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Avant Tottenham - Southampton : On promettait l'enfer aux Saints, et puis Koeman est arrivé

Philippe Auclair

Mis à jour 05/10/2014 à 15:15 GMT+2

Cet été, Ronald Koeman a pris les rênes d'une équipe de Southampton dépouillée d'une partie de ses talents. Le Néerlandais, qui avait réussi des miracles avec Feyenoord, est plus que jamais l'homme de la situation. 

Ronald Koeman à Southampton

Crédit: Eurosport

Aussitôt cette chronique achevée, je m’en irai rejoindre les autres panélistes du jury Barclays du "joueur du mois" et du "manager du mois" en Premier League. S’il y aura certainement un débat animé autour du premier (Costa, encore? Ulloa? Pellé?), le second sera probablement élu avec une écrasante majorité – voire à l’unanimité. Il serait plus qu’étonnant que Ronald Koeman n’ait pas un trophée à ajouter à sa collection ce soir.
Southampton, promis à la descente après avoir été saigné de cinq de ses titulaires (Lallana, Lovren, Lambert, Shaw, Chambers) et de son entraîneur, Mauricio Pochettino, est aujourd’hui deuxième de la Premier League après avoir enchaîné trois victoires de rang au mois de septembre, sur Newcastle (4-0), Swansea (1-0) et QPR (2-1), ayant le culot d’aller donner une leçon de football à Arsenal sur son terrain en Coupe de la League (2-1) entre deux succès en championnat. Le chant que reprenaient les supporters des Saints au sortir de l’Emirates se passait de traduction: "Who the fuck is Pochettino?" sur l’air de The Battle Hymn of the Republic. Le langage du milieu de terrain James Ward-Prowse était moins cru, mais tout aussi direct: “nous avons oublié Pochettino”, dit-il la semaine passée. Off the record, quelques joueurs de Southampton se disent même soulagés de ne plus avoir à se soumettre aux séances d’entraînement de l’Argentin – trop usantes et trop longues à leurs yeux. Koeman, lui, aime les exercices à haute intensité, mais brefs. Dixit Ward-Prowse: "vous pouvez voir la différence dans la qualité de nos performances”. Ce qui constitue tout de même une exagération: Southampton était déjà un régal à voir jouer l’an dernier. 
Ce qui épate plus d’un, moi compris, c’est qu’il le soit demeuré. Qui l’aurait cru du temps où Morgan Schneiderlin tweetait "six années d’une aventure incroyable DETRUITE en une heure!!!", après avoir vu quelques-uns de ses coéquipiers les plus précieux être vendus au plus offrant ? Ce Schneiderlin qui affichait son dépit de façon aussi publique le 29 juillet est aujourd’hui l’un des piliers cette équipe à la fois joueuse, agressive et dure au mal, et, tiens?, ne ferait pas un si mauvais "joueur du mois" que ça quand on songe au rôle de plus en plus important qu’il joue dans son équipe. Que Koeman soit parvenu à calmer la colère du jeune Alsacien et à faire tourner court ses envies de départ – sans doute vers le Tottenham de Pochettino, l’adversaire de ce week-end – montre qu’on n’a pas seulement affaire à un technicien qui domine son sujet sur le terrain d’entraînement, mais aussi à un homme qui sait gérer les ressources humaines à sa disposition.

