Everton-Tottenham : Barkley a fait oublier Fellaini

Les fans d'Everton avaient de quoi craindre le début de la saison actuelle. Le départ de David Moyes, parti succéder à Sir Alex Ferguson sur le banc de Manchester United après neuf ans de bons et loyaux services à Goodison Park, n'était pas le seul à combler pour les Toffees. Il y avait également celui de Marouane Fellaini, joueur emblématique des Blues durant cinq saisons, lui aussi transféré chez les Red Devils dans les dernières heures du mercato. Everton pouvait s'attendre à souffrir tant l'impact du Belge sur son jeu, et ses résultats, était criant. Mais malgré son imposant gabarit et sa coupe improbable, son départ est quasiment passé inaperçu. Ce qui est beaucoup moins passé inaperçu, c'est l'éclosion de Ross Barkley au poste jadis occupé par le Diable Rouge.

S'il n'a que 19 ans, Barkley est déjà loin d'être l'inconnu qui débarque à Everton. Arrivé au club à 11 ans, ce Scouser pure souche sorti de la Sunday League est présenté depuis plusieurs années comme l'un, sinon le plus grand espoir du club. Il n'a pas bénéficié d'un traitement de faveur pour autant. Surclassé chez les U16 à 14 ans, chez les U18 à 15 ans, le jeune espoir des Toffees devait faire une heure de bus pour rejoindre l'entraînement après l'école, quand certains de ses coéquipiers arrivaient en Bentley. "Quand ils me proposaient de me ramener, je refusais. J'étais trop embarrassé", se souvenait-il dans les colonnes du Telegraph. Jouer dans les catégories d'âge supérieures lui a cependant permis de prendre confiance en lui, de croire en ses chances de réaliser son rêve d'enfant : jouer pour Everton. Mais Barkley reconnaît volontiers qu'il ne serait jamais arrivé jusqu'ici sans sa mère et sa sœur. "Elles m'ont permis de garder les pieds sur terre", résume-t-il.

Barkley avait des raisons de s'enflammer. A 16 ans, il se voyait déjà détrôner Wayne Rooney pour devenir le plus jeune joueur à porter le maillot de l'équipe première d'Everton. "David Moyes m'avait dit qu'il me suivait depuis que j'avais 12 ans. Je devais partir jouer un match avec l'équipe d'Angleterre U19, et il m'avait qu'il me ferait débuter chez les pros à mon retour", raconte-t-il. Au lieu de cela, Barkley est passé tout près d'une carrière tuée dans l'œuf. Durant ce match face à la Belgique, il a été gravement blessé dans un choc avec son coéquipier Andre Wisdom. Diagnostic : jambe brisée, à trois endroits différents. "En Belgique, le docteur m'a dit qu'il était possible que je ne rejoue plus jamais, reconnaît-il. Une semaine plus tard, à mon retour en Angleterre, David Moyes est venu chez nous, dans la maison familiale, pour me dire que ça allait bien se passer, que cette blessure n'affecterait pas ma carrière. Je me suis senti beaucoup mieux après cette visite."

Barkley a dû patienter près d'un an avant de retrouver les terrains. De retour pour la préparation de la saison 2011/2012, le jeune milieu offensif a enfin pu faire ses débuts chez les pros à l'occasion de l'ouverture du championnat face aux Queens Park Rangers (1-0), et a été élu homme du match par la station locale Radio City Sport. Moyes l'a fait jouer quelques bouts de matches sur l'ensemble de la saison, avant de l'envoyer s'aguerrir en prêt en 2012/2013 à Sheffield Wednesday, puis à Leeds, et de le récupérer au mois de mars pour boucler l'exercice. Malgré la confiance de son coach, et l'attention qu'il lui a porté durant sa blessure, Barkley a dû attendre la fin de l'ère Moyes pour s'imposer chez les Toffees. "J'aurais probablement pu jouer plus de matches avec Everton la saison dernière, mais j'ai beaucoup appris en étant prêté dans des clubs de Championship, reconnaît-il. Je pense que le nouveau manager me fait plus confiance, mais David Moyes m'a beaucoup aidé".

Mais c'est bien depuis l'arrivée de Roberto Martinez sur le banc des Toffees que Barkley connaît une ascension fulgurante. Le milieu offensif d'Everton s'est illustré dès le premier match de la saison en inscrivant son premier but en Premier League sur la pelouse de Norwich (2-2). Dans la foulée, il a enchaîné les bonnes prestations, au point d'être appelé en équipe d'Angleterre par Roy Hodgson. Il a ainsi fait ses débuts avec la sélection aux Trois Lions lors du large succès acquis face à la Moldavie début septembre, en qualification pour la Coupe du monde 2014 (4-0). Depuis, il s'est définitivement imposé comme un titulaire indiscutable chez les Blues, et a été de nouveau appelé pour les matches de l'Angleterre face au Monténégro (4-1) et à la Pologne (2-0). A seulement 19 ans, il a déjà de grandes responsabilités en club, et profite de l'expérience des Gerrard, Lampard et autres pour faire son apprentissage du plus haut niveau avec la sélection nationale.

Les attentes placées en lui sont d'autant plus importantes que les milieux créatifs ne sont pas légion outre-Manche. C'est à double tranchant. Etre comparé à Paul Gascoigne quand on a moins de 20 ans n'est pas sans risque pour un joueur qui a cependant déjà prouvé sa faculté à ne pas s'enflammer au cours de sa jeune carrière. "C'est vrai qu'il fait penser à "Gazza" par sa façon de conduire le ballon, mais il faut faire attention avec les comparaisons, a prévenu Martinez dans le Daily Mirror. Il a certaines choses des plus grands joueurs, ses prises de balles sont de grande qualité et sa frappe de balle est d'un niveau exceptionnel. D'un côté, il me fait un peu penser à Ronald Koeman. Mais il est très fort dans plein de domaines, et le moment est venu pour lui de maîtriser son jeu et de devenir lui-même. De ce point de vue, il est unique, et c'est pourquoi nous devrions laisser Ross Barkley être Ross Barkley " Le jeune milieu offensif a tout à y gagner. Everton aussi.