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"Une douleur atroce" : Fritz, de la peur du forfait au bonheur du sacre

Laurent Vergne

Mis à jour 21/03/2022 à 10:21 GMT+1

MASTERS 1000 INDIAN WELLS - A 24 ans, Taylor Fritz a doublé dimanche son nombre de titres sur le circuit. Et celui-ci vaut son pesant d'or. Le Californien du sud est comme chez lui à Indian Wells. Ce premier Masters 1000, conquis face au géant Rafael Nadal, lui confère une autre dimension. Certes, Nadal était diminué, mais Fritz a connu lui-même une sacrée frayeur avant la finale...

Nadal a serré les dents, Fritz a serré le jeu : le résumé de la finale

Taylor Fritz se souviendra de ce dimanche 20 mars 2022. Cette journée pourrait marquer un avant et un après dans la carrière du joueur américain, dont le palmarès jusqu'ici se limitait à un titre, un ATP 250 conquis sur le gazon d'Eastbourne au début de l'été 2019. Ce sacre à Indian Wells, avec en prime une victoire sur Rafael Nadal en finale, est évidemment d'un tout autre calibre. Le voilà dans la caste des vainqueurs en Masters 1000.
Mieux, il n'a pas gagné un Masters 1000 mais "ce Masters 1000" dit-il en parlant de "son" tournoi. "Je n'arrête pas de me dire 'Non, non ce n'est pas possible' et pourtant si, c'est bien réel. C'était vraiment un rêve de gamin de gagner ici, je suis tellement heureux que j'en pleure", a confié l'enfant de Rancho Santa Fe, qui a grandi dans le sud de la Californie, à deux heures de route à peine de cette part de désert où se niche le complexe d'Indian Wells.
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Un dernier coup droit gagnant et Fritz peut exulter : la balle de match face à Nadal

Nous lui avons dit 'Ne joue pas ce match'
Mais ce dénouement heureux trouve un écho encore plus particulier dans le contexte de cette journée, car Taylor Fritz a bien cru qu'il allait devoir renoncer la mort dans l'âme. Touché à la cheville samedi soir lors de sa demi-finale victorieuse contre Andrey Rublev, l'Américain a connu une alerte plus sévère encore en fin de matinée, dimanche, lors d'un échauffement qui a viré au calvaire. "Je ne peux même pas décrire à quel point c'est invraisemblable d'avoir pu jouer comme j'ai joué aujourd'hui parce que j'ai ressenti la pire douleur de ma carrière ce matin, a-t-il expliqué juste après la balle de match. Sur quelques changements de direction, j'ai hurlé. La douleur était atroce."
Il n'était toutefois pas envisageable de ne pas au moins tenter sa chance. Pourtant, son staff a tenté de l'en dissuader. Paul Annacone, un des trois entraîneurs qui gravitent dans son team avec Michael Russell et David Nainkin, ne voulait pas prendre de risque. "Tous les trois, avec Michael et Wolfgang Oswald (son préparateur physique, NDLR), nous lui avons dit 'Ne joue pas ce match', a raconté Annacone au site de l'ATP Tour. Taylor a dit 'Je joue. Je peux le faire. Je veux aller sur le court contre Rafa et voir si j'arrive à passer au-dessus de ça.'"
"Je me suis juste dit qu'il était impossible que je ne joue pas ce match, a confirmé le joueur. On a bien travaillé avec l'équipe avant le match, on s'est occupé de ma cheville et en début de match, je me suis rendu compte que mes sensations étaient vraiment meilleures que prévu." Pourtant, quand, dès le premier point de la finale, il s'est retrouvé à terre au filet, son clan a dû trembler. Mais il a pu jouer sans retenue et c'est au contraire Rafael Nadal, gêné par des douleurs au dos, aux côtes et dans la poitrine, qui s'est retrouvé diminué. Un sacré renversement de situation en l'espace de quelques heures.
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Taylor Fritz : "Gagner ici, c'était un de mes rêves"

Maître de ses nerfs

Reste qu'ils sont nombreux à pouvoir témoigner du fait que, même lorsqu'il n'est pas à 100%, le champion espagnol est difficile à terrasser. Taylor Fritz lui-même a pu redouter de s'ajouter à la longue liste de ceux qui ont cru mettre Nadal K.O. avant de sortir du court vaincu. Car après une première manche tranquille, l'Américain a bataillé jusqu'au bout d'un deuxième acte tendu et achevé au tie-break, alors qu'il avait déjà obtenu une balle de match à 5-4. Qui peut dire comment tout cela se serait terminé si Fritz avait été embarqué dans un set couperet par l'increvable majorquin ?
Ce fut peut-être là le plus grand mérite du Californien qui, en dépit de l'enjeu, aussi colossal qu'inédit pour lui, de la stature gigantesque de son adversaire, voire de l'attitude d'un public loin d'être acquis à sa cause, a su garder la maîtrise de ses nerfs et de ses émotions. Courageux à l'échange, et solide dans sa tête, il n'a pas bronché après être passé à un point du titre dans ce 10e jeu de la seconde manche. Pour lui, c'est encore plus beau d'avoir gagné comme ça, et face à cet adversaire-là. "Pour gagner les grands titres, il faut être capable de battre les grands joueurs et Rafa est un des plus grands si ce n'est le plus grand joueur de l'histoire", estime-t-il.
J'ai tellement perdu ces matches contre les gros joueurs
Il est bien placé pour savoir ce que cela signifie. Fritz avait affronté cinq fois Novak Djokovic, deux fois Roger Federer et une fois Rafael Nadal avant ce dimanche. Bilan ? Huit matches, huit défaites. "J'ai tellement perdu ces matches contre les gros joueurs… J'avais l'impression qu'ils étaient imbattables, que c'était beaucoup trop haut pour moi", a admis celui qui est devenu le premier Américain à soulever le trophée à Indian Wells depuis Andre Agassi en 2001.
Taylor Fritz n'a pas non plus oublié que ces bêtes-là sont peut-être encore plus dangereuses quand elles sont blessées. Sa défaite la plus frustrante, la plus douloureuse, il l'avait peut-être subie à l'Open d'Australie en 2021, lorsqu'il s'était incliné en cinq manches face à Djokovic sur la Rod Laver Arena. Le fameux match de la déchirure abdominale du Djoker, qui avait déclenché une vaste polémique à Melbourne et suscité des propos amers chez Fritz. La vérité, c'est qu'il n'était pas encore prêt. 13 mois plus tard, il l'est davantage.
Lundi, fort de ce titre, Fritz va pointer à la 13e place mondiale, alors qu'il naviguait encore aux alentours de la 40e au début du mois d'octobre dernier. Le tennis américain s'est peut-être déniché un leader durable, puisque le cogneur US n'a encore que 24 ans. Tout ceci devra évidemment trouver confirmation sur la durée. Mais il faut bien commencer quelque part. A Indian Wells, par exemple. Pour Taylor Fritz, c'était même l'endroit rêvé.
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Taylor Fritz après sa victoire sur Rafael Nadal en finale à Indian Wells

Crédit: Getty Images

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