Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Chez Mercedes, George Russell devra faire oublier "Monsieur samedi" et supporter la pression de Lewis Hamilton

Stéphane Vrignaud

Mis à jour 17/01/2022 à 20:07 GMT+1

FORMULE 1 - Bye bye Williams et les multiples droits à l'erreur. Cette saison, George Russell tient pour de bon ce volant de la Mercedes dont il rêvait tant. Avec toutes les obligations qui vont avec. Celui de collaborer avec l'équipe allemande en pleine révolution technique et Lewis Hamilton dans sa quête de 8e titre. Au milieu d'une montagne d'engagements. Bref, une énorme pression...

4 champions du monde, 1 débutant, 2 revenants : Voici les 20 pilotes F1 2022

"The next big thing", comme disent les Anglais. George Russell est attendu cette année par tout le Royaume-Uni comme le nouveau phénomène destiné à succéder à terme à Lewis Hamilton au sommet des podiums de Formule 1. Comme si ce renouvellement était induit, faisait partie d'un processus inéluctable. Perpétuel.
L'excellence de la formation à la british n'est pas une vue de l'esprit mais bien une réalité et les stats sont là pour le rappeler : depuis 1953 et la victoire de Mike Hawthorn à Reims, le Royaume-Uni a produit des vainqueurs à un rythme quasi infaillible en Formule 1. Seules huit saisons qui ont suivi (1974, 1978-80, 1984, 1988 et 2004-05) n'ont connu aucun podium sans le "God Save The Queen". La saison 2022 ne devrait pas déroger à la règle mais rien n'est forcément garanti pour la suite. Lewis Hamilton a eu 37 ans le 7 janvier et ses années en Formule 1 sont comptées. Une voire deux, c'est ce que stipule son contrat avec Mercedes.

Russell doit d'abord succéder… à Button

Jusqu'à preuve du contraire, l'Anglais est l'arbre qui cache la forêt outre-Manche car aucun Britannique hormis lui n'a gagné depuis Jenson Button en 2012, à Sao Paulo. Lando Norris incarne la relève depuis qu'il a débarqué dans le paddock en 2019, chez McLaren, une écurie qui lui a permis de frôler la victoire à Monza l'an dernier, mais rien n'indique que sa prochaine voiture sera compétitive.
Avec une Mercedes dans les mains cette année, George Russell a plus de chances de gravir la dernière marche pour ouvrir une nouvelle ère. Mais à quel point est-il bon, là est la question. On sait juste qu'il remplace Valtteri Bottas, un subordonné trop rarement au niveau de Lewis Hamilton lors de ses cinq années à Brackley, et dont il avait sérieusement écorné la réputation lors de sa pige chez Mercedes au Grand Prix de Sakhir 2020. On s'en doute aussi, il sera là pour faire le complément de points dans l'optique d'un neuvième titre Constructeurs consécutif et d'un huitième de Lewis Hamilton.
George Russell (Mercedes) lors des tests à Abu Dhabi le 15 décembre 2021

Un CV sans tache et la place d'Ocon

George Russell, 24 ans le 15 février, c'est le gendre idéal avec le CV parfait. Des portes ouvertes sans forcer : il a été champion d'Angleterre (en BRDC) F4 en 2014, en se faisant très vite remarquer par Toto Wolff, le directeur d'équipe de Mercedes. Et après deux nouvelles saisons dans des équipes moyennes, il a explosé chez ART, l'équipe de Fred Vasseur, patron actuel d'Alfa Romeo F1, en GP3 en 2017 et en F2 en 2018. De quoi mériter sa place en F1 dès 2019, chez Williams, avec le soutien et les espèces sonnantes et trébuchantes de Toto Wolff, coactionnaire et boss du motoriste de l'équipe de Grove.
En sortant peu à peu la Williams de sa torpeur pendant trois saisons, George Russell a surtout écarté un encombrant rival en coulisses car Esteban Ocon était à l'origine le successeur tout désigné de Valtteri Bottas dans le second baquet de la Flèche d'argent.
George Russell arrive aux côtés de Lewis Hamilton habité par un sentiment de respect mutuel inspiré par les sept titres mondiaux de son aîné. Il l'a redit en ce début d'année, lorsque Mercedes a commencé à communiquer autour de lui pour planter le décor : il le considère comme le "plus grand pilote de tous les temps", le "GOAT" pour les Anglais. En posant une réserve : le respect est mutuel et les échanges devront aller à ses yeux dans les deux directions au cours d'une saison de rupture, marquée par le retour des monoplaces à l'effet de sol. Une vraie révolution. "Nous devrons nous aider parce qu'en 2022, les voitures vont profondément évoluer au fil de la saison, rappelle-t-il. Je suis impatient d'être impliqué dans le développement de la voiture."

