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Pep Guardiola et Riyad Mahrez : entre éloge et reproche, une idylle particulière

Paul Citron

Mis à jour 14/01/2023 à 09:54 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Très performant depuis la reprise, Riyad Mahrez devient au fil des matches et des saisons qui passent l’un des atouts maîtres de Manchester City. Mais Pep Guardiola conserve avec lui, encore plus qu’avec les autres, une relation balançant entre remontrances et admiration. Aveu d’un profond respect pour la qualité du joueur, mais aussi d’une envie que celui-ci passe un cap.

Pep Guardiola parle à Riyad Mahrez (Manchester City) avant la rencontre face à Burnley, le 2 avril 2022

Crédit: Getty Images

Lorsqu’on est capable d’engager une société de détectives privés pour s’assurer que ses joueurs, une fois l'entraînement fini, suivent un rythme de vie adapté au très haut niveau, c’est que l’on accorde une importance un tantinet singulière à leur vie en dehors des terrains. Pep Guardiola est un manager de cette trempe, pour qui le talent pur, aussi exceptionnel soit-il, ne compte pour presque rien s’il ne pousse pas celui qui le possède à l’aiguiser le plus finement possible.
L’exigence qu’on connaît au Catalan lui a bien souvent valu d’entretenir des relations tumultueuses avec ses joueurs, toujours prêt à les protéger s’ils se comportent bien, mais tout aussi prompt à les piquer publiquement dès que, selon lui, ils le méritent. La dernière illustration de cela remonte au week-end dernier, après l’écrasante victoire face à Chelsea en FA Cup (4-0), lorsqu’en conférence de presse, a été posée à Guardiola une question sur Riyad Mahrez, l’homme fort de la soirée, auteur d’un somptueux coup franc et d’un penalty.

"Il ne pouvait pas se plaindre car il ne jouait pas à son niveau actuel"

"Peut-être que le problème de Riyad, c’est de se remettre de l’heure d’été, une fois rentré de ses vacances et pas de la Coupe du monde, a commencé le manager des Citizens, un petit rictus aux lèvres. Mais sa qualité, c’est incroyable. Il adore jouer au football, il nous a aidés à décanter le match. Avec lui, tout peut arriver. S’il était assis à côté, je lui dirais de toujours s’entraîner et jouer comme en ce moment."
"Quand il joue comme ça et qu’il se plaint de ne pas jouer assez, il a raison de se plaindre, a insisté le technicien des Skyblues. Je lui dirais qu’il mérite de jouer, mais que j’ai fait un autre choix. Mais avant, il ne pouvait pas se plaindre car il ne jouait pas à son niveau actuel. Parfois, je dois les laisser se regarder dans la glace. Dans une longue carrière, il y a des hauts et des bas. Ce n’est pas une question de qualité, mais en football, il y a plus, vous devez faire plus, a-t-il conclu. Et depuis qu’on a repris après le Mondial, Riyad joue très bien."
Que retirer de tout cela ? Le plus évident, d’abord : lorsque Riyad Mahrez est en forme, il apporte la lumière à Manchester. Il l’a montré depuis la reprise de la Coupe du monde, en balayant Chelsea lors d’une double confrontation qu’il a éclaboussée de sa classe, en marquant face à Liverpool en League Cup et en délivrant une passe décisive pour Erling Haaland en championnat contre Everton, sur un de ces dribbles qui sont l’apanage des grands puisqu’on a beau les connaître par coeur, ils passent toujours.
Plus encore, après quatre saisons et demie avec le maillot bleu ciel, l’Algérien s’est fondu dans le moule mancunien. Son rôle d’ailier rentrant, doté de qualités de percussion quasiment sans égales, fait un bien fou à une équipe qui peut parfois donner l’impression de se casser les dents, dès lors qu’elle se mesure à une défense solide.

Question de nonchalance

D’ailleurs, quand arrivent au printemps les grandes affiches de Ligue des champions, il est bien souvent aligné ; et répond tout aussi souvent présent. Les supporters parisiens se souviendront de ses trois buts en demi-finale face au PSG en 2020-2021 ; son but au Bernabéu l’an dernier au même stade de la compétition, aurait dans n'importe quelle autre galaxie permis aux Skyblues de rallier de nouveau le dernier échelon européen.
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Riyad Mahrez avait marqué le seul but mancunien face au Real Madrid au Bernabéu, le 4 mai 2022.

Crédit: Getty Images

Mais dans ce cas, pourquoi l’Algérien n’enchaîne-t-il pas les rencontres ? Pourquoi n’a-t-il débuté que neuf rencontres de Premier League cette saison ? Voilà qui nous ramène à la récente déclaration de son coach, dont on ne sait plus très bien en la lisant à qui elle s’adresse. Ou plutôt si, on sait pertinemment qu’elle s’adresse au joueur, avant d'être destinée aux médias. Car pour l’obsédé du travail invisible qu’est Guardiola, la nonchalance qui parfois caractérise Riyad Mahrez est trop peu digne d’un joueur de son niveau.
Un reproche que le Catalan fait à son ailier depuis aussi longtemps qu’ils se côtoient, et dont la récurrence témoigne avant tout de l’envie du coach de voir son joueur enfin passer un cap là-haut, sous le bonnet, puisque ballon au pied, Riyad Mahrez n’en a plus aucun à franchir. "Il doit revenir en meilleure forme physique. Le reste, je ne peux rien lui apprendre, il est trop bon", expliquait en ces termes Guardiola en octobre dernier.

Guardiola garde la mesure dans ses critiques

C’est ainsi que pour lui, Riyad Mahrez suscite de manière aussi primaire la fascination que l’agacement. C’est aussi pour cela que malgré sa qualité, l’Algérien peut paraître encore cantonné à un rôle de joueur de rotation, ou d’impact player, de facteur X, bref, tout ce que n’est pas un titulaire en puissance.
Une position qui pourtant ne semble pas déranger outre-mesure le natif de Sarcelles : en témoignait sa réaction d’après-match face à Chelsea le 5 janvier dernier, match qu’il n’avait pas débuté contre toute attente, et qu’il avait débloqué en entrant à une demi-heure de la fin. "Vous connaissez le coach, il a tenté quelque chose", s’était gentiment contenté de lâcher l’Algérien, un léger sourire en coin.
C’est aussi pour cela que Riyad Mahrez est précieux ; parce malgré le ballottement dont il fait l’objet avec Pep Guardiola, jamais il n’est monté au créneau contre lui. L’Algérien, qui aura 32 ans le 21 février prochain, a même plusieurs fois exprimé le plaisir qu’il avait d’évoluer sous ses ordres, et avouait en septembre dernier sa volonté de finir sa carrière à Manchester City. D’ici là, le bonhomme méritera peut-être que l’on convoque un meilleur souvenir, à son sujet, que celui d’un joueur surtout talentueux ; et ce n’est pas Pep Guardiola qui en serait fâché.
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