favoris, à condition de s’entendre. D’autant que le champion du monde a Masnada avec lui, Almeida pas loin derrière et que Roglic a Vingegaard.
Mais, juste avant la bascule, Julian Alaphilippe place une violente accélération pour tenter de sortir. Il reprend 8’’ dans l’affaire à Pogacar mais ne lâche personne sinon … Jonas Vingegaard, évidemment. Il empêche également tout retour d’Almeida dans la descente, qui se relève alors. Il poursuit malgré tout son effort dans la descente et semble capable de s’isoler à la poursuite de Pogacar. Mais il n’y parviendra pas.
29,7km : Enterrement de première classe derrière Masnada
Dans la descente, on s’attend à ce que Fausto Masnada roule pour Alaphilippe, comme il le faisait dans la montée, mais il décide, aiguillonné par le Tricolore, de profiter de sa connaissance du terrain (il est né à Bergame) pour attaquer mais personne ne suit, à commencer par Alejandro Valverde (Movistar), qui était dans sa roue. "Fausto s’est retrouvé devant mais il avait déjà fait beaucoup de travail avant, racontait le Tricolore. On ne savait pas trop ce que ça allait donner…"
Malgré tout, Alaphilippe laisse filer son équipier et ne roule pas, pour obliger ses adversaires à travailler. Le souci, c’est qu’il n’y a plus personne pour rouler, la faute à l’attaque du Français du sommet du Passo di Ganda. Les favoris attendent donc le retour d’un Vingegaard distancé mais, le temps que celui-ci revienne et se mette à rouler, l’avance de Pogacar double, passant de 24’’ à 48’’. A jouer avec leurs adversaires, Alaphilippe et la Deceuninck-Quick Step se sont piégés tout seul.
8,5 km : Alaphilippe (et Woods) annihile sa dernière chance
Après un long moment sans reprendre du temps, les favoris réussissent enfin à s’organiser et reviennent même à 28’’ à moins de 10km de l’arrivée. Le coup est encore jouable mais, alors que tout le monde passe, Michael Woods décide de sauter un relais, désorganisant le groupe. A cet instant, Julian Alaphilippe et la Deceuninck-Quick Step ont conscience que leur meilleure chance de gagner reste de faire revenir le champion du monde sur la tête de course.
Mais, au lieu de collaborer enfin pour permettre une meilleure harmonie, le Français profite de la désorganisation pour attaquer et tue définitivement l’entente entre les favoris. Car, derrière, personne ne voudra collaborer avec le Français, par peur de se faire contrer, et tout le monde va s’enterrer. Deux kilomètres plus loin, le duo de tête comptera plus de 50’’ d’avance. La messe est dite, la Deceuninck-Quick Step a laissé échapper sa seule chance de victoire. "Je n’ai pas de regrets, affirmait Alaphilippe après la course. On a décidé de jouer la carte Masnada à fond et puis voilà. Malheureusement, on ne gagne pas mais ça reste une belle place, 2e sur un Monument".
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