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Au Barça comme avec la Roja, Xavi a joué dans la cour des grands : il raconte

François David

Publié 22/09/2014 à 20:03 GMT+2

Dans une interview accordée à Canal Plus Espagne, l’emblématique milieu de terrain du Barça et de la sélection espagnole revient sur sa riche carrière. Un témoignage passionnant, qui en dit long sur une époque. Morceaux choisis.

Xavi, le milieu de terrain du Barça, raconte sa carrière avec les Blaugrana et la Roja.

Crédit: Eurosport

Il y a quelques heures, Canal Plus Espagne a proposé une fantastique interview d'un Xavi retraçant toute sa carrière de manière simple et détendue. Un trésor pour les futurs "historiens" du football moderne, qui pourront, à travers l'un des joueurs les plus importants de ces dix dernières années, analyser la place du Barça et de la sélection espagnole dans l'histoire. Plongez-vous dans cet entretien de haute volée, regroupé ici par thèmes. Cela vaut le coup.

Le Barça

Ses débuts : "C'était contre Salamanca en 1998. Il y avait beaucoup d'étrangers dans l'équipe. van Gaal croyait dans les joueurs hollandais. Cocu, les frères De Boer, Zenden, Kluivert, Bogarde... La Masia continuait de travailler pendant ce temps-là. Notre génération est arrivée à maturité avec Guardiola. Dans chaque grande équipe du Barça, il y a toujours eu deux ou trois joueurs formés à la Masia. Ce jour-là, je débute au poste de Guardiola, celui de Busquets aujourd'hui. Je devais organiser l'équipe de derrière, assurer les couvertures quand le défenseur latéral ou le milieu relayeur montaient etc... Ce n'est qu'avec Rijkaard que je suis monté d'un cran, 15-20 mètres plus haut. Franck m'a dit : ‘Tu dois être décisif dans la dernière passe’. Sans Rijkaard, je restais dans un rôle de milieu défensif. Mon rôle fut alors de déclencher le pressing et d'être plus décisif dans l'élaboration finale. On a vu un nouveau Xavi avec Rijkaard. Les plus jeunes ne savent pas que j'étais milieu défensif avant."
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Xavi en 1998 (Barça)

Crédit: Imago

Sa philosophie : "Pour moi, le football se crée au milieu de terrain. Après, le foot te permet de gagner en ayant moins bien joué que l'adversaire. Mais je pense que si tu as de bons milieux de terrain, une bonne organisation, que tu prends l'initiative constamment, tu as plus de chances de gagner. La Hollande des années 70 restera dans l'histoire bien qu'elle n'ait rien gagné. Tout simplement pour avoir donné du plaisir aux gens et jouer un football total."
La possession : "On me taxe d'intégriste de la possession de balle. Non. Pour moi, tous les systèmes, toutes les idées, sont valides et font la grandeur du football. Simplement, je préfère avoir le ballon et être celui qui prend l'initiative, qui attaque constamment. Il faut comprendre une chose : on défend avec le ballon. Au Barça, on ne travaille pas beaucoup l'aspect défensif. Nous ne sommes pas l'Atlético ou Chelsea. On aime avoir le ballon pour combiner, faire une triangulation, rechercher l'espace... Tout ça, on le travaille au Barça depuis l'enfance."
La révolution Guardiola : "Nous avions l'habitude de travailler la sortie de balle. Pep a voulu inclure Victor (Valdès) pour faire un joueur ‘de plus’ sur le terrain et donc apporter la supériorité grâce au défenseur central, au latéral... Le jour du 2-6 à Madrid, un tournant, on est surpris à la compo des équipes. Pep dit que Samuel (Eto'o, ndlr) jouera sur le côté. Surpris car Samuel était le meilleur avant-centre du monde à cette époque. Tout ce qu'il nous apportait en buts, pressing, libération de l'espace... c'était un show Samuel. Mais Pep savait que le Real allait nous prendre individuellement au milieu. Il a donc mis Leo un peu en retrait pour nous donner la supériorité au milieu. Quatre contre trois. Pep savait aussi que les centraux du Real n'allaient pas sortir sur Léo, par peur sûrement. C'était simple mais bien pensé."
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Pep Guardiola et Xavi, avec le Barça.

