Ligue des champions | Real Madrid - Borussia Dortmund | Un homme, cinq décennies : Ancelotti, "Mister" C1

Il veut écrire un peu plus sa légende. Seul homme à avoir remporté la Ligue des champions au cours de cinq décennies différentes comme joueur puis entraîneur, Carlo Ancelotti est à une marche de remporter son cinquième sacre en C1 sur un banc. Signe d'une longévité dont seul "Carletto" connait le secret.

Ancelotti est-il le plus grand entraîneur de tous les temps ?

Video credit: Eurosport

Il y avait un indice dans le titre. Au cours de l'année 2009, dans un livre co-écrit avec le journaliste italien Alessandro Alciato, Carlo Ancelotti, sourcil gauche parfaitement levé sur la première de couverture, assurait qu'il "préférait la coupe". Quinze ans plus tard, la donne n'a pas vraiment changé pour le technicien italien du Real Madrid, qui s'apprête à disputer sa neuvième finale de Ligue des champions samedi face au Borussia Dortmund. Trois comme joueur, et six comme entraîneur, six victoires, deux défaites (une comme joueur, une comme entraîneur) : la moisson a été bonne. Les années ont beau avoir passé, ses cheveux blanc brossés et son costume noir n'ont jamais paru autant à la mode. Signe de sa longévité au plus haut niveau en tant que joueur et en tant que coach, Ancelotti est déjà le seul homme à avoir remporté la Ligue des champions au cours de cinq décennies différentes (1980', 1990', 2000', 2010', 2020'). Eternel Carletto.
S'il préfère certes la coupe, donc, l'ancien entraîneur de l'AC Milan n'en oublie pas pour autant le championnat. Et ce n'est donc pas un hasard s'il est le seul entraîneur avoir été sacré dans les cinq grands championnats européens (Liga, Premier League, Serie A, Ligue 1, Bundesliga). Son palmarès ? Pêle-mêle : 4 Ligue des champions, 6 championnats, 3 Coupes du monde des clubs, 4 Supercoupes d'Europe, 10 Coupes et Supercoupes nationales...
Avec deux défaites en 54 matchs toutes compétitions confondues cette saison, il est à une marche de faire remporter au Real Madrid le triplé Liga - Ligue des champions - Supercoupe d'Espagne. Une belle revanche pour celui que les mauvaises langues ont parfois qualifié de démodé, notamment après ses passages au Napoli (2018-2019) et Everton (2019-2021). Vraie force tranquille, l'Italien au flegme légendaire n'a jamais douté de lui. Pas vraiment du genre à suivre le football théorisé d'aujourd'hui, entre xG à gogo et analyses tactiques sans fin, le "Mister" a (re)fait du géant espagnol une redoutable machine à gagner. Avec notamment l'aide de son fils et adjoint, Davide, et d'un staff au rôle capital. Impossible de ne pas citer les rôles de Francesco Mauri (assistant technique), fils de Giovanni, son ancien préparateur physique historique, Mino Fulco, qui sert de passerelle entre le département technique et médical, ou encore du "match analyst" Simone Montanaro et du légendaire préparateur physique Antonio Pintus.

"Humainement, il nous transmet énormément de calme et de confiance"

"Carlo est l'exemple à suivre si tu veux devenir entraîneur, assurait Roberto Carlos, vendredi, au micro de Sky Italia. Et sous tous les points de vue. Comme personne, entraîneur, en passant par sa manière de parler..." Pour son ancien coéquipier à Milan Ruud Gullit, Ancelotti "sait tout du football", "pas seulement la tactique", mais aussi "tous les aspects mentaux". "Il sait exploiter au mieux tous les joueurs importants", analysait l'ancien international néerlandais à la chaîne transalpine depuis Wembley, lieu de la grande finale samedi. "Sa force, c'est qu'il est une personne tranquille. Il sait que c'est une finale, mais il ne perd en rien de sa tranquillité", estimait l'ancien latéral brésilien Marcos Cafu, passé sous ses ordres en Lombardie.
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Carlo Ancelotti soulève sa deuxième Ligue des champions en tant qu'entraîneur avec l'AC Milan en 2007.

