France-Uruguay : Pourquoi Pierre Mankowski était et redeviendra un homme de l’ombre

Samedi soir, il vivra un nouveau moment de gloire. SON moment de gloire. Les projecteurs, Pierre Mankowksi ne les attire pas. Il serait même plutôt du genre à les éviter. Mais qu’il le veuille ou pas, la lumière sera fatalement braquée sur lui, à l’heure où "son" équipe de France croisera le fer avec l’Uruguay, pour sa première finale de Coupe du monde des moins de 20 ans. Une finale de Coupe du monde, Mankowski en a déjà vécue une. C’était en 2006, face à l’Italie. Et il l’avait perdue. A cette époque, il était assis sur un autre banc tricolore, comme bras droit de Raymond Domenech. Bras droit, adjoint ou fidèle lieutenant, Mankowski a toujours vécu dans l’ombre de ceux qu’il secondait. Après la finale d’Istanbul, sans doute retournera-t-il dans l’anonymat. Voici les quatre raisons qui nous le font penser.

Si Pierre Mankowski savoure "son bonheur et ses sensations de numéro un", comme il le confiait vendredi, dans L’Equipe, c’est parce qu’il ne l’a pas souvent été. Même si, rappelle-t-il, "avant d’être adjoint en équipe de France (de 2002 à 2010), j’ai commencé par être le patron" pendant "dix-sept ou dix-huit ans dans des clubs de Première ou Deuxième Division". Sa carrière de coach, cet ancien milieu de terrain l’a effectivement débutée à Caen. De 1983 à 1988, c’était lui le patron technique du Stade Malherbe. Avant d’être celui du Havre (1988-1993). Puis de Saint-Etienne, pendant 20 matches, en 1996-1997. Bilan ? Un palmarès modeste, qui se résume à deux titres de champion de D2 (1991 et 1996). On a connu plus clinquant pour se faire un nom. 

Cette finale face à l’Uruguay, c’est celle "de tous les éducateurs de France". L’occasion de "montrer le travail en profondeur fait dans la formation des clubs français". De "remercier tout le travail au quotidien des entraîneurs, des centres de formation et des entraîneurs des clubs professionnels". Ces mots, Pierre Mankowski les a tenus jeudi. Ils traduisent un attachement viscéral à l’apprentissage footballistique, à l’éclosion des jeunes talents. Avant d’être à la tête des U20, il avait dirigé l’équipe de France des moins de 16 ans (2000-2001), des moins de 17 ans (2001-2002), des moins de 18 ans (2010-2011) et des moins de 19 ans (2011-2012). Il avait aussi pris les rênes du centre de formation du PSG. Son parcours le souligne : Mankowski a l’âme d’un éducateur, qui aime faire grandir les pépites de demain. Beaucoup moins les encadrer lorsqu’elles ont pris du galon.

Face aux micros, Pierre Mankowski n’a jamais été un grand bavard. Ni un adepte de l’autosatisfaction. Pas son genre. Comme il le dit dans L’Equipe, il n’a "jamais ressenti le besoin (…) d’entrer dans le jeu" de la communication, de "fayotter avec les journalistes". Bref, de se vendre. Ses proches décrivent un homme d’une "très grande discrétion" (Claude Le Roy), qui "évite toujours les grandes déclarations d’intention" (Georges Honoré). Bref, résume Alain Belsoeur, son meilleur ami, qui l’a côtoyé au Havre : quelqu’un de "fidèle, discret et efficace". "Plutôt que de faire de la com, lui, il travaille." C’est, évidemment, tout à son honneur. Mais ça ne lui a pas toujours souri.

"Manko" le jure, main sur le cœur : un titre mondial n’aurait rien d’une revanche. "Il faut arrêter avec ça." Et pourtant, le sélectionneur des U19 se voyait déjà à l’échelon supérieur, à la tête des Espoirs. Noël Le Graët le lui avait, paraît-il, promis. Si tel est le cas, le président de la FFF a, depuis, fait machine arrière. Le Graët n’a pas l’intention de sacrifier Willy Sagnol, au passé de joueur nettement plus prestigieux et à l’aura médiatique plus affirmée.