Sauveur de Feyenoord

Peut-être n’est-on surpris de ce que Koeman est en passe d’accomplir que parce qu’on ignore ou qu’on sous-estime le travail qu’il a accompli précédemment. Dans l’esprit du public anglais, il demeure un ex-grand joueur, le placeur de mines du FC Barcelone et des Oranje. Le parcours du manager, accompli presque exclusivement aux Pays-Bas (avec deux interludes d’une saison à la tête de Benfica et de Valence, à qui il fit d’ailleurs gagner la Copa del Rey), n’est connu que des rares hipsters à suivre la Eredivisie. Ceux-là vous diront que Koeman a été champion avec Ajax et le PSV; qu’il a même fait le doublé coupe-championnat avec le premier, en 2002. Et ils insisteront sur le miracle continu que furent ses trois saisons à Feyenoord, de 2011 à juin de cette année. 
Le club de Rotterdam était au bord de la faillite lorsque Koeman (qui y avait fini sa carrière de joueur*) en prit la charge; mais, incroyablement, en s’appuyant sur un groupe de jeunes formés au club, il amena Feyenoord en Ligue des Champions. Et regardez le squad de vingt-trois joueurs que Louis van Gaal mena à la troisième place du dernier Mondial. Quelle équipe y était la plus représentée? Oui, Feyenoord, avec cinq joueurs – Clasie, Kongolo, Martins Indi et le duo défensif Janmaat-De Vrij, indéboulonnables piliers du back three de LvG. Voilà qui promet pour Southampton, où l’on sait ce que c’est que de dénicher des talents, de les former et de leur donner une chance. Comme en a profité l’arrière gauche Matt Targett, qui vient d’avoir dix-neuf ans, le petit dernier de cette incroyable machine à trouver des footballeurs qu’est l’académie des Saints, excellent contre les Gunners en Coupe de la League, et qui vient de faire ses débuts en Premier League, contre QPR.
L’autre question en suspens à Southampton après l’arrivée de Koeman avait trait à la qualité de son recrutement à venir. On se demandait si l’on n’allait pas enfin voir (comme déjà annoncé depuis des mois) l’impact du départ controversé du directeur exécutif Nicola Cortese en janvier dernier. Le banquier italien, architecte de la reprise du club à l’agonie par la famille Liebherr en 2009, avait été pour beaucoup le "cerveau" de l’incroyable ascension des Saints depuis lors. Ce n’était tout de même pas un Canadien venu du hockey sur glace – Ralph Krueger, ancien coach des Edmonton Oilers en NHL, nommé président de Southampton en mars dernier – qui allait pouvoir prendre le relais de Cortese, non? Eh bien si. Et avec succès.

Des recrues qui font des merveilles

Le choix de Koeman, le plus important, était celui de décideurs qui avaient une appréciation très fine de la situation du club à la fin d’une saison "trop" réussie. Il était inévitable que des clubs plus fortunés viennent piller le vestiaire de St Mary’s. Le nouveau manager devait l’accepter, et même y voir une opportunité; or, par certains côtés, ce défi ressemblait à celui que Koeman avait relevé à Feyenoord, avec un atout supplémentaire: les propriétaires de Southampton étaient prêts à réinvestir une partie conséquente de l’argent reçu pour la vente de Lallana, Shaw et cie. Koeman, Krueger et leur staff s’en sont servi de façon inspirée. Dusan Tadic, venu de Twente, a fait grosse impression. Graziano Pellé, buteur en série du Feyenoord de Koeman, – 11m€ seulement – a crevé l’écran. Fraser Forster a immédiatement assis son rang de numéro 1 dans la cage des Saints. Sadio Mané, le Sénégalais qu’ils sont allés chercher au Red Bull Salzbourg, a montré des choses fort prometteuses lors de ses premières apparitions en Angleterre. Là encore, pas un faux pas à relever dans le management du Néerlandais.
Certes, l’euphorie actuelle ne durera pas éternellement. Personne ne s’imagine que Southampton occupera la même position au classement en mai prochain qu’aujourd’hui. Tottenham, plutôt malheureux contre Arsenal le week-end précédent, a – théoriquement – les moyens de stopper la série en cours de ses visiteurs. Mais cela n’aurait rien de dramatique: un accident de parcours, pas la fin du monde que l’on promettait il y a deux mois seulement. C’était compter sans Ronald Koeman.
(*) Il est le seul homme à avoir servi tous les clubs du Big Three néerlandais (Ajax, PSV, Feyenoord) en qualité de joueur et d’entraîneur.
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