Crédit: AFP

Adoré de ses joueurs, anciens comme nouveaux, "l'homme qui murmure à l'oreille des stars" a su se réinventer et adapter son schéma tactique pour mettre en valeur Jude Bellingham, ovni de la saison madrilène. Un choix payant, couplé à une gestion parfaite des égos et un management habile, qui ont permis au Real de surmonter tous les obstacles, même lorsque tout semblait perdu comme en demi-finale contre le Bayern Munich (mené 1-0 à la 87e minute, victoire 2-1). A l'image de son club, Ancelotti ne cède jamais à la panique. Peu importe les circonstances et qu'importe le scénario. Un exemple ? Finale de la Ligue des champions 2014. L'Atlético mène 1-0 dans le temps additionnel, et le Real semble alors au bord du précipice. "Je lui demande s'il n'avait pas pas été inquiet avant l'égalisation de Sergio Ramos. Il me répond 'Pas du tout, il restait une minute'. Voilà, ça c'est Carlo Ancelotti", se remémorait Paolo Condo, grande plume du journalisme italien et désormais consultant sur le plateau de Sky.
"Je crois que notre plus grande force c'est qu'il trouve le moyen de nous laisser jouer avec de la liberté. On est un peu imprévisibles. Humainement, il nous transmet énormément de calme et de confiance", expliquait Bellingham au sujet de son coach. "On est comme père et fils", résumait le défenseur brésilien Eder Militao après la célébration du titre de champion d'Espagne. Le technicien italien est parvenu à accompagner l'éclosion de ses jeunes talents (Bellingham, Camavinga, Tchouaméni...) tout en impliquant ses éléments vieillissants (Modric, Nacho, Vasquez...) au moment opportun, au cours d'une saison plombée par les blessures.
Au lendemain de la qualification miracle face au Bayern, Ancelotti a reçu des tonnes de messages et d'appels. Sans parvenir à répondre à tous. Mais quand le téléphone a indiqué "Arrigo Sacchi", il a pris le temps de décrocher. "Il m'a dit : 'C'est une tactique, Arrigo. On fait semblant d'être morts et, d'un coup, en fin de match, on se relève et on gagne ! Ce sont tous des bons garçons qui ont compris l'importance du collectif'", écrivait l'ancien entraîneur de l'AC Milan dans sa rubrique dans les colonnes de La Gazzetta dello Sport. Carletto traverse les générations et les âges. Il voit ses anciens joueurs devenir entraîneurs, les uns derrière les autres, certains avec plus de réussite que d'autres. Mais lui est toujours là, cigare au bec et lunettes de soleil, comme dans ses images captées par le monde entier lors de la récente fête du titre de champion d'Espagne avec ses joueurs. Une proximité qui l'a toujours différencié de ses compères. "Je me comporte simplement et naturellement, racontait-il au quotidien La Repubblica mardi. Et avec du respect pour tout le monde. Pour moi, les relations personnelles viennent avant les rapports professionnels : si ton vestiaire ne fonctionne pas, c'est que tu as raté quelque chose."
L'entraîneur de 64 ans, sacré avec l'AC Milan (2003 et 2007) et le Real Madrid (2014 et 2022), s'est montré calme et déterminé à la fois, comme à son habitude, en conférence de presse vendredi. "Dans ce genre de matches, le plus important est de mettre clairement dans la tête des joueurs ce qu'ils doivent faire sur le terrain. Plus je suis clair, moins l'équipe sera nerveuse", a-t-il expliqué. Avant une finale, "je me concentre vraiment sur l'aspect tactique. Les émotions arrivent ensuite et tout le monde doit les gérer de manière individuelle. Il y aura des émotions, un peu de peur, mais la peur est une chose importante pour faire les choses bien".

"Comme si c'était ma première"

"Ancelotti a inventé un nouveau système (cette saison), l'équipe a été un roc malgré les absences à des postes-clés, je ne vois pas de meilleur entraîneur pour le Real Madrid", a estimé sur la radio Cadena Ser l'ancien joueur Alvaro Benito, devenu un commentateur très écouté. Karim Benzema parti, l'Italien n'a pas bronché et s'est adapté, en attendant Kylian Mbappé cet été. "Les blessures que nous avons eues en début de saison nous ont aidés à comprendre que la façon de les surmonter n'est pas l'individualité mais le collectif", avait rappelé Ancelotti à la veille du sacre madrilène en Liga. "Et les matchs que l'on ne peut pas gagner, on doit ne pas les perdre" avait-il résumé en février. Le parcours européen du Real illustre d'ailleurs bien ce mantra : les hommes d'Ancelotti sont proches d'une 15e C1, après avoir jusqu'à présent remporté seulement deux de leur six matches en phase éliminatoire, contre Leipzig à l'aller (1-0) et le Bayern au retour (2-1).
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"Mais quel est son secret ?" Ancelotti, l'indémodable

Video credit: Eurosport

Conscient que la Ligue des champions lui "procure des émotions uniques", comme il l'a confié au site de l'UEFA cette semaine, Ancelotti ne s'en lasse pas malgré cinq décennies derrière lui. Mais le clap de fin se rapproche inévitablement pour celui qui s'est permis de refuser - quand même - le poste de sélectionneur du Brésil. "Le football est compliqué et simple à la fois, concluait-il à la Repubblica. Mais il est quand même plus simple. Il suffit d'avoir de la passion et ne pas le compliquer, justement, avec l'obsession. L'obsession est une maladie et moi, par chance, j'ai encore beaucoup de passion. Le secret, c'est d'y mettre justement la passion et profiter du plaisir. Ce travail est aussi un jeu. Et il faut enlever le stress (...) J'arrêterai ma carrière après le Real Madrid, mais avant je veux remporter une autre Ligue des champions. Je ressens cette finale comme si c'était ma première."
(Avec AFP)
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🖕 Bellingham apprécie moyennement de se faire chambrer

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