Grand Prix d'Australie | Sauver le fautif Alexander Albon en punissant l'innocent Logan Sargeant : l'embarras Williams

Pour Logan Sargeant, le Grand Prix d'Australie est déjà terminé. Et il n'y est pour rien. Williams a décidé de confier sa monoplace à son coéquipier Alexander Albon, dont la monture est irréparable après un crash aux essais. Objectif : "garantir le meilleur résultat possible" en vue de la course. Preuve que l'écurie ne croit plus beaucoup en son pilote américain.

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Imaginez-vous bosser dur pour convaincre votre patron mais devoir céder votre outil de travail à l'un de vos collègues ayant cassé le sien. Vous voici (presque) à la place de Logan Sargeant. En Australie, le pilote américain s'est retrouvé à pied après que Williams a décidé de confier sa monoplace à Alexander Albon, coupable d'avoir écrasé la sienne contre le mur lors de la première séance d'essais libres.
Cela n'aurait certes jamais dû déboucher sur une telle décision. Mais l'écurie Williams étant ce qu'elle est, elle avait pris le parti de ne pas apporter de châssis supplémentaire, à la fois contrainte par le plafond budgétaire mais aussi par ses ambitions : les ressources financières ainsi économisées ont pu être injectées ailleurs. Ce qui démontre, sans doute, que les discours des dirigeants de l'écurie ne sont pas de simples paroles en l'air, et que la structure portant l'un des noms les plus mythiques de l'histoire de la F1 a véritablement pris des risques pour grappiller des places dans la hiérarchie.
"Cela illustre à quel point nous devons passer par des changements importants afin d'avoir une meilleure position pour l'avenir", a confié James Vowles dans un communiqué. Il fallait beaucoup d'audace pour prendre ce pari avec une voiture réputée difficile à dompter. Il a été perdu : le crash d'Albon a été si violent qu'il a rendu son châssis irréparable.

Williams est comme les autres

Très vite, l'hypothèse d'un échange de baquets a pointé le bout de son nez avec, une nouvelle fois dans un début de saison qui n'en manque décidément pas, une question morale : peut-on vraiment sauver un fautif en punissant un innocent ? Le règlement le permet, l'histoire aussi. C'est ainsi que Juan Manuel Fangio et Ferrari avaient soigné leur légende en 1956 : le jeune Peter Collins, en lice pour le titre, avait cédé sa voiture à son illustre coéquipier en pleine course. Autres circonstances, autre époque.
Loin de l'image que renvoyait autrefois l'écurie familiale de feu Sir Frank Williams, la structure désormais détenue par le fonds américain Dorilton Capital a acté sa décision sur un raisonnement sportif. "Cette décision n'a pas été prise à la légère et nous ne remercierons jamais assez Logan d'avoir accepté et de démontrer son dévouement envers l'équipe, a justifié Vowles. Même s'il ne devrait pas avoir à payer une erreur qu'il n'a pas commise, chaque course compte lorsque le milieu de peloton est plus serré que jamais. Nous avons donc fait ce choix en fonction de notre meilleur potentiel de points ce week-end."
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Le patron de l'écurie, as des chiffres et de la data, n'a pas eu à tourner ses tableurs Excel dans tous les sens pour savoir qu'Alexander Albon lui offrait une plus grande garantie de points que Sargeant. Après tout, c'est ainsi qu'est régi l'impitoyable monde de la Formule 1 : rien n'a plus d'importance que le résultat, rien ne prévaut sur la réalité de l'instant. Circulez, il n'y a rien de nouveau.
C'est pourtant ce que cette même direction nous avait promis. L'automne dernier, elle avait offert un sursis à ce même Sargeant, que tout le monde pensait pourtant condamné après des débuts laborieux, pour rester poli. En se basant sur les progrès mis en exergue par les données de course et de simulation (et probablement aussi sur le fait qu'il soit américain, comme le fonds propriétaire), le board de Williams lui avait offert une chance supplémentaire. Une vraie exception dans un paddock où les pilotes se consomment comme les amuse-gueule du buffet de Melbourne Park.
Vowles, probablement l'une des personnalités les plus douées de sa génération en F1, vantait là les effets d'une nouvelle vision, selon laquelle un pilote peut avoir besoin d'un peu plus de temps pour exprimer son talent. Libre à chacun d'y croire mais cette approche avait le mérite de se différencier de beaucoup d'autres écuries certaines de construire des projets à long-terme en jetant simplement des objectifs de podiums, de victoires ou de titres en l'air - suivez notre regard.
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En installant Albon dans le baquet de son coéquipier, c'est l'illusion de ce nouvel horizon que Williams dissipe. Après avoir vécu un calvaire au point de se sentir "délabré" selon ses propres termes, Sargeant avait passé l'hiver à se reconstruire une santé physique et morale. Et s'il est impossible de savoir combien de points l'écurie va sauver ce week-end avec ce "troc", il est tout aussi complexe de deviner dans quelle mesure les performances futures de Sargeant vont être affectées.
Car lui l'est, véritablement : "C'est le moment le plus difficile de ma carrière", a-t-il écrit dans un message posté sur les réseaux sociaux. "Je dois être totalement honnête et dire qu'aucun pilote n'aimerait abandonner sa place, a ajouté Albon. Je n'aimerais pas que quelque chose de similaire m'arrive. Logan a toujours été un grand professionnel et un joueur d'équipe." Sur ce coup-là, pas certain qu'il ait vraiment eu le choix.
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