Crédit: Imago

La mort de Vilanova : "Une grande peine. C'était un enfant du Barça, mais plus que ses idées sur le football, Je retiens son côté humain. Il nous a apporté tellement de choses... L'histoire lui rendra sa juste place en l'associant aux succès du Barça de Guardiola. Il savait quel était son rôle d'adjoint, mais à partir du moment où il est passé numéro 1, il le fit avec tact et autorité. Une encyclopédie du football. Il nous disait qu'il croyait à fond avec nous. C'était une belle époque, on avait l'impression de revenir en cadets."
Les critiques sur le Barça monotone : "Le jeu du Barça dépend de celui qui n'a pas le ballon. Surtout les attaquants. Ce sont eux qui bougent la défense. Nous, les passeurs, avons besoin de ça, de démarquages, de ruptures. Sans mouvement devant, la possession ne sert à rien. Depuis deux-trois ans, on a péché là dessus. Tout le monde voulait le ballon dans les pieds et ne bougeait plus devant... Du temps de la splendeur de Guardiola, on récupérait le ballon sitôt l'avoir perdu. On a un peu perdu ça aussi et le rival a su s'adapter. On bosse tout ça avec Luis Enrique. "

La Roja

"J'ai pris de l'importance grâce à Luis Aragones, l'homme qui m'a le plus marqué humainement parlant, même devant Pep. Luis avait décidé de se séparer de Raul. Raul était le guide de notre génération. C'était notre grande star. Grâce à son nom, on savait que l'Espagne comptait en Europe. C'était un leader, un excellent capitaine. J'ai des souvenirs forts avec lui. Un grand professionnel, très fort dans les rapports humains. Luis m'a alors dit de prendre l'équipe en main. L'apport de Marcos Senna a été fondamental lors de l'Euro 2008. Il couvrait tout le terrain. Moi, je n'avais plus qu'à organiser l'équipe. Et devant moi, j'avais Iniesta, Villa, Torres, Silva ou Cesc... On jouait avec deux pointes. C'est l'époque où j'ai pris le plus de plaisir en sélection. Avec Del Bosque, cela a un peu changé tactiquement. Xabi Alonso est entré dans le onze. Par la force des choses, les deux se sont placés en milieu défensif et moi, j'ai dû me mettre en 9,5. J'aimais moins. J'ai du mal à être dos au but. Je préfère avoir tout le terrain devant moi et avoir six ou sept options de passe. A l'Euro 2012, on a certainement baissé de niveau. La raison est que nous avions beaucoup de joueurs qui demandaient le ballon dans les pieds et nous n'avions plus la profondeur de Villa et Torres. Regardez la finale contre l'Italie (4-0) : sur le but d'Alba, je suis le joueur le plus avancé. Moi! Je n'ai aucune passe en profondeur possible. Heureusement que Jordi arrive comme une flèche. La passe est dans le ton, ça a fait but. Lors de cette finale, oui, j'ai pris plus de plaisir que durant la compétition. Avant, j'avais été critiqué d'ailleurs car je n'étais pas décisif. J'aurais dû partir après ce match, mon meilleur du tournoi. L'équipe devait changer de cycle. J'avais 32 ans, dont 20 en sélection... Mais Del Bosque avait tant insisté, les autres aussi, le Mondial était au Brésil que finalement, je suis resté. Une erreur après coup. Je regrette aussi de ne pas avoir joué contre le Chili au Mondial (0-2). Un choix du sélectionneur. Je lui ai dit que je ne voulais avoir aucun problème, mais oui j'ai été déçu."

Ses entraîneurs

Van Gaal : "Un homme droit, direct. Sans compromis, ni avec les joueurs ni avec la presse. Il était tellement honnête que parfois, il s'engueulait avec les journalistes... Ici, si tu ne maîtrises pas l'environnement, tu te fais tailler. C'est ce qui lui a manqué au Barça. Mais dans le vestiaire, c'était un entraîneur respecté. Un leader total. Qui suivait ses idées que ça plaise ou non."
Guardiola : "Mon père footballistique au Barça. Tout ce que l'on apprend à la Masia, Pep le reproduisait parfaitement sur le terrain. Savoir quand garder le ballon, quand la donner en première intention, jouer la tête levée... Quand il reprit l'équipe en 2008, je venais d'être champion d'Europe et, éventuellement, j'envisageais un départ... Pep m'a tout de suite dit qu'il avait besoin de moi. Il a perfectionné les systèmes de Rijkaard, de Cruyff. Il analysait parfaitement l'adversaire, voyait là où on pouvait faire mal... Il contrôlait tous les aspects du jeu. Je revois ça chez Luis Enrique."
Tata Martino : "Il a du mal à s'adapter. Si tu n'es pas formé au Barça, c'est dur de comprendre ce que c'est vraiment. Tata est un super mec, un très bon entraîneur, mais l'environnement est dur à comprendre. C'est comme un joueur nouveau qui arrive chez nous, des fois, il doit halluciner... Malheureusement, on n'a rien gagné la saison dernière. Tata a aussi dû vivre la succession de Guardiola, Tito... Il a fait du bon travail. Mais en dehors du terrain, on n'a jamais eu de tranquillité. La mort de Tito, les blessures de Messi, Neymar... C'est dommage. Quand tu arrives au Barça et que tu es nouveau, tu ne pars pas de zéro, tu pars de -10. Il faut le savoir aussi."
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Gerardo 'Tata' Martino, Xavi Hernández y Cesc Fàbregas (Barcelona)

