Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

L'arrivée de Mauro Icardi au PSG, ça change quoi tactiquement ?

Christophe Kuchly

Mis à jour 06/09/2019 à 10:32 GMT+2

LIGUE 1 - Dernier arrivé dans la capitale, Mauro Icardi apporte une variété à l’attaque parisienne. Mais son profil amène aussi des interrogations sur l’animation défensive. Un casse-tête qui risque de rapidement se poser à Thomas Tuchel.

Mauro Icardi avec le maillot du PSG

Crédit: Eurosport

Un match, deux talonnades, une même idée. Nous sommes le 18 mars 2018 et l’Inter se déplace sur le terrain de la Sampdoria. Face à son ancien club, un attaquant est décidé à briller. Et Mauro Icardi ne se manquera pas en réussissant un quadruplé en à peine plus de vingt minutes, portant les siens vers un succès 5-0.
Le spectacle, débuté par un penalty et achevé par une volée avec rebond, contient donc deux talonnades. La première, un enchaînement instinctif alors qu’il s’éloigne des cages, surprend tout le monde. La seconde, réalisée par son coéquipier Rafinha, est repoussée par le gardien… dans ses pieds, l’Argentin ayant été le plus prompt à lire la situation. Deux actions d’instinct, l’une dans l’exécution et l’autre dans la lecture, pour un même résultat : un but de pur numéro 9.

Excellent finisseur

Mauro Icardi, ce n’est pas que cela. Mais le petit nouveau du vestiaire parisien est d’abord un excellent finisseur, dont les gestes se veulent décisifs. Un joueur de surface qui peut s’aventurer en dehors pour mieux y revenir, sa faculté à servir de point d’appui visant à faire vivre les actions qu’il se chargera ensuite de conclure. Plus adapté au football actuel que le profil de pur renard, incarné par Pippo Inzaghi et David Trezeguet au tournant des années 2000, il n’en reste pas moins limité dans sa capacité à mener le jeu. En clair, il est un attaquant qu’on trouve en "bout de chaîne", dont le nombre de buts dit beaucoup de la qualité des performances.
Heureusement pour lui, les chiffres légitiment l’exercice de style. Avant la saison dernière, marquée par divers problèmes avec la direction interiste, il restait sur l’excellent total de 91 buts en 4 saisons, avec une surperformance constante par rapport aux statistiques avancées (expected goals). En clair, si Icardi a beaucoup marqué, il le devait plus à sa capacité à bien finir les actions qu’au nombre d’occasions créées par ses partenaires – ce qui suppose une capacité à répéter les performances sur la durée dans un autre contexte. Bon de la tête, rapide dans ses enchaînements et doté d’une lourde frappe, il est une menace dès que le ballon s’approche du but. A ses partenaires de faire en sorte d’arriver dans la zone dangereuse.
picture

Mauro Icardi - 2019

Crédit: Getty Images

Nouveaux circuits offensifs ?

Et c’est là que son apport à l’attaque du PSG semble le plus intéressant. Même si le championnat semble souvent gagné avant d’avoir débuté, la Ligue 1 représente le quotidien des Parisiens. Un quotidien où, même si quelques audacieux peuvent tenter de presser (Lyon ou Marseille lors des dernières saisons) ou relancer court (Rennes avant la trêve), il y a beaucoup de blocs bas. Des équipes défensives qui cherchent plus à protéger leur but qu’à empêcher la construction, et obligent les hommes de Thomas Tuchel à trouver des espaces dans les 30 derniers mètres.
Si les dribbles et accélérations de Neymar et Kylian Mbappé finissent généralement par payer, Icardi offre une nouvelle alternative. Encore plus qu’Edinson Cavani, dont le dernier geste n’est pas tout à fait à la hauteur de la qualité de déplacement, il rend intéressants des ballons qui paraissent anodins. Sans imaginer un PSG multipliant les centres aériens, stratégie régulièrement utilisée par le Real Madrid en Ligue des champions à l’époque de Cristiano Ronaldo, on pourrait donc rapidement voir une diversification des circuits offensifs. Et donc moins de dépendance aux deux stars de l’attaque.

Travail sans ballon

Dans l’idée, ajouter un finisseur à cet effectif semble tout à fait logique, et la faiblesse du banc parisien dans le secteur obligeait de toute façon à agir. Les échecs en Ligue des champions, qui ne peuvent être imputés à une seule cause, auraient sans doute été moins nombreux avec une plus grande capacité à convertir les avancées dans le camp adverse – en particulier le dernier face à Manchester. Mais ce recrutement peut aussi aggraver un problème récurrent : l’incapacité du PSG à agir de manière collective à la perte du ballon.
Sans être le plus gros fainéant de la planète football, Mauro Icardi est loin d’avoir l’abattage de Cavani et n’a jamais évolué dans une équipe dominant son sujet sur les transitions défensives. Aligné en pointe d’un 4-3-3 avec Neymar et Mbappé, il pourrait donc encore moins compenser les "impasses" de ses partenaires, qui donnent régulièrement l’impression d’économiser leur énergie. Le risque est évident : une équipe coupée en deux, avec un 7+3 où tous les partenaires doivent jouer les porteurs d’eau.
Viable sur le papier, la stratégie supposerait une capacité à être réaliste – ce qu’un tel trio laisse envisager – mais aussi à bien défendre sa surface. Les erreurs de la charnière lors de plusieurs matches à enjeu et le manque d’habitude d’être dans une position basse peuvent rendre sceptique. D’autant plus avec un entraîneur qui a émergé au haut niveau avec des principes opposés, et dans la foulée d’une Ligue des champions où la capacité à courir pour étouffer l’adversaire a permis d’énormes renversements de situation. En cela, et à moins de transformer l’état d’esprit (et les réflexes) d’une partie du groupe, le PSG évolue à rebours de Liverpool par exemple, où le trio Mané-Firmino-Salah met une intensité de tous les instants.
picture

Mauro Icardi

Crédit: Getty Images

Contre-courant

S’il retrouve son niveau des dernières saisons, ce qui ne fait a priori pas d’énormes doutes pour un joueur de 26 ans, Mauro Icardi devrait marquer beaucoup de buts. En championnat bien sûr, mais probablement aussi en Ligue des champions, où sa seule campagne avait été courte mais productive (4 buts en 6 matches). Sans paraître évidente vu le profil des deux hommes, une éventuelle association avec Cavani pourrait permettre aux deux de ne pas se faire directement concurrence. Après tout, l’Uruguayen, certes loin d’être un grand meneur de jeu, a régulièrement endossé le rôle en sélection et réussi de belles performances en soutien de Luis Suarez.
Mais cette arrivée va également obliger Tuchel à devoir une nouvelle fois jongler entre sa vision du jeu et l’effectif qu’il aura à disposition. Plus à l’aise que Cavani dans la capacité à faire le liant avec ses partenaires, Mauro Icardi reste défini par ses statistiques. Dans un football où les éléments les plus créatifs sont obligés d’endosser les habits d’ouvriers pour exister au haut niveau, l’Argentin est une sorte d’anachronisme. Plutôt que d’épouser la tendance du "tous meneurs, tous travailleurs", le PSG revient à la division du travail. Avec l’ajout d’un renard des surfaces et du travailleur Idrissa Gueye, il assume et donne une cohérence à son idée. A ses finisseurs d’être suffisamment efficaces pour la légitimer.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Sur le même sujet
Partager cet article
Publicité
Publicité