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Liverpool - Arsenal 1989 : Il y a 30 ans, le crève-cœur des Reds et la renaissance du foot anglais

Laurent Vergne

Mis à jour 12/05/2019 à 02:05 GMT+2

PREMIER LEAGUE – Le titre se joue ce dimanche en Angleterre. Liverpool, effarant dauphin de Manchester City, espère un miracle. Ce serait notamment une façon d'apaiser la blessure de 1989. Cette année-là, le championnat anglais a vécu un dénouement d'une dramaturgie ahurissante. Une vraie finale, entre les Reds et Arsenal, à Anfield. Un match-charnière pour le football anglais.

Liverpool - Arsenal 1989 : Michael Thomas vient d'inscrire le but du titre pour les Gunners.

Crédit: Imago

Dimanche, les supporters de Liverpool croiseront les doigts. Encore. Ils guetteront un miracle. Avec un point de retard sur Manchester City, les Reds, en dépit de leur saison historique au plan comptable, n'ont que peu de chances de décrocher ce titre de champion qui les fuit depuis maintenant 29 ans. Pour improbable qu'il soit, un heureux dénouement aurait pourtant valeur d'exorcisme. De symbole, aussi, pile trente ans après le final plus mémorable de toute l'histoire du football anglais. Liverpool en fut la victime. Une plaie au cœur, de celles qui ne cicatrisent jamais totalement, au bout d'un printemps 1989 maudit à tous points de vue.
Le 26 mai 1989 était un vendredi. Drôle de jour pour une "finale". La saison était terminée. Même la finale de la Coupe des champions s'était jouée deux jours plus tôt. Mais l'Angleterre joue les prolongations, par nécessité. Un évènement dramatique a contraint les autorités du football anglais à bouleverser le calendrier. Le 15 avril, la tragédie de Hillsborough a fait 96 morts à Sheffield, en marge du match de Cup entre Liverpool et Nottingham Forest.
Pour le Royaume, c'est une nouvelle page sombre. En cette fin des années 80, le foot anglais est au ban de l'Europe. Gangréné par le hooliganisme et le racisme, il a touché le fond, se fait honte à lui-même. Depuis un autre drame, celui du Heysel, en 1985, les clubs de sa Majesté ont été exclus des compétitions européennes. Le centre névralgique du football continental s'est déplacé vers l'Italie, avec Michel Platini, puis Diego Maradona ou les stars de l'AC Milan, qui vient de s'installer sur le toit du Vieux Continent.
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Des barrières renversées, des grilles qui ont cédé, le chaos dans le stade du Heysel - 1985

Crédit: Imago

La tendance autodestructrice des Gunners

Après Hillsborough, certains joueurs de Liverpool envisagent même de mettre un terme à leur saison. Ils ne s'imaginent plus rentrer sur un terrain après un tel traumatisme. Après concertation, ils décident finalement que le jeu sera un palliatif à la douleur, et la victoire le meilleur des hommages, quand bien même il aurait quelque chose de dérisoire.
Liverpool est alors le glouton du football anglais. Les Reds ont remporté 11 des 17 derniers titres. Sur le banc depuis l'été 1985 dans la foulée du Heysel, Kenny Dalglish prolonge le culte de la gagne initié par Shankly et Paisley. Si le club de la Mersey, quadruple vainqueur de la C1 entre 1977 et 1984, ne peut plus étendre son règne européen, il continue de surplomber son royaume. Un doublé coupe-championnat en 1986, puis un autre titre de champion en 1988. En ce printemps 1989, Liverpool semble en route pour une nouvelle razzia nationale.
Début janvier, Arsenal caracole pourtant en tête du classement, avec 11 points d'avance sur les Reds. Puis l'équipe de Dalglish se met à tout écraser sur son passage. Elle va remporter 21 de ses 24 matches suivants, pour 3 nuls. Dans le même temps, les Gunners s'effritent. Ils ne remportent plus qu'un match sur deux et subissent quatre défaites. Losers magnifiques du football anglais, les Londoniens n'ont plus goûté au titre depuis 18 ans. Cette fois encore, leur tendance à l'autodestruction fascine l'Angleterre.