Chez Williams, il a appris à perdre

Effectivement, avec seulement six jours de tests avant de mettre les bolides dans les caisses pour le premier Grand Prix de la saison, les 18, 19 et 20 mars à Bahreïn, chaque écurie aura besoin de retours d'informations pointus - le fameux "feedback" - et la collaboration des pilotes sera un facteur fondamental de la progression. "Il faudra travailler avec les concepteurs, au simulateur, bosser dur pour s'améliorer car je suis sûr que ce ne sera pas nécessairement le plus rapide à la première course qui gagnera (le titre), prévient George Russell. Ce sera celui qui progressera le plus rapidement. Je suis sûr qu'on verra des designs intéressants et des outsiders pourraient sortir du lot lors des tests ou dans les premières courses. Ce sera à celui qui développera le plus vite, le mieux, pour construire les bases pour les années à venir. C'est ce côté ingénierie qui m'excite vraiment."
A part Haas, Williams ou Alfa Romeo, des écuries en mal d'argent facile, aucune équipe ambitieuse n'engage de pilote autrement que pour lui demander des résultats et une contribution technique significatifs.
Toto Wolff compte donc sur George Russell pour fournir ce travail dans la continuité de Valtteri Bottas, régulièrement encensé par Lewis Hamilton pour la qualité de sa collaboration technique, mais le manager autrichien doit lever un doute qui l'habite depuis des mois. Il a en effet confié l'an dernier avoir eu des retours du staff de Williams parfois pas très rassurants. Au milieu de week-ends bien gérés, George Russell était capable de se perdre dans les réglages pendant trois jours.
Perdre, est d'ailleurs ce qu'il a le plus fait pendant trois ans, et tentant d'en tirer chaque enseignement. Parfois cruellement, lorsqu'il a tapé le mur sous régime de voiture de sécurité à Imola en 2020 avec sa Williams, ou perdu la victoire à Sakhir avec Mercedes à la fin de cette même saison, parce qu'il avait laissé - c'est ce que son équipe a expliqué - le canal de sa radio ouvert en rentrant au stand, ce qui avait créé des interférences et empêcher les mécaniciens de bien entendre le type de pneus à monter sur sa voiture. "On a souvent l'impression d'avoir laissé tout le monde tomber quand on fait une erreur, et il est vital de ne pas être submergé car, au bout du compte, pour gagner un championnat il faut performer sur 23 courses", admet le n°63 de l'écurie à l'Etoile.

Enlever l'étiquette de "Monsieur samedi"

Après trois saisons dans une écurie de bas de tableau, justement, George Russell va devoir donner des garanties solides, régulières. Ce qui le changera de Williams, où il pouvait "explorer de façon assez extrême" des réglages avec son style de pilotage. Chez Mercedes, ce ne sera plus possible : on lui demandera de rouler avec un set up donné et d'adapter son pilotage. En clair, il n'aura plus le droit à l'erreur. En conséquence, il sera particulièrement scruté cette année en termes de consistance, sur sa capacité à avoir de la performance sur un tour et un relais complet. Il le sait, on l'appelle "Monsieur samedi" en Angleterre parce qu'il n'a pas souvent été capable de confirmer ses belles qualifications en points le dimanche.
Et puis, si Mercedes l'a mis sur en avant sur les réseaux sociaux depuis le 1er janvier, ce n'est pas juste pour faire oublier le silence de Lewis Hamilton et des questions autour de son champion. C'est tout simplement parce que GR63 a désormais des obligations d'un autre niveau. "De Williams, où j'avais la chance de ne pas avoir tant d'activité marketing que ça de par notre position, je passe chez Mercedes où nous avons des tonnes de sponsors et beaucoup d'engagements auquel les pilotes doivent assister", explique-t-il. Sans préciser qu'il en fera sûrement plus que l'Anglais, qui fait, d'un contrat sur l'autre, la réduction de ses apparitions promotionnelles un point de négociation.

"En tête, c'est là où je voulais être"

Chez Williams, il avouait déjà qu'à chacune de ses fautes, tout le monde était au courant. Mais la pression qu'il devra supporter sera d'une toute autre dimension avec Lewis Hamilton de l'autre côté du garage. A ce titre, on se demande même s'il ne devrait pas abandonner son rôle de président de l'association des pilotes de Grands Prix (GPDA), qu'il avait repris début 2020 à la retraite de Romain Grosjean. Rien de tout ça dans son discours. Il est prêt à faire face à tout, sans redouter quoique que ce soit. Avec un podium à son palmarès - grâce à une belle qualification - l'an dernier à Spa dans les conditions que l'on sait, l'espoir britannique n'a même pas peur de mener une course, car il l'a déjà fait.
"J'étais en tête (ndlr : à Sakhir en 2020), et c'était une course comme une autre, assure-t-il. Il n'y avait pas de pression supplémentaire parce que c'est là où je voulais être". A ceci près que c'était Valtteri Bottas dans ses rétroviseurs et pas un garçon de la trempe de Lewis Hamilton ou Max Verstappen (Red Bull).
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Sur le même sujet
Partager cet article
Publicité
Publicité