Kanté n’est pas la solution idéale, mais c’est de loin la meilleure

Il s’est présenté face aux micros la tête rentrée dans les épaules comme s’il s’excusait d’être là. Il flotte dans son tout nouvel ensemble siglé équipe de France, d’un bleu roi éclatant. Les manches sont un peu trop longues, les épaules un peu trop larges. Une heure plus tôt, sur la pelouse, il a parfaitement épousé les contours de son nouveau costume : celui de sentinelle. N’Golo Kanté cultive ce paradoxe, dès qu’il chausse les crampons, c’est un autre homme. Didier Deschamps a parié sur lui pour succéder à Lassana Diarra et il a eu raison.

Bien sûr, Kanté n’est pas une sentinelle naturelle. Mais personne n’imaginait une telle trajectoire en juin 2015 alors qui peut dire qu’il n’a pas l’étoffe du poste ? Aujourd’hui, l’ancien Caennais n’a pas touché ses limites et personne ne les connaît. Il n’y a qu’à voir avec quelle facilité il s’est fondu dans le rôle laissé vacant par Lassana Diarra. Ce n’était que l’Ecosse ? Bien sûr. La Roumanie et l’Albanie seront-elles beaucoup plus menaçantes ? Sans doute. Mais ce n’est pas leur potentiel offensif qui doit inquiéter les Bleus.

Si tout se passe bien, la France ne devrait pas rencontrer une tête de série avec les quarts voire les demi-finales. Kanté aura quatre ou cinq matches pour prendre ses automatismes, ses repères, engranger de la confiance et prendre de l’épaisseur. S’ils restent sur la même dynamique, les Bleus sont censés dominer leur match et avoir le ballon au moins jusqu’en 8e. Le profil plus relayeur, moins protecteur, de Kanté est beaucoup moins problématique quand la bande à Pogba a l’initiative du jeu.

Entendons-nous bien, il n'affiche pas les mêmes garanties que Diarra au poste de sentinelle. Enfin celui du début de saison quand il cassait tout à l’OM, soit jusqu’à janvier dernier. Oui, Kanté n’est sans doute pas la solution idéale. Mais ce n’est pas la peine de la chercher, elle n’existe pas. Yohan Cabaye a vécu une saison difficile à Crystal Palace au poste… de relayeur. Ses dernières prestations en Bleu au poste de numéro 6 étaient de moins en moins convaincantes. Schneiderlin n’a pas, lui non plus, joué en sentinelle cette saison à Manchester. Comme Cabaye, sa saison en Premier League n’a pas convaincu. Sur la forme du moment, Kanté est à des années-lumière des autres postulants. Son match face à l’Ecosse témoigne de sa capacité d’adaptation. Kanté est simplement un surdoué.

Certes, il a dû freiner son penchant naturel vers l’avant. Mais sa présence a rassuré Paul Pogba et Blaise Matuidi. Ses deux compères de l’entrejeu ont pu profiter de son abattage pour prendre le large et s’aventurer dans les 16 mètres adverses. Si Matuidi fut le Bleu le plus dangereux avant la pause avec trois occasions franches, l’ancien Caennais y est forcément pour quelque chose. Lui qui n’a perdu qu’un seul ballon. L’entrée en jeu de Cabaye au poste de relayeur l’a un peu plus installé dans ses nouvelles fonctions et dissipé les dernières hésitations. Sauf blessure, il débutera face à la Roumanie après avoir insufflé une bonne dose de sérénité à une équipe qui en manquait cruellement. Diarra n’est plus là, certes. Mais son forfait est soudainement moins catastrophique.