Reds euphoriques mais rincés

Arsenal devait rendre visite à son rival pour le titre le 23 avril. Le drame national d'Hillsborough, huit jours plus tôt, change donc la donne. Mais quand et comment replacer la rencontre dans un calendrier déjà surchargé ? Un vrai casse-tête. Entre leur demi-finale de FA Cup à rejouer puis la finale, les Reds seraient en théorie contraints de jouer huit fois en onze jours. Impossible. Un accord est finalement trouvé : la saison est prolongée de deux semaines et s'achèvera par le match Liverpool-Arsenal à Anfield, le vendredi 26 mai.
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Steve McMahon (Liverpool), un des tauliers de l'équipe des Reds en 1989.

Crédit: Getty Images

Pour Arsenal, rien ne va plus. Les hommes de George Graham viennent de céder le pouvoir aux Scousers après une défaite à Derby County et un nul contre Wimbledon. A l'aube de l'ultime bataille, Liverpool compte ainsi trois points d'avance. 76 contre 73. A la différence de buts, la bande à Dalglish a également l'avantage : +39, +35. La donne est simple : Arsenal doit s'imposer par deux buts d'écart à Anfield. Au bénéfice de sa meilleure attaque, le club londonien serait alors sacré. Simple à comprendre. Moins à mettre en œuvre. Liverpool n'a alors plus perdu chez lui par deux buts d'écart ou plus depuis plus de trois ans, et la dernière victoire des Canonniers à Anfield remonte à une quinzaine d'années.
Difficile, donc, d'envisager que le titre puisse glisser entre les doigts des Reds. Sauf que ces derniers sont rincés après le rythme infernal de ce mois de mai. Arsenal sera leur 4e match en dix jours. Le samedi précédent, soit six jours plus tôt, ils ont remporté la finale de la Cup lors d'un derby mémorable face à Everton. Mais ils ont eu besoin d'une prolongation pour cela. A l'inverse, les Gunners ont une semaine entière pour se préparer. La fraicheur sera de leur côté.

ITV se frotte les mains

Ce Liverpool est encore pour une bonne moitié celui du dernier sacre européen contre la Roma, cinq ans plus tôt. Bruce Grobelaar, Alan Hansen, Ian Rush, Steve Nicol et Ronnie Whelan, tous présents au Stadio Olimpico en 1984, sont encore des piliers du onze rouge en 1989. Kenny Dalglish, lui, a donc quitté le terrain pour le banc. Ray Houghton, John Aldridge et le génial John Barnes comptent parmi les nouvelles figures de proue des Reds.
L'équipe d'Arsenal, elle, repose sur son tandem offensif, composé de Paul Merson et d'Alan Smith, meilleur buteur du championnat cette année-là, mais aussi sur quelques piliers défensifs appelés à rentrer dans la légende du club, de David O'Leary à Tony Adams en passant par Lee Dixon. Mais aucun d'entre eux ne sera le héros de ce match pas comme les autres.
La soirée du 26 mai est douce, presque chaude. Tout Liverpool se prépare à célébrer le 18e titre du club. Toute l'Angleterre a les yeux tournés vers la Mersey. ITV, le diffuseur, se frotte les mains. A l'époque, la couverture télévisuelle n'est pas ce qu'elle est aujourd'hui. Les matches de championnat ne sont retransmis en direct que depuis 1983.
Avant cela, la FA freinait des quatre fers, craignant que des diffusions trop nombreuses ne vident les stades. L'argument peut faire sourire avec le recul du temps, mais c'était alors une vraie peur. A la fin des années 80, le rythme est environ d'une rencontre en direct par semaine. Mais ce Liverpool-Arsenal va faire recette comme jamais. ITV enregistrera ce soir-là jusqu'à 14 millions de téléspectateurs.