Crédit: AFP

Luis Enrique : "J'ai les mêmes sensations que quand Pep est arrivé. Il est super prêt. On peut faire de supers saisons avec lui. Son staff technique est fantastique. C'est un leader, le même qu'il était lorsqu'il jouait. On travaille énormément avec lui, mais on ne s'en rend pas compte. Tout est calculé à la minute près. Impressionnant".

Les joueurs qui l'ont marqué

Messi : "Le premier jour d'entraînement avec lui, j'ai été subjugué par la facilité avec laquelle il éliminait en un contre un. C'est le plus dur dans le football moderne. Je me suis dit : ‘mon dieu, ce gamin a tout. S'il progresse encore, il sera merveilleux’. C'est ce qu'il a réussi. Leo est le meilleur joueur avec qui j'ai joué. En plus, c'est un gagneur. Il n'y a aucune comparaison possible avec un autre."
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Xavi avec Lionel Messi (Barça).

Crédit: Reuters

Figo : "C'était une merveille de joueur, Luis. Un leader sur et en dehors du terrain. Quand nous nous faisions sifflés au Camp Nou, il voulait toujours le ballon. Et lui se faisait applaudir. C'était le Messi de l'époque. Pour nous, cela a été un choc de le voir partir au rival éternel... Là, ils nous ont tués. Le Barça a mis plusieurs années à s'en remettre. Mais c'était un joueur fabuleux Luis, fabuleux... Il centrait bien, dribblait bien, jouait avec les deux pieds. C'était le meilleur joueur du monde pour moi, avec Rivaldo."
Rivaldo : "Extraordinaire... Il avait une telle facilité pour marquer. Et quand il se tournait pour se mettre sur son pied gauche, tu savais qu'il allait se passer quelque chose. Rivaldo était rapide physiquement et rapide pour prendre les décisions. Tout ce qui fait le foot moderne. Messi, par exemple, est le meilleur dans ses deux aspects. Rivaldo l'était aussi à son époque. Il pouvait faire des courses de quarante mètres, il centrait parfaitement et il marquait tellement de buts... Un partenaire fantastique, comme Luis (Figo)."
Ronaldinho: "Il a changé le jeu du Barça à une époque où l'on était perdus. Je me souviens que l'on ne voyait pas beaucoup de maillots du Barça à Barcelone, mais Ronnie a tout changé. Son sourire, sa manière de voir le football, sa faculté à mettre des buts. Il a été à l'origine de notre renouveau."
Ibrahimovic : "Je crois qu'il a fait une bonne saison avec nous. Il n'est resté qu'un an, c'est donc dur de faire un bilan. Le problème d'Ibra à Barcelone est qu'il a un jeu anarchique. Il aime être seul devant, être le protagoniste. S'associer, combiner avec les autres, c'est-à-dire l'essence même du jeu du Barça, Ibra avait du mal à le faire."
Pirlo : "Un modèle. Des fois, je regarde la Juve à la télé pour lui. J'aime les milieux de terrain décisifs et bons passeurs. Pirlo, mais aussi Iniesta, Busquets, Cesc, Xabi Alonso ou Cazorla. J'aime le football et je vais à Londres incognito quand je peux pour voir Cazorla. Pirlo va toucher 100 ballons par match et comptez, 10-12 passes sont des occasions de buts. Il a changé la Juve et la sélection italienne. Un spectacle à lui tout seul. Je suis fan."
Iniesta : "Parler d'Andres est facile : c'est le joueur espagnol le plus talentueux de l'histoire. Au-delà du terrain, c'est un ami. C'est un homme qui ne se prend pas la tête, parle directement. Dans le jeu, il te change le rythme sur une accélération, voit le jeu, frappe des deux pieds. Jouer avec lui est un régal."

Son futur

"Je resterai dans le foot. C'est ce que je sais faire. Que ferais-je sans ce sport ? A Barcelone, ce serait génial. Soit entraîneur si j'ai le diplome, ou dans la direction sportive, choisir les joueurs... c'est ce que j'aime. J'aime tellement le Barça que j'ai demandé au club de refuser toutes les offres de clubs européens cet été pour ne pas risquer de l'affronter en Ligue des champions. Mais mon étape professionnelle est bientôt finie."
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