Ligue 1 - ASSE - Lille - Rennes - Garcia, Gourcuff, Bielsa : La L1, cimetière des élégants ?

Ils étaient venus pour le jeu, pour l'audace, pour leur dévotion à l'esthétisme. Christian Gourcuff, Oscar Garcia et Marcelo Bielsa, puisque c'est eux dont il s'agit, devaient régaler le championnat de France. Ils n'ont pas survécu très longtemps cette saison à la L1. Soit parce que la dictature du résultat a fini par avoir raison de leurs belles intentions, soit parce qu'ils n'avaient pas les moyens de leurs ambitions. Les raisons sont différentes, le résultat reste le même : trois départs très tôt dans la saison.

Tous n'ont pas connu pareille infortune. Parmi les nouveaux venus de l'été, Claudio Ranieri brille avec le FC Nantes. Il est le seul. Avec une identité forte : les Canaris, troisième défense de L1, cadenassent. Le tacticien italien a su s'adapter aux caractéristiques de son effectif. Dans un autre contexte, à Monaco, pour la saison de la remontée de L1, Ranieri et Monaco s'étaient montrés flamboyants. Alors la L1 a-t-elle eu raison des Garcia, Gourcuff et Bielsa ? Est-ce leur goût du jeu qui les a précipités dans le vide ? Leurs trois cas sont à dissocier.

Les torts sont partagés. D'abord ceux d'un entraîneur avec des principes stricts. Garcia est un adepte de Johan Cruyff sauf que l'ASSE n'a pas grand-chose à voir avec l'Ajax des années 70. L'an dernier, les Verts présentaient déjà la 11e attaque de L1 et une animation offensive poussive. Il ne faut pas s'attarder très longtemps sur leur effectif pour comprendre que leur point fort réside plutôt autour de sa base défensive autour de Perrin et Ruffier plutôt que dans une attaque où fleurissent les erreurs de casting.

Mais Garcia s'est obstiné à vouloir développer un jeu de passes au sol sans que Saint-Etienne ait les moyens de ses ambitions. Le déclassement des Verts ces dernières semaines et la volée reçue lors du derby (0-5) ont sans doute fait le reste. Garcia s'est aussi confronté aux manques de moyens mis à sa disposition et il a préféré claquer la porte. L'incompatibilité entre l'intransigeant Catalan et une ASSE incapable de lui offrir ce qu'il réclamait a fini par avoir raison de leur histoire commune.

Une équipe trop jeune qui ne connaît pas la L1, peu de progrès dans le jeu, des relations tendues avec Luis Campos et une place de 19e : voilà pourquoi le LOSC a choisi de se séparer celui sur lequel il avait tant misé. Bielsa incarnait pourtant le projet lillois. Les dirigeants nordistes lui auraient posé un ultimatum : du changement ou un départ. Mettre de l'eau dans son vin, revoir ses principes ? Impossible pour l'Argentin. Gerard Lopez, qui fut longtemps son plus fervent admirateur, n'a plus supporté de voir Lille végéter à une place indigne des investissements consentis cet été (près de 65 millions d'euros). Lille et son propriétaire ont fini par perdre patience. La fracture nette avec le vestiaire n'a pas arrangé les choses. Bielsa n'a pas disposé du temps nécessaire pour mettre en place un projet ambitieux et qui réclamait du long terme.

Après une saison très moyenne et 12 journées décevantes, l'histoire a fini par se terminer. Le départ de René Ruello combiné à la médiocrité des résultats ont principalement eu raison de Christian Gourcuff. En Bretagne, comme lors de sa première aventure au SRFC, son management lui a été reproché : trop borné, son obstination à jouer en 4-4-2 et à faire entrer des joueurs dans son moule. Gourcuff a déjà réussi en L1 avec Lorient. Mais à Rennes, il n'a jamais su mettre en place ce qu'il théorise si bien.

Plus que leur amour du jeu, c'est l'absence de compromission qui a plombé ces trois coaches. Mais l'un ne va sans doute pas sans l'autre. Apeurés par un début de saison raté, Rennes et Lille ont fini par les désavouer alors que l'ASSE s'est heurtée à son manque de moyens. La L1 n'est pas pour autant incompatible avec le beau jeu. Le PSG depuis plusieurs saisons et l'AS Monaco, après avoir gardé confiance en Jardim malgré quelques turbulences, l'ont prouvé. Encore faut-il leur donner les moyens de réussir et/ou faire preuve d'un peu de patience.