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Formule 1 - "L'effet de sol donnera de plus belles courses en 2022 et on n'aura peut-être plus besoin du DRS"

Stéphane Vrignaud

Mis à jour 16/12/2021 à 11:41 GMT+1

FORMULE 1 - La saison de 2022 verra le retour des monoplaces à effet de sol. Il sera plus facile pour un pilote de suivre une autre voiture et d'attaquer en virage. Jacky Eeckelaert, qui a été l'ingénieur de Kimi Räikkönen, Jenson Button et Rubens Barrichello en Formule 1, nous explique tous les bénéfices de cette nouvelle donne, qui pourrait même sonner la fin du DRS. L'aube d'une révolution.

La Formule 1 sort-elle grandie de cette saison ?

2022 va marquer un changement en F1. Tout d'abord, est-ce que ce retour à l'effet de sol (ndlr : force verticale qui plaque la voiture au sol) vous paraît judicieux pour résoudre les problèmes qu'avaient les pilotes à doubler ?
Jacky Eeckelaert : Certainement, ça va dans le bon sens. Maintenant, est-ce que les chiffres avancés de la CDF - la simulation par ordinateur de l'écoulement d'air - sont justes ou pas, on verra. Avec le règlement de 2021, une Formule 1 qui se rapprochait d'une autre voiture devant elle à deux longueurs, elle perdait jusqu'à 50% d'appui, ce qui est énorme. De surcroît, la monoplace ne perdait pas l'appui à parts égales entre l'avant et l'arrière, mais elle était affectée aussi en termes de balance. Avec le nouveau règlement, le pilote qui arrivera derrière une autre auto ne perdra que 4 à 5%. Si c'est vrai, c'est clair que ça aidera les pilotes à faire de plus belles courses.
Perte d'appuis aérodynamiques d'une voiture suiveuseà 20 mètres derrièreà 10 mètres derrière
202135%45%
20224%18%
Contrairement à 1982, l'effet de sol ne sera pas créé par des jupes fixées sur les pontons mais par l'intermédiaire de deux tunnels où l'air s'engouffrera sous le fond plat.
J. E. : A l'époque, c'était des jupes coulissantes, en panneaux de matériaux synthétiques, qui avec des patins glissaient sur la piste. C'était dangereux : au passage sur une bordure, une jupe pouvait se coincer et la voiture se retrouvait avec 20 ou 30% d'appui en moins. Au virage suivant, le pilote allait tout droit dans le rail.
En 2022, ce seront des éléments fixes (des déflecteurs) générant des flux d'air très puissants le long de la voiture qui assureront l'étanchéité (ndlr : entre le plancher et le sol), qui ne sera pas mécanique comme avec les jupes coulissantes mais aérodynamique.
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Everything You Need To Know About The 2022 F1 Car © F1

Crédit: DR

Il sera plus facile de suivre un concurrent, mais cela sera-t-il plus facile aussi de doubler ?
J. E. : Oui. Si je prends l'exemple de Montréal, un pilote peut suivre une autre voiture dans l'épingle parce que la vitesse n'est pas élevée, et prendre l'aspiration pour dépasser dans la longue ligne droite suivante. En revanche, si un virage rapide précède une ligne droite, c'est beaucoup plus dur car on ne peut s'approcher à cause d'une perte d'appui et de balance. L'obligation de respecter une certaine distance empêche d'espérer passer à l'aspiration. C'est d'ailleurs pour ça qu'on a inventé le DRS, que je trouve un peu artificiel.
Ce DRS pourrait disparaître après une période d'observation en 2022.
J. E. : Si les chiffres vus en simulation sont vrais, je pense qu'on n'aura peut-être plus besoin du DRS.
Est-ce que cet effet de sol ne sera pas surtout efficient sur des circuits qui ont de longues courses en appui ?
J. E. : A Barcelone par exemple, si on n'a pas dépassé avant les deux premiers virages (n°1 et 2), c'est quasiment fini (à part au n°10). A partir de 2022, ce sera peut-être possible de suivre une auto de près dans la courbe à 180° du n°3, qui se prend à 250 km/h, et attaquer au freinage au n°4. Il faut voir en piste. Et puis plus loin au n°9 pour passer au freinage du n°10.
Pourrait-on se passer du DRS sur tous les circuits ou faudrait-il quand même le garder pour Monaco, ou des circuits urbains avec beaucoup de virages à basses vitesses ?
J. E. : Si le DRS a un effet beaucoup plus important sur certains circuits que d'autres, il faudra quand même le garder sur tous les circuits. Disons que ça sera assez intelligent de le conserver sur toute la première saison.
Est-ce que certains pilotes vont plus tirer parti de cette possibilité de suivre une voiture et attaquer à des endroits moins courants ?
J. E. : Dur à dire mais les pilotes sont tous les mêmes : ils sont prêts à n'importe quoi pour doubler. Une chose est sûre : ça va augmenter le nombre de tentatives.
Ce nouveau règlement va-t-il changer le travail en soufflerie ?
J. E. : Certainement. Ça arrive de mettre deux modèles à échelle de 60% l'un derrière l'autre et on essaie de voir quelle est l'influence aérodynamique sur le modèle situé derrière.
Maquette de monoplace de 2022 le 15 juillet 2021 à Silverstone
Concrètement, qu'est-ce que ça changer en termes de circulation d'air pour un pilote au volant ?
J. E. : Les appuis aérodynamiques étaient répartis jusque dans un passé récent à un tiers sur l'aileron avant, un tiers sur l'aileron arrière et un tiers avec le diffuseur du plancher. Je pense qu'on va passer à 20% à l'avant, 20% à l'arrière, et 60% sur le plancher. L'aileron arrière plus large va aussi créer des turbulences aérodynamiques plus fortes qui aspirent l'air et dégage l'aileron avant de la voiture qui suit. Cette dernière aura moins de perturbations à l'avant en virage. Les pilotes vont sentir moins de turbulences. Il roulera quasiment comme s'il était tout seul. Ce ne sera pas ça, mais ça se rapprochera de cette sensation.
Est-ce que ça augmentera le phénomène d'aspiration ?
J. E. : Je ne pense pas. C'est pour ça que je pense qu'il faudra garder le DRS dans un premier temps.
Le règlement verra aussi les jantes passer de 13 à 18 pouces, avec l'adoption de pneus tailles basses.
J. E. : Ces nouveaux pneus subiront moins de déformations verticales. Ça demandera certainement des changements au niveau des suspensions, des amortisseurs, mais c'est assez facile à déterminer. Du fait de la construction du pneu, il y aura peut-être aussi moins de surchauffe du pneu. Donc moins d'usure, avec pour résultat une voiture plus constante en course et la possibilité d'attaquer plus.
Max Verstappen (Red Bull) en test à Abu Dhabi le 14 décembre 2021
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