Coupe du monde - Espagne - Russie : Igor Akinfeev, le dernier rempart en première ligne

Ils se sont rués vers lui comme un seul homme. Il était un peu moins de 20 heures (heure locale) au stade Loujniki de Moscou, et sous les vivas de tout un stade, l'ensemble de la délégation russe a foncé vers son gardien, Igor Akinfeev, auteur de la parade décisive face à Iago Aspas lors de la séance de tirs au but qui opposait l'Espagne à la Russie en huitième de finale (1-1, 4 t.a.b. à 3). C'était aussi la plus belle qu'il a réalisé dans cette rencontre, du bout du pied alors qu'il était déjà en train de plonger vers la droite de son but.

Titulaire en sélection depuis 2005 - une éternité -, le portier de 32 ans s'est donc offert l'une des plus belles émotions de sa carrière, sur son sol pendant une Coupe du monde. Il est pour beaucoup dans la qualification de sa nation pour le premier quart de finale d'un Mondial de son histoire (hors URSS). Et c'est bien normal car il est le pilier de cette équipe. De par son expérience et sa place dans le groupe qui se traduit par le brassard de capitaine qu'il arborait encore aujourd'hui pour sa 109e sélection.

Mais aussi parce que l'ADN de sa sélection va reposer sur l'assise défensive qu'elle parviendra à avoir lors des prochaines rencontres. Après une phase de poule où l'euphorie prédominait lors des deux premiers matches (victoires 5-0 puis 3-1, respectivement face à l'Arabie Saoudite et l'Egypte), la gifle infligée par l'Uruguay (0-3) avait rappelé ses propres limites au pays hôte.

Rugueuse, recroquevillée dans sa moitié de terrain pendant presque 120 minutes ce dimanche, la Russie a montré tout ce pourquoi elle était redoutable. Honni soit le beau jeu. Pour les joueurs de Stanislav Cherchesov - qui ont réussi seulement 191 passes - pour lesquels seul le résultat compte. Forcément, dans ce système, Akinfeev, ambassadeur de ce Mondial russe, a plus d'importance que jamais.

Décevant en 2014 pour sa première Coupe du Monde - après un Euro 2008 où il avait conquis pas mal d'observateurs - il n'avait pas encore effacé tous les doutes qui l'entourait jusqu'ici. Mais il a réussi son grand rendez-vous cette fois, comme une revanche. Impuissant sur le but contre son camp d'Ignashevich en début de rencontre (11e), il a ensuite réalisé plusieurs interventions importantes en avant de devenir essentiel en fin de match, quand l'Espagne a enfin accéléré. Il y a eu, surtout, cette double parade à la 85e minute face à Iniesta puis Aspas, puis celle face à Rodrigo lors de la prolongation (109e).

Il fut ensuite magistral lors de la séance de tirs au but, repoussant la tentative d'Aspas donc, mais aussi auparavant celle de Koke. Alors que toute l'Espagne s'attendait au réveil de De Gea, c'est bien Akinfeev - forcément nommé homme du match - qui tire la couverture à lui aujourd'hui : "Igor représente un véritable modèle pour des millions de jeunes Russes. Il réunit des qualités humaines et sportives remarquables. C'est un grand professionnel et un garçon charmant", disait de lui Vitaly Mutko, ex-ministre des sports russe et désormais vice-premier ministre, en 2012.

"En 2018, les espoirs de l'équipe de Russie reposeront certainement en partie sur ses épaules", avait-il déjà prédit à l'époque. Il ne s'est pas trompé, et quoiqu'il arrive, Akinfeev a écrit un nouveau chapitre glorieux de son histoire, pour confirmer un peu plus son statut d'icône du peuple russe. De là à faire de l'ombre à Vladimir Poutine lors des quarts de finale vendredi, en cas de nouvelle grosse performance ?