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Ligue 1 | "Football divertissant" et idées bien arrêtées : Fabio Grosso, le pari intrigant de l'OL
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Publié 14/09/2023 à 19:01 GMT+2
Après avoir été approché par l'OM et la Sampdoria cet été, Fabio Grosso est en passe de devenir le nouvel entraîneur de l'OL. Vainqueur du championnat de Serie B la saison passée avec Frosinone, le champion du monde 2006 possède surtout le profil d'un technicien au jeu séduisant et aux idées modernes. Il va tenter d'insuffler un vent nouveau chez les Gones.
Fabio Grosso
Crédit: Imago
L'élu, c'est donc lui. Après avoir multiplié les pistes pour trouver le successeur de Laurent Blanc, John Textor, le propriétaire de l'OL, a décidé de tout miser sur Fabio Grosso, libre sur le marché des entraîneurs depuis son départ de Frosinone en fin de saison dernière. Le héros du Mondial 2006 a devancé sur le fil son compatriote et coéquipier de l'époque Gennaro Gattuso, qui avait pourtant donné son accord à l'homme d'affaires américain. Avant de rester sans la moindre nouvelle pendant plusieurs jours. Qu'importe pour les Gones, qui s'apprêtent maintenant à retrouver celui qui a évolué au club entre 2007 et 2009 et qui est attendu ce vendredi à Lyon pour signer un contrat de deux ans selon L'Equipe.
En interne, son profil a rapidement fait l'unanimité à tous les étages du club, devenant ainsi l'alternative priorisée après les échecs des pistes Graham Potter et Oliver Glasner. Mais pourquoi a-t-il été préféré à Gattuso ? "Ce sont deux entraîneurs différents avec une carrière différente, nous confie Matteo Moretto, journaliste transalpin qui a suivi de près les négociations entre les parties pour le média espagnol Relevo. Grosso est vraiment très estimé par l'OL. Pour moi, il a été pris car il a des idées de jeu assez claires et fait pratiquer à ses équipes un football proactif." Le fait qu'il parle couramment français a également joué en sa faveur.
En Italie, sa cote n'a cessé de grimper ces dernières années, au point qu'il a fait l'objet de plusieurs offres cet été, dont une de la Sampdoria Gênes. A l'étranger aussi, d'ailleurs, puisque l'OM y a longtemps songé avant de se rabattre sur Marcelino. Un petit regret pour Pablo Longoria et Javier Ribalta, qui connaissent parfaitement le marché italien et qui auraient vu d'un bon oeil l'arrivée de Grosso sur le banc marseillais. Après des expériences ratées sur les bancs de Bari (2017-2018), l'Hellas Vérone (2018-2019), Brescia (2019) et Sion (2020-2021), l'heure du grand saut est maintenant venue pour celui dont la carrière a réellement décollé à Frosinone entre mars 2021 et juin 2023.  
Une montée sous le signe du "beau jeu"
"Ici, il a laissé un excellent souvenir avec une promotion amplement méritée, explique le journaliste Andrea Campioni, basé à Frosinone et qui a suivi le quotidien de Grosso dans le Latium. Son aventure a démarré en même temps qu'une nouvelle politique voulue par le club, celle des jeunes joueurs. Aujourd'hui, c'est l'une des équipes les moins âgées de Serie A. Un quotidien qu'il connaissait, ayant été entraîneur de la Primavera de la Juventus entre 2014 et 2017".  
Là-bas, à Turin, on se souvient d'un technicien aux idées novatrices et capable d'allier le beau jeu aux résultats, avec notamment la victoire du prestigieux Tournoi de Viareggio en 2016. Pour Grosso, le fil conducteur de sa jeune carrière d'entraîneur se résume à deux mots : le "bel calcio", soit le "beau football". Qu'importe les premiers échecs qu'il a pu essuyer, ses dogmes sont toujours restés les mêmes. Sa manière de voir et interpréter le football aussi.
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Fabio Grosso
Crédit: Getty Images
"Il est parvenu à faire monter Frosinone en Serie A avec une équipe qui pratiquait un football réfléchi, pensé, étudié et entraîné, confirme Matteo Moretto. C'est un technicien qui sait préparer son équipe durant la semaine mais capable également de gérer certaines pressions le week-end. Il a un style de jeu offensif et une manière d'entraîner bien défini." "Il disait souvent que les schémas tactiques ne sont que des numéros, poursuit Andrea Campioni. L'important, pour lui, est de voir comment son équipe occupe le terrain et gère les espaces. Il l'a démontré plusieurs fois en alignant des joueurs pas forcément à leur poste. Et cela a fonctionné. C'est un entraîneur au profil européen, sans aucun doute. Frosinone, qui s'était fixé l'objectif du top 8 en début de saison, produisait vraiment un jeu divertissant."
