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Tadej Pogacar va-t-il gagner les cinq Monuments ?

Simon Farvacque

Mis à jour 04/04/2023 à 18:38 GMT+2

TOUR DES FLANDRES - Trois coureurs ont gagné les cinq Monuments. Il ne toque pas encore à la porte de cette caste mais Tadej Pogacar fait figure de candidat crédible pour l'intégrer. Lauréat du Ronde dimanche, le Slovène de 24 ans n'a plus que Milan-Sanremo et Paris-Roubaix à cocher. Style, poids, calendrier, tactique… notre consultant Nicolas Fritsch évoque les écueils qui se dressent face à lui.

Pogacar, "le coureur du 21e siècle !"

"Contente-toi des Grands Tours s'il te plaît". Formulé sur Instagram, ce vœu de Mathieu van der Poel est pieux. Tadej Pogacar n'a de cesse d'étendre son terrain de jeu. Le phénomène slovène a ajouté le Tour des Flandres à son palmarès, dimanche à Audenarde. Le Tour de Lombardie (doublement) et Liège-Bastogne-Liège figuraient déjà au sein de sa collection de Monuments. "Pogi" n'a ainsi plus que deux cibles à cocher, pour pouvoir se targuer d'avoir remporté les cinq plus grandes classiques du calendrier, et ce alors qu'il n'a que 24 ans.
On en vient à se demander ce qui pourrait l'en empêcher. Questionné au sujet de la quête de ce quintet royal – que seuls Eddy Merckx, Roger de Vlaeminck et Rik van Looy ont complété –, Pogacar n'a pas botté en touche, dimanche, après son Ronde victorieux. "Sanremo est le plus difficile (des Monuments) à gagner", a estimé le leader d'UAE Emirates, 4e de la Primavera cette année. Dans le Poggio, il a fait voler le peloton en éclats, mais Mathieu van der Poel l'a contré sur le sommet : "J'étais pourtant dans l'une des meilleures formes de ma vie."
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Tadej Pogacar et les Monuments : 3/5, au 4 avril 2023

Crédit: Quentin Guichard

Le paradoxe de Sanremo

Sa réponse peut surprendre. L'Enfer du Nord semble réservé aux spécialistes, alors que Milan-Sanremo est très ouvert. Mais le problème réside dans ce large éventail de vainqueurs potentiels. "Il y a une dimension tactique à Sanremo, souligne Nicolas Fritsch. Paris-Roubaix, en dehors de la malchance (fort risque d'incidents mécaniques, ndlr), c'est le plus costaud qui gagne… et le plus costaud c'est souvent Pogacar." Sa démonstration flandrienne a montré que le côté "dernier homme debout" lui convenait mieux qu'un final intense après une course d'attente.
Un coureur catalogué grimpeur ou puncheur qui s'aventure sur le Ronde et peut y briller, sur la classe et l'explosivité, c'est une chose. En 2020, Julian Alaphilippe s'était ainsi invité dans la cour des grands, avant de buter sur une moto. Mais ce qu'a réalisé Tadej Pogacar en est une autre. "Ce n'est pas Alejandro Valverde, un peu à l'arrache parfois, mais qui sait se placer, est doué, et arrive à faire une place (8e en 2019, ndlr), abonde notre consultant. Là, il les a éparpillés sur un type d'effort qui ressemble à ceux qu'il faut effectuer à Roubaix."
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Trois mines d'une puissance rare : Les trois fois où Pogacar a attaqué

Pas un grimpeur au pays des flahutes

"Le Vieux Quaremont, il y a une partie difficile, raide, mais sinon c'est presque du pavé de Roubaix", insiste Fritsch, concernant l'attaque décisive de Pogacar. La star slovène a battu Mathieu van der Poel et Wout van Aert sur leur terrain… et dans leur registre. Le contraste existe, en termes de gabarit, mais il est quasiment inexistant en termes de coup de pédale. Ce qui marque, c'est "sa capacité à développer des watts sans se mettre en danseuse. On le voit aussi sur les chemins de terre des Strade Bianche. Il a un style adapté aux efforts assis, sur des sols avec peu d'adhérence."
"Pogacar coche les cases d'un point de vue physiologique, de position, de technique, énumère l'ancien coureur de la Française des Jeux. Il a une sorte de répartition de masse basse, il est ramassé, compact." Le pavé est cependant différent, d'un Monument à l'autre. Mais l'été dernier lors du Tour de France, "Pogi" avait impressionné sur les secteurs du nord de la France, s'échappant avec Jasper Stuyven. "Frotter, tenir la distance, le faire en avril (sur ce Ronde, ndlr) et ce qu'il a montré durant le Tour 2022 : avec cette combinaison, je ne vois pas pourquoi il n'y arriverait pas", considère Fritsch.
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L'attaque pour la victoire : Pogacar a encore volé dans le Vieux Quaremont

Il a tout ce qu'il faut pour gagner Paris-Roubaix… pratiquement dès maintenant
L'objectif paraît cependant plus raisonnable à moyen qu'à court terme, pour Pogacar. Il ne devrait pas être au départ ce dimanche, même si ses réseaux sociaux seront sans doute scrutés durant la semaine – il avait plus ou moins bluffé à ce sujet l'an passé. "Il a tout ce qu'il faut pour gagner Paris-Roubaix… pratiquement dès maintenant", résume notre expert. Un "pratiquement"… qui pèse lourd. "Je pense que je dois prendre quelques kilos pour Roubaix et m'endurcir les mains pour les pavés", avance le double vainqueur du Tour de France (2020, 2021).
Pour trouver trace d'un coureur de moins de 70 kilos qui triomphe à Roubaix, il faut remonter à 2001, et au sacre de Servais Knaven (68kg). Depuis, un mastodonte comme Magnus Bäckstedt (94kg) a eu droit à son heure de gloire (2004), alors que le poids moyen des vainqueurs de l'épreuve sur les vingt dernières éditions est de 78,45kg (estimation via ProCyclingStats, ndlr). Avec 66 kilos sur la balance, "Pogi" pourrait avoir besoin de forcir, sans pour autant se métamorphoser. Ce serait tout de même risqué, dans l'optique des courses de trois semaines.
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Van der Poel réaliste après la victoire de Pogacar : "Il était incroyable aujourd'hui"

Priorité et dangerosité

"Je pense qu'il veut surtout reconquérir le Tour de France, pointe Nicolas Fritsch, en référence au duel perdu par Tadej Pogacar face à Jonas Vingegaard. Gagner les trois Grands Tours et les cinq Monuments, cela peut être sa feuille de route. Dans la logique, c'est plus simple de tenter d'accrocher un troisième Tour cette année, puis de signer le doublé Giro-Vuelta l'an prochain, avant de songer à Roubaix." Sachant que Milan-Sanremo a des airs de passage "obligé" du début de saison : "Celle-ci, il essaiera de la gagner chaque année, il sera là naturellement."
La présence ne fait pas tout. Il y a l'engagement émotionnel, aussi. En 2022, on a vu Pogacar prendre moins de risques que son compatriote, le funambule Matej Mohoric, dans la descente du Poggio. Comme s'il ne souhaitait pas hypothéquer des objectifs encore plus grands. D'où la perspective renforcée de le voir attendre quelques années encore, avant de défier les pavés de Roubaix, au-dessus desquels plane le spectre d'une grave chute. Mais "s'il débarque par surprise dimanche, beaucoup vont cogiter sérieusement", conclut notre consultant, hilare.
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Rétro 2022 - Mohoric le funambule : revivez son ahurissante descente du Poggio

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