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Manchester United - Un problème prénommé Cristiano (Ronaldo)

Philippe Auclair

Mis à jour 15/04/2022 à 10:54 GMT+2

PREMIER LEAGUE – La saison n'est pas encore terminée. Mais l'heure du bilan a déjà sonné pour cet exercice de Cristiano Ronaldo. Pour son grand retour à Manchester United - où il avait explosé aux yeux du monde -, le Portugais n'a pas été à la hauteur des attentes. Et de multiples manières alors qu'il se rapproche inlassablement de la fin de sa formidable carrière.

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Cristiano Ronaldo est de ces joueurs pour qui les chiffres importent. Chaque nouveau but est une brique ajoutée au piédestal duquel il contemple de plus en plus loin le commun et le moins commun des mortels. 807 buts marqués en seniors en club et en sélection: pas même Lionel Messi ne peut dire mieux, qui en est à 753. Le problème est que le monument que Ronaldo continue de se construire ne prend plus de hauteur aussi vite que lorsqu'il n'avait pas trente-sept ans. Le moment approche où le miroir ne renverra plus la même image de l'extraordinaire athlète qui put faire croire que les années n'avaient pas prise sur lui. Ce moment, en fait, est venu, et les chiffres, ces fameux chiffres, en témoignent sans qu'on puisse crier au parjure.
Cristiano Ronaldo a marqué autant de buts pour Manchester United en cette saison de championnat d'Angleterre qu'Ivan Toney pour le promu Brentford : douze, soit respectivement huit, trois et un de moins que Mohamed Salah, Diogo Jota et Sadio Mané, les trois artificiers de Liverpool, ou onze de moins qu'il n'en avait lui-même inscrits en Serie A pour la Juventus à pareil stade de la saison en 2020-21, bien en deçà, en tout cas, de ce que devaient espérer les dirigeants de Manchester United lorsqu'ils firent un pont d'or au Portugais pour revenir dans le club où il avait explosé.
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Cristiano Ronaldo

Crédit: Getty Images

Ronaldo et la marque globale Manchester United

CR7 avait parait-il accepté une réduction significative de son salaire à la Juve pour pouvoir enfiler à nouveau le fameux maillot numéro 7 des Red Devils. Il ne serait payé 'que' 600 000 euros par semaine, soit 31,2 millions par an - à quoi il fallait bien sûr ajouter ce qu'il perçoit de ses partenariats commerciaux, de l'appli LiveScore à son sponsor historique Nike, qui lui verserait pas loin de 20 millions d'euros par saison pour le privilège d'associer leur nom au sien. De ce point de vue au moins, Ronaldo demeure bien le numéro 1 incontesté en Angleterre.
Manchester United étant une entreprise commerciale au moins autant qu'un club, l'effort financier pouvait se comprendre. Avec 750 millions d'abonnés à ses comptes Twitter, Facebook et Instragram, Ronaldo aiderait le club qui n'a pas gagné le moindre trophée depuis la Ligue Europa de 2016-17 à continuer de revendiquer son statut de marque globale, et de conserver son attractivité auprès de sponsors dont on comprendrait l'impatience et les frustrations. C'est qu'être le partenaire de MUFC coûte très cher: 275 millions d'euros sur cinq ans dans le cas du sponsor numéro 1 des Mancuniens, le logiciel Team Viewer. Avoir un quintuple Ballon d'Or comme homme-sandwich aide certainement à faire avaler l'addition.
Demeure qu'au vu des performances pitoyables, dans les résultats comme dans la manière, du Manchester United de CR7, on doit se demander si l'argent investi dans la superstar n'aurait pas pu être dépensé mieux, c'est-à-dire ailleurs, et autrement.
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Quelques fulgurances quand même

On dira, et on aura raison de le faire, que Ronaldo n'est pas le seul responsable du marasme dont les Mancuniens ne parviennent pas à se dégager. Le paradoxe apparent est que, sans lui, Manchester United serait a priori en encore plus mauvaise posture qu'ils ne le sont aujourd'hui, à la traîne en Premier League (septièmes, à six points du quatrième, Tottenham), sortis de bonne heure de la Coupe de la League et de la FA Cup (et par Middlesbrough, une équipe de Championship, après que CR7 avait manqué un pénalty), évacués à la régulière par l'Atlético de Madrid dès les huitièmes de finale de la Ligue des champions.
Trois fois en Premier League, il inscrivit le ou les buts décisifs qui inversèrent le cours d'un match mal engagé ou transformèrent un nul en victoire, contre Arsenal, Norwich et Tottenham, face à qui il fut l'auteur d'un coup du chapeau. Il se montra encore plus déterminant en Ligue des champions, tout du moins pendant la phase de poule. Le but du 2-1 contre Villarreal, à la 95e, c'était lui, celui du 3-2 contre l'Atalanta aussi, cinq minutes avant le coup de sifflet final, tout comme celui de l'égalisation 2-2 dans le temps additionnel face au même club, en Italie cette fois.
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Cristiano Ronaldo

