Après l'élimination de la France en quarts de finale contre l'Allemagne : les tirs au but, le retour du mal bleu
ParLoris Belin
Mis à jour 20/07/2025 à 15:29 GMT+2
Les Bleues ont dit au revoir à l'Euro samedi, battues par l'Allemagne en quarts de finale au terme de la séance des tirs au but. Le même scénario que deux ans plus tôt lors de la Coupe du monde. Cet exercice poursuit décidément l'équipe de France, masculine comme féminine, au XXIe siècle. L'historique, comme le différentiel de préparation avec les Allemandes, renforce la frustration.
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Video credit: Eurosport
C'est l'autre plafond de verre de l'équipe de France féminine. Bloquées à ce stade des quarts de finale en grandes compétitions internationales, les Bleues ont pris pour fâcheuse habitude de tomber au bout du bout : lors de la séance des tirs au but. Samedi contre l'Allemagne, rebelote. Les Tricolores ont fini par flancher 6-5 sur un ultime échec de la jeune Alice Sombath, poursuivant cette "malédiction" qui touche plus largement la sélection nationale sans distinction de genre.
Cet Euro 2025 s'inscrit dans la longue tradition des immenses frustrations pour les Tricolores dans les grands rendez-vous et cet exercice des tirs au but. Au XXIe siècle, onze fois l'équipe de France, hommes et femmes confondus, ont fait face à ce scénario, pour trois petites victoires seulement. Le bilan est un peu rehaussé par la récente réussite des joueurs de Didier Deschamps, victorieux du Portugal en quarts de finale de l'Euro 2024 (5-4, échec de João Felix sur le poteau) puis de la Croatie en quarts de finale de la dernière Ligue des nations (5-4), où Mike Maignan avait arrêté deux tentatives. Avant le portier de l'AC Milan, spécialiste du genre, aucun gardien de l'équipe de France masculine n'avait arrêté un tir au but depuis… la Coupe du monde 1998 et la parade de Fabien Barthez face à l'Italien Demetrio Albertini. Une éternité.
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Mike Maignan, décisif lors de la séance de tirs au but entre la France et la Croatie (Ligue des nations).
Crédit: Getty Images
Le bilan est encore plus cruel pour les Bleues, battues à cinq reprises lors de leurs six séances de tir au but disputées depuis 2009 :
- Euro 2009 : défaite 4-5 contre les Pays-Bas en quarts de finale
- Coupe du monde 2011 : victoire 4-3 contre l'Angleterre en quarts de finale
- Euro 2013 : défaite 2-4 contre le Danemark en quarts de finale
- Coupe du monde 2015 : défaite 4-5 contre l'Allemagne en quarts de finale
- Coupe du monde 2023 : défaite 6-7 contre l'Australie en quarts de finale
Il y a deux ans déjà, dans une séance dantesque qui s'était éternisée jusqu'au 20e tir, la formation alors emmenée par Hervé Renard s'était cassée les dents sur ces maudits tirs au but, contre les Australiennes. Renard avait toutefois "innové" en tentant un coup de poker : faire sortir Pauline Peyraud-Magnin à la dernière minute de la prolongation pour faire entrer Solène Durand, meilleure face aux tireuses adverses. Durand avait été à la hauteur, stoppant deux tentatives, insuffisant toutefois pour briser la mauvaise série.
"J'ai préféré ne pas trop prendre la tête avec cela aux joueuses"
Laurent Bonadei s'est souvenu de cette rencontre, lui qui était alors adjoint de Hervé Renard. Mais il a décidé d'aller à contre-courant de son prédécesseur. "On avait beaucoup travaillé les tirs au but avant la Coupe du monde 2023, s'est-il remémoré vendredi en conférence de presse avant le quart de finale contre l'Allemagne. J'ai préféré ne pas trop prendre la tête avec cela aux joueuses, on ne sait pas comment ça peut se passer en match." Une version à peine remixée de la fameuse "loterie" évoquée par Didier Deschamps durant l'Euro 2016, et de ce refus de préparer ces séances qui l'ont longtemps poursuivi. "Je ne l’ai jamais fait parce que j’estime que tirer des penalties à l’entraînement en toute décontraction et en match avec une énorme pression, ça n’a rien à voir", assurait-il alors. "Hier (jeudi), entre la Suède et l'Angleterre, on a vu beaucoup de pression, de fatigue, c'est un contexte différent de l'entraînement, a abondé Laurent Bonadei. Les joueuses s'entraînent de façon individuelle, à leur rythme, à la fin des séances."
Les intéressées se refusaient d'y voir une excuse samedi, non sans abattement. "Malheureusement, on est arrivé à cette séance de penalties qui n'est pas une loterie parce que ce sont des gestes techniques, mais c'est comme ça, a déploré la capitaine Griedge Mbock à TF1. C'est la loi du sport, il faut accepter." "C'est le football, on ne peut pas tout gérer, on ne peut pas tout régler", a insisté Grace Geyoro à TF1. "Les penalties, c'est une chance sur deux, je n'ai pas les mots, je ne sais pas quoi vous dire", a soupiré Selma Bacha en zone mixte. Pour la gardienne Pauline Peyraud-Magnin au micro de TF1, "finir sur des penalties, sortir comme ça, c'est toujours la pire des manières".
L'Allemande Berger avait, elle, tout prévu
Elle est d'autant plus pénible que l'écart de préparation entre les deux équipes face à cet exercice a éclaté aux yeux du monde entier. Une caméra de TF1 a montré en toute fin de match la gourde de la gardienne allemande Ann-Katrin Berger recouverte d'un pense-bête avec les habitudes des Françaises sur penalty, et la zone privilégiée vers laquelle plonger. L'antisèche avait vu juste pour Amel Majri et Alice Sombath, qui ont vu leurs frappes être détournées par Berger aux endroits indiqués au dernier rempart allemand.
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Ann-Katrin Berger, la gardienne de but de l'Allemagne, et sa gourde antisèche contre la France en quarts de finale de l'Euro, le 19 juillet 2025
Crédit: Getty Images
"C'est les aléas du direct, tu penses qu'elle va la mettre là, toute sa vie elle a tiré de ce côté, mais au final elle te la met de l'autre… C'est comme ça", a estimé son homologue Pauline Peyraud-Magnin, qui n'a pas détourné de tentatives adverses durant les tirs au but comme elle avait su le faire sur le penalty de Sjoeke Nüsken à la 69e minute. Si les tirs aux but étaient bien une "loterie", comment la nommer quand on tombe quasi systématiquement sur le mauvais ticket ?
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