Le cul entre deux approches

En Angleterre, de ce match, de cette soirée, tout a été dit. Plus qu'un match, il est devenu un repère. Un phénomène culturel. Le livre "Carton Jaune", de Nick Hornby, sorti en 1992, va réconcilier football et littérature. L'auteur y met à nu son amour quasi-obsessionnel pour Arsenal. Le match du 26 mai 1989 y tient évidemment une place majeure. Le livre deviendra un film, avec Colin Firth, cinq ans plus tard et contribuera à élargir la fascination pour le football jusqu'aux classes moyennes supérieures, au-delà de la forte base traditionnelle de la classe ouvrière.
Tous ceux qui, en Angleterre, aiment le foot, ce qui fait quand même du monde, peuvent vous dire avec précision où et avec qui ils ont suivi la rencontre. Y compris au-delà d'Arsenal ou Liverpool, quand bien même les supporters de United, Tottenham, City ou autres vous jureront qu'ils s'en foutaient, n'ont rien vu et n'ont en rien gardé. Ne les croyez pas. "Tous ceux qui ont plus de 35 ans se souviendront toute leur vie de cette soirée", assurait Paul Merson en 2014, alors que le match fêtait son quart de siècle. Mais la madeleine de Proust n'a pas le même goût pour tout le monde.
Trois décennies après, tout Liverpool se demande encore comment ce match, et ce titre, ont pu lui échapper. Pour John Barnes, le contexte a plombé les Reds, comme il l'a expliqué en 2014 au Daily Mail : "si nous avions eu besoin de gagner, je n'ai aucun doute sur le fait que nous aurions remporté ce match. Peut-être que nous avons joué contre-nature, de façon trop 'négative' par rapport à notre habitude." Le cul entre deux approches, jouer selon leurs préceptes ou se comporter en comptables, les joueurs de Kenny Dalglish n'ont jamais trouvé le bon équilibre.
De fait, il va flotter sur Anfield un drôle de sentiment, tout au long des 90 minutes, la chape de plomb de l'angoisse enveloppant joueurs et fans. Le Parc des Princes connaitra ça, quelques années plus tard, un soir de novembre 1993. Ce genre d'histoire se termine rarement bien.
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Ian Rush face à Nigel Winterburn.

Crédit: Getty Images

Hutchinson, maître zen

A la pause, pourtant, le score nul et vierge sert toujours les desseins de Liverpool. Arsenal devait marquer (au moins) deux fois en 90 minutes. Il n'en reste plus que la moitié. Malgré tout, les Reds ne transpirent pas la sérénité. Le début du second acte ne va rien arranger.
A la 52e minute, Arsenal obtient un coup-franc à 30 mètres, plein axe. Nigel Winterburn le frappe. Au point de penalty, Alan Smith effleure le ballon du bout de la tête et trompe Grobelaar. Une forêt rouge entoure alors l'arbitre, David Hutchinson, jurant que Smith n'a pas touché le ballon. Or il s'agissait d'un coup-franc indirect, en témoigne le bras levé de l'homme au sifflet. Très zen au vu du contexte, Hutchinson va voir son juge de touche. Il lui passe le bras autour de l'épaule. Début du conciliabule.
- Hutchinson : Est-ce que Smith a touché le ballon ?
- Juge de touche : Oui.
- Hutchinson : Est-ce qu'il y a une possibilité de hors-jeu sur l'action ?
- Juge de touche : Non.
- Hutchinson : As-tu vu la moindre faute ?
- Juge de touche : Non.
- Hutchinson : Alors je valide le but.
Ronnie Whelan, le capitaine de Liverpool, posté devant les deux hommes, a tout entendu. Il est le premier au courant. Arsenal mène 1-0 et le trouillomètre rouge, déjà au plus haut, dépasse le seuil d'alerte. Il leur reste 39 minutes à tenir. Plus le temps additionnel. Ils tiendront 39 minutes. Mais pas le temps additionnel.

