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31 ans de Berlusconisme : grisant mais tellement usant pour l'AC Milan

Valentin Pauluzzi

Mis à jour 14/04/2017 à 13:21 GMT+2

C’est donc officiel, l’entrepreneur et homme politique italien a vendu son club après plus de trois décennies faites de succès mais aussi de loupés qui ont plongé le Milan dans une profonde crise. Le bilan est nuancé.

Silvio Berlusconi

Crédit: AFP

Vingt-neuf titres en 31 ans de présidence : une goinfrerie. Mais 17 de 1986 à 1996, 6 de 1997 à 2006 et encore 6 de 2007 à aujourd’hui. Je préfère ne pas prendre des gants et entrer directement dans le vif du sujet. Inutile de se lancer dans une énième hagiographie, tout le monde sait à peu près ce qu’a représenté le Milan de Berlusconi dans l’histoire du football italien et mondial entre cycles européens victorieux, Ballons d’Or et entraineurs à succès. On n'était pas loin de la parfaite moyenne d’un trophée par année et le bilan reste tout à fait exceptionnel… tout comme le désagréable arrière-gout d’inachevé demeure.

Plus c'est long, moins c'est bon

C’est donc fini. Enfin. Après une mise en vente datant de l’hiver 2014 et des négociations avec les nouveaux propriétaires démarrées l’été dernier. Les multiples reports du "closing" faisaient craindre le pire. Oui le pire. Car sans aucun doute, la fin de l’ère Berlusconi a été vécue comme une lente agonie de la part de tous les tifosi du Milan, que ce soit du point de vue financier avec des bilans comptables de plus en plus déficitaires, ou sportif avec un club qui navigue entre la 6e et la 10e place depuis maintenant quatre ans.
Rarement les actionnaires de club s’arrêtent au sommet de leur gloire comme cela peut arriver pour certains sportifs, et il y a toujours une période flottement avant de passer la main. Mais concernant le "Cavalier", cette décompression a été bien trop longue et ressemblait parfois à une prise d’otages des sentiments des supporters, voire même à un processus d’autodestruction de tout ce qui avait été brillamment construit. Je me rappellerai toujours d’une phrase de Paolo Maldini lors d’une de ses rares interviews : "Ils sont en train de détruire mon Milan". Pas seulement sur le plan de la compétitivité, mais aussi sur celui de l’image, du style, des valeurs véhiculées. Trop de joueurs indignes de ce maillot en ont bafoué le prestige à cause de prestations mais surtout de comportement pas du tout à la hauteur. Personnellement, j’ai ressenti comme une sorte de trahison puisque les mêmes qui ont façonné cet ogre respectable et respecté en ont quasiment fait tout l’inverse.
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Silvio Berlusconi (AC Milan)

Crédit: AFP

Un héritage très contrasté

Il n’est pas question de renier les émotions inégalables liées aux folles nuits européennes d’un Pippo Inzaghi pour ne citer que lui, mais j’ai beau prendre le maximum de recul, le sentiment de gâchis est imposant et l'emporte sur la nostalgie et la reconnaissance. Un coup de mou était plus que compréhensible, on ne peut pas toujours être sommet mais les désormais anciens propriétaires du Milan possédaient tous les éléments en main pour maintenir le club à un certain standing. Or, l’omnipotence d’Adriano Galliani qui a cru bon se passer d’un vrai directeur sportif ainsi que le népotisme de Berlusconi ont fait dérailler la locomotive européenne du football italien.
L'avant-gardisme qui le caractérisait lors de ses premières années a laissé place à une superficialité déroutante. La question du stade de propriété n'a toujours pas été réglée, tandis que le vestiaire - vrai secret du grand Milan - a été délégitimé. Deux erreurs monumentales à peine compensées par un centre de formation dont on a enfin daigné s’occuper après des années d’improvisation. Une politique jeune (effectif à la moyenne d'âge la plus basse de Serie A) et italienne forcée plus que voulue qui permet, comme lors de la venue de Silvio il y a 30 ans, aux nouveaux patrons de repartir sur une base technique intéressante. Mais pour le reste, tout est à faire ou à refaire.

Des héritiers encore à découvrir

En fait, Berlusconi aurait pu faire pardonner ses récentes errances en revendant le club à un homme aux finances solides, à la manière de Moratti et le groupe Suning via l’intermède Erick Thohir pour l’Inter. Ce n’est pas le cas. Déjà, bien avant la conclusion de la vente, le nouveau board a été dévoilé et est composé de deux anciens salariés de l’Inter, Marco Fassone, directeur général, et Max Mirabelli, directeur sportif. De quoi dénaturer un peu plus le club et faire enrager une partie du peuple rossonero, l’autre continuant de s’enfoncer dans un fatalisme sans fin.
Concernant le profil des investisseurs qui ont repris le club, Li Yonghong est un nom à peine connu en Chine, qui a perdu nombre de ses partenaires initiaux (suite aussi aux nouvelles directives du gouvernement de Pékin) et contraint de s’appuyer sur le fond américain Elliot et un prêt de 180 Millions d’euros sans lequel l’entière opération aurait été sabotée. La faute à un Milan généreusement évalué (740 Millions d’€ dettes comprises et des comptes à revendre devant le Fair-Play Financier de l'UEFA) et encore moins bien vendu.
Evidemment, Il est trop tôt pour tirer des conclusions mais il l’est aussi pour pousser un ouf de soulagement. La situation économique et sportive reste floue et bancale. En 1986, Berlusconi avait débarqué en hélicoptère sur les notes de la chevauchée des Walkyries singeant une célèbre scène d’Apocalypse Now. Aujourd’hui, l'entraînante musique de Wagner n’a pas retenti dans les couloirs de Casa Milan mais les traces de l’Apocalypse sont encore bien présentes. Silvio a bien tout cramé sur son passage, mais a malheureusement tenu à le faire à son départ comme à son arrivée.
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