ATP Dubaï : Novak Djokovic, un premier accroc peut-être pas si anecdotique

Il n'en a pas fait une maladie. Et en prenant un minimum de recul, difficile de lui tort. Oui, Novak Djokovic a connu vendredi pour la première fois en 2023 le goût amer de la défaite en demi-finale du tournoi ATP 500 de Dubaï. Sa fantastique série de 20 victoires (démarrée lors du Masters de Turin fin 2022) a ainsi pris fin et il n'est de fait plus invaincu cette saison. Mais cela ne remet absolument pas en cause tout ce qu'il a réalisé par ailleurs : la conquête à Melbourne d'un 22e titre en Grand Chelem record (partagé avec Rafael Nadal) et le statut de patron ultime du tennis mondial au règne le plus long depuis la création des classements ATP et WTA.

L'identité de son bourreau et sa dynamique actuelle - 14 victoires consécutives, trois titres en trois semaines - tendent à relativiser son échec cette semaine. Le Serbe a d'ailleurs rendu un hommage appuyé à Daniil Medvedev. "Il provoque les fautes chez tous ses adversaires parce que c'est son jeu, c'est ce qu'il fait. Et il le fait extrêmement bien. Il est très patient, très fort physiquement. Pour sa taille, il se déplace bien. Son revers est l'un des coups le plus réguliers sur le circuit à l'heure actuelle", a-t-il considéré en conférence de presse.

De retour aux affaires, le Russe a lui-même estimé avoir joué son meilleur tennis et que Djokovic, lui, n'y était pas parvenu. Un constat partagé par le numéro 1 mondial qui n'avait pas débarqué aux Emirats arabes unis dans des conditions optimales. De son propre aveu, "Nole" manquait d'entraînement avant ce tournoi à cause des séquelles physiques de son aventure australienne. De quoi reconnaître sans difficulté la supériorité adverse.

"Je tire beaucoup de positif de ce tournoi. La façon dont je me suis senti pendant toute la semaine me satisfait vraiment quant à l'état actuel de mon corps. Je ne savais pas comment il allait réagir après ma blessure. J'ai perdu contre meilleur que moi. Je sais que je n'ai pas bien joué dans quelques moments décisifs, mais c'était aussi dû à la qualité de son tennis. C'est dommage d'avoir commis de vraiment mauvaises fautes directes dans le premier set pour lui offrir le deuxième break. Mais c'est le tennis. Vous apprenez de vos erreurs et des défaites, et j'espère que je serai meilleur la prochaine fois. On passe au prochain défi."

Le prochain défi, justement : c'est peut-être là où le bât blesse. Djokovic lui-même ne sait pas à l'heure actuelle à quoi il ressemblera. Si sa requête d'autorisation spéciale pour voyager aux Etats-Unis - les étrangers non vaccinés n'y sont pas admis théoriquement jusqu'au 11 mai prochain - est appuyée par les directeurs des Masters 1000 d'Indian Wells et Miami ainsi que par la fédération américaine de tennis (USTA), elle n'a toujours pas reçu de réponse formelle des autorités américaines.

Alors le numéro 1 mondial pourra-t-il enchaîner et rebondir dès la fin de semaine prochaine dans le désert californien ? Rien n'est moins sûr. Et l'alternative est claire : une pause forcée avant un retour sur ocre. "J'attends encore des nouvelles des Etats-Unis. S'il n'y a pas de tournée là-bas, j'imagine que je jouerai sur terre battue. Mon prochain tournoi sera probablement Monte-Carlo dans cette hypothèse. Si c'est le cas, je vais prendre un peu de repos et je vais me préparer. La terre battue est la surface la plus exigeante, ça prend plus de temps que toute autre surface pour s'y acclimater", a-t-il encore noté.

Ce serait peut-être un mal pour un bien, alors que Roland-Garros occupe déjà ses pensées comme nouvel objectif suprême. C'est bien du côté de la porte d'Auteuil qu'il pourrait conquérir pour la première fois seul la marque de référence du nombre de sacres en Majeurs (23). Disposer de plus de temps dans cette optique ne peut pas lui faire de mal. Certes, le rythme de la compétition lui manquerait quelque peu, mais il a assez prouvé par le passé qu'il était capable de vite le retrouver pour ne pas s'en inquiéter.

On l'a compris, ce petit accroc à Dubaï et une éventuelle pause forcée en mars ne sont pas de nature à perturber plus que cela Djokovic lui-même et sa foi en ses capacités. En revanche, ils sont de nature à redonner quelque espoir à la concurrence. Sur sa lancée des trois dernières semaines, Daniil Medvedev a par exemple beaucoup à gagner à Indian Wells et Miami où il n'avait pas vraiment brillé l'an dernier. De quoi éventuellement remettre en cause la mainmise sur le circuit du Serbe depuis plus de six mois (40 victoires sur ses 42 derniers matches).

Carlos Alcaraz et Stefanos Tsitsipas ont aussi une belle opportunité à saisir aux Etats-Unis, si leur corps le leur permet (blessures respectives à la cuisse droite et à l'épaule). Comme le dit l'adage, les absents ont toujours tort. Et si Djokovic doit effectivement attendre le mois d'avril pour reprendre sa raquette, il n'aura plus cette aura d'invincibilité qui l'accompagne, et peut-être fera-t-il face à des rivaux revigorés. Un nouveau défi certainement pas de nature à l'effrayer, mais qui redonnerait du piment à la saison en cours.