Michael Thomas, le décontracté

Comme dans toute histoire, il faudra un héros. Ce sera Michael Thomas, à jamais associé à ce 26 mai 1989. A 21 ans, il est alors un jeune espoir du football anglais. Huit mois plus tôt, il a d'ailleurs effectué ses débuts en équipe d'Angleterre. Défenseur de formation, il s'est d'abord installé chez les Gunners au poste d'arrière droit. "La première fois que je l'ai vu jouer, je l'ai appelé 'le Brésilien', a écrit dans le Guardian le journaliste anglais Jason Cowley. Il lui rappelait la grande tradition des latéraux de la Seleçao, naturellement portés vers l'offensive, tradition incarnée à l'époque par Junior, Josimar ou Branco.
A l'arrivée de Lee Dixon à Arsenal, Thomas est replacé plus haut sur le terrain par George Graham, qui l'installe dans un rôle de milieu offensif. Il s'y épanouit. Talentueux, Thomas est pourtant la tête de turc de son entraîneur, qui supporte mal son côté nonchalant. Dans le groupe, on le surnomme "The laid-back". Le "décontracté". Parfois, il se montre un peu trop "facile" sur le terrain. Et cela rend fou Graham, lequel lui reproche de ne pas toujours avoir une détermination à la hauteur de son aisance technique.
A Anfield, Michael Thomas a une première opportunité de se muer en libérateur. A vingt minutes de la fin, il se retrouve seul, dans l'axe, face à Grobelaar. Mais sa frappe, trop molle, trop... décontractée, est stoppée sans mal par le portier zimbabwéen. Mais Thomas n'est pas du genre à douter. "Ne t'inquiète pas, j'aurai une autre occasion et celle-là, je ne la raterai pas", lance-t-il à Kevin Richardson, un de ses compères de l'entrejeu.
J'essaie d'en rire maintenant, mais ça fait toujours mal
Pourtant, l'heure tourne. Et lorsque le temps règlementaire touche à sa fin, Liverpool tient tant bien que mal sa 18e couronne. David Pleat, le manager de Leicester, officie en tant que consultant. "Au début du temps additionnel, s'est-t-il remémoré dans les colonnes du Telegraph en 2009, je me souviens avoir souligné que Liverpool allait être champion alors qu'ironiquement, ils n'auraient pris qu'un point en deux matches contre Arsenal."
Sur le terrain, les joueurs ignorent combien de temps reste à jouer. Il n'y a alors aucun affichage du chrono dans Anfield, pas plus que d'annonce du temps additionnel à jouer par le 4e arbitre. Steve McMahon, le milieu des Reds, est venu se renseigner. Lui sait. Il reste une minute. Les images de la télévision le montrent levant l'index pour indiquer à ses coéquipiers qu'il reste 60 secondes à tenir.
Une saison entière, neuf mois d'efforts tiennent en 60 secondes. Il ne le sait pas encore, mais ce sera l'image de sa carrière. "Aujourd'hui encore, des gens viennent me voir et me rappellent ce moment où j'ai dit à tout le monde qu'il restait une minute, sourit-il. J'essaie d'en rire maintenant, mais ça fait toujours mal".
C'est la dernière chance d'Arsenal. John Lukic relance rapidement. A la main. Ce qui, au passage, lui vaut de se faire pourrir par Theo Foley, l'adjoint de Graham, fou furieux sur le bord de touche de ne pas voir son gardien balancer un gros parpaing au pied. Qu'à cela ne tienne. Lee Dixon adresse un long ballon devant. Alan Smith contrôle puis pivote sur lui-même.

N'importe quoi

Instinctivement, il a senti Michael Thomas partir plein axe. Lancé, le jeune Anglais, à la lutte avec Steve Nicol, bénéficie d'un contre favorable après son contrôle à moitié raté, ou réussi, comme vous voudrez. Le revoilà face à Grobelaar. Le temps se fige à Anfield. Pour tous, joueurs, membres du staff, journalistes, supporters, téléspectateurs, l'instant parait durer un siècle. Sentiment renforcé par le fait que Michael Thomas semble tergiverser. Pour un peu, on croirait qu'il prend son temps. Décontracté, toujours.
Derrière lui, Ray Houghton revient comme une furie. Mais au moment où il s'apprête à tacler à la desperado, le Gunner ajuste enfin sa frappe. Cette fois, il a opté pour l'extérieur du droit. Bonne pioche. Bruce Grobelaar est battu. Thomas célèbre son but d'une roulade avant, modérément maîtrisée : "C'était n'importe quoi, j'ai failli me briser le cou."
Sur l'écran d'ITV, l'image affiche 91 minutes et 22 secondes. L'instant de la crucifixion. Une poignée de secondes après l'engagement, M.Hutchinson siffle la fin du match, et de la saison. Au terme du dénouement le plus incroyable de l'histoire du championnat d'Angleterre, Arsenal met fin à 18 années de disette.
Le ciel vient de tomber sur la tête des Reds. Le public d'Anfield, lui, est gigantesque. Il ne siffle pas. Non, il applaudit. Les joueurs d'Arsenal n'en reviennent pas. Eux ne touchent plus terre. Paul Merson, notamment. "Je faisais n'importe quoi, comme un débile, a-t-il confié au Daily Mail. Je suis même allé embrasser George Graham. Je ne peux pas croire que j'ai fait ça, parce que je déteste les joueurs qui étreignent leur entraîneur. Mais c'était si énorme, un des plus grands trucs de l'histoire du football anglais. C'est tellement émouvant, un miracle."
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La désillusion des Reds : 30 ans après, toujours une cicatrice.