Crédit: Getty Images

Manchester United avait besoin d'autres choses

Mais que prouvent ces quelques fulgurances ? Rien d'autre que ce que quelques-uns avaient dit d'emblée lorsqu'il signa son contrat le liant à nouveau à Manchester United, pour deux saisons, le 31 août dernier: un goleador aussi prodigieux que lui ne perdrait pas son sens du but d'un seul coup; oui, il finirait sans doute la saison avec vingt-cinq ou trente buts, quelques-uns spectaculaires; mais il n'était certainement pas le catalyseur dont MU avait besoin. Il aurait un statut à part dans un vestiaire dont l'unité n'était pas le point fort, et sur le terrain aussi, car comment laisser sur le banc un attaquant qui coûte 600 000 euros par semaine?
Cela signifiait qu'Edinson Cavani, son cadet de deux ans, exemplaire en 2020-21 (et efficace: 17 buts en 21 titularisations, zéro penalty dans la liste) devrait non seulement faire cadeau de son maillot numéro 7, marketing oblige, mais aussi de sa place dans le onze de départ au nouveau venu. Cela signifiait qu'Anthony Martial verrait un temps de jeu déjà limité fondre encore un peu plus; de fait, le Français ne débuta qu'un seul match de PL avec United avant d'être prêté à Séville fin janvier. Cela signifiait que Marcus Rashford lui aussi redescendrait d'un cran dans la hiérarchie ; et il l'a tant et si bien fait que Gareth Southgate ne l'a plus appelé en sélection depuis la finale de l'Euro (*).
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CR7 avec United

Crédit: Getty Images

Un impact négatif sur le jeu mancunien

En contrepartie? Douze buts en PL et six en Ligue des champions à mettre au crédit de Ronaldo, ce qui n'est pas honteux, mais ne justifie ni le débours, ni l'impact négatif que la présence du Portugais aura eu sur le jeu de Manchester United, avec Ole Gunnar Solskjaer - jusqu'au 21 novembre, quand MU était sixième du classement - et encore plus avec Ralph Rangnick - quand United pointe une place plus bas. Il est un point de référence par trop statique pour les attaques mancuniennes, lesquelles manquaient déjà de rythme et de tranchant avant qu'il arrive.
Le coup de reins qui lui permettait de faire la différence sur les côtés aussi bien que dans l'axe a disparu. Il ne participe pas aux replis défensifs, et est presque inexistant dans le pressing qui est la fondation même du football de Rangnick. Du coup, l'impensable est arrivé. Cristiano a été mis sur le banc en championnat, trois fois. Il a même été écarté du groupe, trois fois également, dont deux pour des problèmes musculaires dans lesquels entrait une part de diplomatie. Il n'a vraiment convaincu personne, et en est le premier conscient, car son narcissisme éperdu ne l'a jamais amené à tricher avec lui-même. Ce fut même le contraire. Jamais un footballeur ne travailla aussi dur que lui pour obtenir ce qu'il était convaincu de mériter.
Cette saison est la première depuis 2009-10 qu'il achèvera sans un trophée. Il ne gagnera plus le Ballon d'Or, et il le sait. Du coup, les gestes d'exaspération qui ont toujours fait partie de son répertoire d'expressions sur le terrain ont pris une autre connotation : à la colère qu'il ressent envers le défenseur qui l'a stoppé irrégulièrement ou le coéquipier qui l'a mal servi s'ajoute celle qu'il ressent envers lui-même, qui ne peut être qu'augmentée par l'appréhension de l'horizon qui approche, celui de la fin.
(*) Le nom de Mason Greenwood, que beaucoup considéraient être le meilleur finisseur au club, devrait être ajouté à la liste s'il n'avait pas été arrêté sur le soupçon de coups et blessures et de viol en janvier dernier. Libéré sous caution, Greenwood devrait en savoir plus sur son sort dans les jours qui viennent.
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