En deux saisons et demie, Grosso, qui a eu le temps réclamé à son arrivée, est parvenu à imposer sa patte et son style à une équipe en reconstruction. "Tout n'a pas été facile, nous sommes repartis de zéro, confiait-il début mai après avoir remporté le titre de champion. La première saison, on a manqué de trois points la zone des playoffs à cause de certains problèmes dans le rush final. Mais les joueurs ont accumulé de l'expérience et de la valeur. J'ai eu la chance d'arriver dans un club avec un grand président et un très bon directeur sportif : j'ai toujours ressenti de la confiance et de la sérénité." Une ambiance pas vraiment similaire à celle qu'il trouvera à l'OL (nous y reviendrons).
Avec les Gialloblù, le technicien de 45 ans, adepte du 4-3-3, a toujours affronté ses adversaires avec la même philosophie. Gros comme petits. "Il y avait des clubs comme Parme, Cagliari, le Genoa, qui jouaient tous la montée. Et pourtant, Frosinone n'a jamais changé son identité en montrant régulièrement un visage offensif, sans la moindre peur ou crainte, assure Campioni. C'était plaisant de voir jouer cette équipe, personne ne pouvait s'ennuyer. Les tifosi ont été tristes après son départ, pas tant pour un éventuel sentiment de trahison. Mais simplement car ils avaient envie que ça continue."  
"C'est l'équipe qui pratique le plus beau football en Serie B", écrivait même Tuttosport en janvier dernier. La lecture des matches du technicien romain a également été saluée par la presse transalpine, et ce n'est pas un hasard si ses changements ont été les plus décisifs de l'exercice 2022-2023. En 38 rencontres la saison dernière, les hommes de Grosso sont parvenus à inscrire un total de 63 buts (26 encaissés) pour atteindre la barrière 80 points. "Ce fut une saison historique avec de multiples records, dira son président Maurizio Stirpe au moment d'annoncer son départ. Avec Grosso, on a commencé à gagner en jouant bien, une chose dont nous n'avions plus l'habitude. Bravo à lui et ses joueurs pour cette montée inattendue mais méritée."
Une personnalité qui sait s'affirmer
En débarquant à Lyon, le champion du monde 2006 va toutefois se confronter à une nouvelle réalité. Ambitions, objectifs, vestiaire, pression, contexte : tout va changer. Vraiment tout. Alors, possède-t-il la personnalité pour survivre au terrible quotidien lyonnais de ces derniers temps ? Mario Balotelli vous répondra probablement que oui. Novembre 2019 : alors sur le banc de Brescia, Grosso n'hésite pas à renvoyer "SuperMario" dans le vestiaire pour un entraînement trop pris par-dessus la jambe. 
"Cela m'était déjà arrivé dans le passé, et je pense que cela m'arrivera encore, lâche-t-il le lendemain de cet épisode qui aura fait grand bruit. Je prétends de tous mes joueurs le maximum de l'intensité et de l'engagement durant les entraînements. Et quand cela n'est pas le cas, ce qui peut arriver, je préfère écarter les intéressés et mettre sur le terrain ceux qui rendent l'entraînement intense. A ce moment-là, Mario ne le faisait pas et il a été mis de côté. Je ne veux ni minimiser, ni gonfler cet épisode (...) C'est déjà arrivé (avec d'autres) et cela arrivera encore, j'espère le moins possible. Moi, je veux aider tous les joueurs, j'ai besoin de tout le monde. Mais c'est à deux de me donner les grandes réponses et me montrer leur envie."
"Ce n'est pas un 'yes man', résume Andrea Campioni. Grosso est un entraîneur qui a ses idées et qui n'hésite pas à dire ce qu'il pense quand il le faut. A Frosinone, il a imposé ses volontés à des dirigeants avec qui il s'entendait certes très bien. En début de saison, il a indiqué les nécessités pour le jeu qu'il souhaitait pratiquer. Puis il l'a mis en place. Je pense qu'il pourrait faire pareil à Lyon,même si on parle d'un tout autre club avec une autre pression." "Il sait ce qu'il veut, et il le transmet avec un discours toujours clair, lucide et précis, prévient Matteo Moretto. Il a de la personnalité à revendre, même avec la presse." Mais que nos confrères se rassurent, Grosso est un Mister relativement tranquille. "Il n'est pas du genre à manquer de respect ou tenir une distance avec les journalistes comme d'autres pourraient le faire, se remémore Campioni. Il a toujours été correct et plutôt ouvert avec nous. Tout le monde appréciait sa personne, des médias aux tifosi."
Pour Francesco Pietrella, journaliste à La Gazzetta dello Sport, l'OL a "bien fait" de tenter ce pari. Car oui, à ce niveau, il s'agit quand même d'un pari, aussi intrigant soit-il. En Italie, Grosso ne compte que 3 matches de Serie A (avec Brescia) pour 160 de Serie B (42 à Bari, 34 à l'Hellas Vérone et 84 à Frosinone). "Mais il peut réussir à Lyon, conclut Andrea Campioni, persuadé que la greffe peut prendre. Ce n'est pas un saut dans le vide, il connaît la ville et le club, c'est un avantage. Pour moi, ce choix a un sens et une logique. Je suis certain qu'il peut réussir là-bas malgré le contexte actuel et le début de saison difficile." On préfère lui souhaiter buona fortuna (bonne chance), quand même.
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Fabio Grosso
Crédit: Imago
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