Crédit: Getty Images

Cet exploit, c'est celui de Graham

Si les images de joie consécutives au but de Michael Thomas apparaissent rétrospectivement aussi poignantes, c'est aussi parce que le premier joueur à se précipiter sur l'auteur de ce but historique, David Rocastle, a disparu prématurément en 2001. A 33 ans, il fut emporté par la maladie de Hodgkin. Thomas et Rocastle avaient le même âge, se connaissaient depuis l'enfance et avaient grandi ensemble dans les équipes de jeunes d'Arsenal. Ce moment-là était d'abord le leur et c'est tout sauf un hasard si Rocastle a été le premier à se jeter sur le héros.
La vie de Michael Thomas a changé à jamais ce soir-là. "Ça n'a pas toujours été facile à gérer, a-t-il avoué vingt ans après. J'avais 21 ans, je n'aimais pas la lumière et d'un seul coup, je suis devenu le centre de l’attention. Je n'étais pas habitué à ça. Mais des années et des années après, j'ai toujours la chair de poule en repensant à mon but." Il ne le revoit pourtant presque jamais. "Parce qu'à chaque fois, j'ai l'impression que Ray Houghton va me rattraper et me tacler", plaisante-t-il. Ironiquement, deux ans plus tard, il signera à... Liverpool, où il restera sept ans comme joueur avant de s'y installer à la fin de sa carrière de joueur.
Si Michael Thomas demeure l'incontournable figure de la victoire d'Arsenal, cet exploit est d'abord celui de George Graham. Dans la préparation de l'évènement comme dans l'approche tactique, le manager des Gunners fut un maître. Lui que l'on disait autoritaire a tout mis en œuvre pour tranquilliser son groupe, auquel il a accordé d'abord deux jours de repos. Il insiste ensuite pour que les Gunners se rendent à Liverpool le jour même du match. En bus, ils partent à 10 heures du matin. C'est la colo. L'après-midi, à l'hôtel, il tient un discours apaisé. "Ne paniquez pas. Faites-les paniquez. S'il y a 0-0 à la mi-temps, ce sera parfait pour nous. Il faut mettre le doute dans Anfield. Le temps jouera pour nous."
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Le bonheur simple de George Graham, manager d'Arsneal en 1989.

Crédit: Imago

26 mai 1989 ou la genèse de la Premier League

"L'ambiance était très calme, presque joviale, se souvient Paul Merson. Il y avait une grande sérénité. Par exemple, moi qui ne dormais jamais pendant la sieste le jour des matches, j'ai trouvé le sommeil sans problème." Comme si Graham avait tout vu venir, il y aura effectivement 0-0 à la pause. "Vous voyez, tout se passe comme prévu", leur dira le coach, dont la force tranquille aura rejailli sur ses hommes.
Sur les images, à la fin du match, il est un des rares à ne pas devenir hystérique. "Après la rencontre, j'ai vu George dans les escaliers, raconte David Pleat. Il était la personne la plus calme dans Anfield. Je n'en revenais pas. Le lendemain, il est retourné chez lui, en Ecosse, pour jouer au golf. Voilà comment il a fêté ce moment historique." Tranquille, jusqu'au bout.
Vainqueurs ou vaincus, tous les acteurs de cette soirée sont associés au 26 mai 1989. Depuis, il y a eu d'autres dénouements mémorables, à commencer par celui qui a consacré Manchester City en 2012, avec les deux buts de Dzeko et Aguerö dans le temps additionnel. Mais cet Arsenal-Liverpool tient une place à part. Parce que c'était l'année du centenaire de la fédération anglaise de football. Parce qu'il y avait eu Hillsborough six semaines plus tôt. Parce que jamais, depuis, une équipe au pouvoir avant le dernier match n'a laissé filer le titre. Mais aussi pour son impact sur le football anglais.
Trente ans plus tard, il est considéré comme LE match de la renaissance du football de sa Majesté, alors au creux de la vague. Il se dit que c'est ce soir-là que Rupert Murdoch fut pour de bon convaincu d'investir massivement dans les droits du championnat anglais. Trois ans plus tard naissait la Premier League, nouvelle puissance d'un football européen où l'Angleterre allait durablement reprendre toute sa place. Ce milieu de semaine vient encore de le rappeler.
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L'équipe d'Arsenal sacrée à Anfield en 1989.

Crédit: Getty Images

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